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Paris. Opéra de Paris. Opéra Bastille, amphithéâtre. 14 & 15-III-2025. Joseph Haydn (1732-1809) : L’Isola disabitata, Azione teatrale en deux parties (1779) sur un livret de Pietro Metastasio. Mise en scène : Simon Valastro. Costumes : Angelina Uliashova. Décors : Lucie Mazières. Lumières : James Angot. Assistant mise en scène : Raphaël Jacobs. Avec le 14 : Sofia Anisimova, Costanza ; Sima Ouahman, Silvia ; Luis-Felipe Sousa, Enrico ; Bergsvein Toverud, Gernando ; le 15 : Amandine Portelli, Costanza ; Isobel Anthony, Silvia ; Clemens Frank, Enrico ; Liang Wei, Gernando ; Nicolas Fayol, Danseur. Artistes en résidence à l’Académie Orchestre Ostinato, direction musicale : François López-Ferrer
Dans une production minimaliste de Simon Valastro, la rare action théâtrale, L'Isola Disabitata (L'Île Inhabitée), de Joseph Haydn met en lumière huit nouveaux chanteurs, sous la direction de grand style de François López-Ferrer.
Avec quatre solistes seulement et un orchestre de chambre, L'Isola Disabitata est le type d'ouvrage parfait pour mettre à profit les forces de l'Académie de l'Opéra national de Paris. D'une heure trente à peine, cette azione teatrale de 1779 associe deux hommes et deux femmes avec quatre tessitures différentes pour porter un livret simple mais efficace de Pietro Metastasio.
En quelques lignes, l'action se résume à deux sœurs sur une île déserte, Silvia ayant été abandonnée par son mari Gernando, en réalité enlevé par des pirates et fait prisonnier pendant plusieurs années. À nouveau libre, Gernando retourne sur l'île avec son ami Enrico tenter de retrouver celle qu'il aime pour, une fois le quiproquo éludé, retomber dans les ses bras, tandis que la sœur de sa bien-aimée, Costanza, tombe sous le charme de son ami Enrico. Fait de numéros qui alternent d'abord exclusivement des airs et duos, l'opéra s'achève en trio puis par un grand quatuor vocal où tous quittent l'île et triomphent en levant les voiles vers un autre monde.
En quelques éléments, puisque cette mise en scène est prévue pour l'Amphithéâtre de l'Opéra Bastille, Simon Valastro installe l'action dans un lieu désertique, où d'un parterre de cendre ne ressort qu'une grande pierre centrale volcanique (décors de Lucie Mazières), ce lieu pouvant, sous les lumières d'abord sombres, puis de plus en plus claires (James Angot) s'apparenter aussi à un paysage lunaire. Les costumes (Angelina Uliashova) tranchent par leur clarté, avec des robes blanches immaculées pour les deux solitaires, et des vêtements marron clairs et blancs pour leurs charmants sauveurs. Bien conçue pour donner toute la place aux chanteurs, la proposition scénique permet de découvrir pendant huit soirs deux distributions très différentes, qui influencent la direction du chef et mettent en avant huit chanteurs, pour la plupart d'une qualité égalant celles de nombreux artistes confirmés.
Devant l'Académie Orchestre Ostinato placé sur les gradins à cour, le chef François López-Ferrer, récent assistant du mozartien Louis Langrée à Cincinnati, offre le premier soir un jeu d'une précision et d'une pétillance parfaitement adaptées à Haydn. Plus dynamique le lendemain, il ajoute encore plus d'énergie pour s'accorder à la puissance des chanteuses de la seconde distribution. Si le cor est plus affuté le premier des deux soirs auquel nous avons assisté, la première violon et plus encore le violoncelle solo y gagnent en dynamique le second. Particulièrement impressionnante par sa tenue de chant, bien que son jeu fasse encore très enfantin, l'Américaine Isobel Anthony se démarque du cast A ; elle pourra assurément bientôt prétendre à assumer des rôles plus lourds comme Violetta. Très adaptée, sa Costanza trouve une partenaire idéale avec la mezzo française Amandine Portelli, de 21 ans seulement, tant par la voix, elle aussi puissante et pleine d'éclat, que par le jeu théâtral qui manque encore de maturité. Dans la distribution B, la Française d'origine irano-marocaine Sima Ouahman est une soprano légère mieux adaptée avec ce que l'on peut attendre de la partition, plus de douceur et plus de maturité de jeu (qui caricature à loisirs l'espièglerie) s'accordent aussi mieux à la Costanza de la mezzo ukrainienne Sofia Anisimova, particulièrement séduisante dans son grand air.
En face d'elles, le Gernando du ténor américano-norvégien Bergsvein Toverud, est d'une superbe puissance et d'un timbre coloré déjà très caractérisé (nous avons assurément ici un futur Erik du Vaisseau Fantôme !). Luis-Felipe Sousa se montre un peu moins agile pour Enrico, car sous ce rôle de baryton mozartien se présente en réalité une vraie basse qui a d'ailleurs déjà été un Commandeur (Don Giovanni). Le lendemain, Clemens Frank correspond plus au rôle, un peu léger sur le souffle peut-être, mais d'une grande beauté de chant et sans doute limité car souffrant depuis les répétitions. Porté par le ténor chinois Liang Wei, le Gernando du second cast, lui aussi léger, apporte un chant subtil à une distribution d'où la soprano américaine Isobel Anthony ressort encore lors du quatuor vocal.
Pour accompagner les deux casts se trouve également un danseur, Nicolas Fayol, dont les petits bois dans les cheveux et la chorégraphie pendant l'ouverture servent à imager une biche : celle devenue l'amie de Silvia pendant les longues années d'attente sur l'Île.
Chaque soir réunis par quatre sur la pierre centrale devenue bateau par l'ajout d'une voile pour la scène finale, ces huit chanteurs de l'Académie de l'Opéra national de Paris peuvent déjà prétendre à s'échapper vers des horizons prometteurs !
Crédits photographiques : Vincent Lappartient © Studio j'adore ce que vous faites
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