Pietari Inkinen remplace Mikko Franck dans la 7ème de Chostakovitch
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Paris. Maison de la Radio ; Auditorium. 07-III-2025. Geoffrey Gordon (1968*) : Ses purs ongles très-haut, œuvre pour clarinette, chœur et orchestre. Jérôme Voisin, clarinette. Chœur de Radio France, direction : Roland Hayrabedian. Dmitri Chostakovitch (1906-1975) : Symphonie n°7 en ut majeur « Léningrad », op. 60. Orchestre Philharmonique de Radio France, direction : Pietari Inkinen
Mikko Franck souffrant, Roland Hayrabedian récupère la création de Geoffrey Gordon, idéale pour mettre en valeur le clarinettiste Jérôme Voisin, avant que Pietari Inkinen ne reprenne la main et décuple les forces du Philhar dans la « Leningrad » de Chostakovitch.
Bien qu'il ait pu gérer les répétitions en début de semaine, Mikko Franck est annoncé souffrant le jeudi et remplacé par deux chefs le vendredi, dans un concert constitué d'une création et d'une grande œuvre symphonique.
Grand spécialiste de musique contemporaine, le directeur artistique de Musicatreize Roland Hayrabedian devait gérer uniquement la préparation du Chœur de Radio France pour la création de Geoffrey Gordon, composée d'après le poème éponyme de Mallarmé Ses purs ongles très-haut. Mais avec la défection du directeur musical, il reprend également la partie orchestrale pour interpréter en première mondiale ce concerto avec chœur, en compagnie du Philharmonique de Radio France et de son clarinettiste solo Jérôme Voisin. Quasi-citation de l'introduction de Lohengrin, les mesures liminaires sont vite interrompues par la clarinette, qui entraîne à sa suite l'orchestre par un style beaucoup plus scintillant. Parfois acides, les couleurs de cette pièce toujours tonale s'orientent régulièrement aussi vers les bleutés des ouvrages de Ravel et plus encore de Gershwin, dans une ambiance dérivée des Américains du siècle précédent, à commencer par celle des symphonies d'Ives.
Impeccable, Jérôme Voisin doit assurer une partie soliste très fournie, elle aussi très colorée, déployée sur tout l'ambitus de son instrument jusqu'à des extrêmes graves et de récurrents suraigus, avec, au centre, une grande cadence. Au troisième mouvement, il laisse la lumière au chœur pour introduire le poème, puis l'entrecoupe pour vite reprendre sa place principale, comme il l'avait fait avec l'orchestre au tout début de l'œuvre. Malheureusement, si le chef dirige avec précision les musiciens, les chanteurs manquent pour leur part de netteté et peinent à rendre le texte intelligible, malgré une écriture musicale pensée pour le faire ressortir. Bien écrite, la pièce montre le métier certain de Gordon, sans pour autant réussir à se démarquer vraiment, surtout après l'impact de la seconde partie de soirée.
Finlandais comme Mikko Franck, Pietari Inkinen est arrivé le jour même et n'a pu influencer le Philharmonique que l'après-midi, pendant la générale d'une Symphonie n°7 de Chostakovitch qu'il avait toutefois dirigée tout juste un mois plus tôt à Turin. Dès les premiers accords se retrouve le son chaud en provenance de l'Europe du Nord, habituel chez Mikko Franck et bien maintenu par son compatriote. Adaptée à cette symphonie de guerre composée en plein siège de Leningrad, la direction d'Inkinen tend à faire ressortir la violence de l'œuvre par des cordes pleines et l'aigreur des sonorités recherchées par le compositeur russe, notamment dans les bois. Le hautbois solo se démarque tout d'abord, puis le cor anglais, avant le piccolo, la flûte solo, et à l'opposé dans la raucité des graves, de superbes interventions de la clarinette basse. À noter également, la caisse claire qui tient parfaitement son rythme pour laisser se développer le long crescendo du premier mouvement, surpuissant au climax, même si sa force reste moins impressionnante que celle du National de France, neuf ans plus tôt dans ce même auditorium sous la direction de Neeme Järvi.
Sans jamais perdre la conduite du discours, Pietari Inkinen parvient à toujours maintenir l'attention pendant le Moderato, puis à créer une atmosphère méditative à l'Adagio, avant de relancer un Philharmonique des grands soirs (magnifiques cuivres et percussions !) dans la bataille du dernier mouvement. En étant encore plus nettes, certaines attaques auraient pu ouvrir plus de brèches dans ce finale, et toucher encore plus l'auditeur à la coda. Mais pour une récupération le jour même, cette direction nous fait surtout penser que, sans la nomination annoncée pour 2026 de Jaap van Zweden, le chef Finlandais aurait fait un excellent prétendant pour reprendre la direction musicale de l'une des meilleures formations françaises.
Crédits photographiques : © ResMusica (Saluts)
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Paris. Maison de la Radio ; Auditorium. 07-III-2025. Geoffrey Gordon (1968*) : Ses purs ongles très-haut, œuvre pour clarinette, chœur et orchestre. Jérôme Voisin, clarinette. Chœur de Radio France, direction : Roland Hayrabedian. Dmitri Chostakovitch (1906-1975) : Symphonie n°7 en ut majeur « Léningrad », op. 60. Orchestre Philharmonique de Radio France, direction : Pietari Inkinen