Concerts, La Scène, Musique de chambre et récital

Exposition de Tableaux par Benjamin Grosvenor

Plus de détails

Paris. Théâtre des Champs-Élysées. 9-II-2025. Maurice Ravel (1875-1937) : Gaspard de la Nuit. Modeste Moussorgski (1839-1881) : Tableaux d’une exposition. Benjamin Grosvenor, piano

Deux jours après son interprétation du Concerto pour piano n° 1 de Mendelssohn avec l'Orchestre de Chambre de Paris, retrouve le TCE pour une mise en couleur de Ravel et Moussorgski parfois séduisante mais souvent perturbante.


Habitué de la série des concerts du dimanche matin du Théâtre des Champs-Élysées, dont la fin est malheureusement annoncée après cette 50e et dernière saison, s'intéresse, dans un programme cohérent jusqu'aux bis, à deux chefs-d'œuvre de Ravel et Moussorgski.

Songeur dès l'Ondine, le Gaspard de la Nuit du compositeur français tente par l'ample palette du pianiste anglais de se parer de multiples couleurs, sans pour autant retrouver les miroitements perçus avec d'autres ces dernières années. Très personnel, le jeu est régulièrement perturbé, entre la fluidité de la main droite et une main gauche plus mesurée, voire parfois en décalage de style, bien que toujours parfaitement suiveuse dans le rythme. Le Gibet amplifie la mélancolie, et permet à son pendu de regarder le coucher de soleil pendant de longs instants, tant le pianiste prend le temps de l'exposition. Lui-même comme absorbé dans les rayons d'un monde disparaissant, il use là encore d'une main gauche parfois surprenante plus en retrait pour accompagner la discours porté par l'autre. Conclusif, Scarbo nous laisse nous-même rêveur, non tant par les déferlantes de notes parfaitement révélées, que par les variations de teintes qu'elles imposent ici à la pièce.

De retour sur la scène après les applaudissements, et comme de coutume taillé à l'anglaise en costume deux pièces et nœud papillon sanglé au collet, Grosvenor peut à présent peindre les Tableaux d'une Exposition de Moussorgski. Là encore, son style particulier fascine parfois autant qu'il perturbe souvent. Avec la Promenade I, on semble entrer avec lui dans la Galerie Tretiakov et y trouver d'abord les pastels russes des portraits d'Ilya Repine. Mais à peine Gnomes débuté, les brumes de la main gauche semblent illustrer une toile de Turner, tandis que la droite, dure sans être puissante comme celles des pianistes de l'école russe, peine à exalter le sujet.

La Promenade II ramène à de jolies images, vite limitées dans une moiteur là encore d'une approche très britannique, sans l'arrière-plan sombre des grands slaves. Tuileries laisse toujours la main droite guide de l'exposé, avant un Bydlo pris dans son aspect purement rythmique, sans puissance ni exaltation. Loin de réussir à créer la grande montée de tension que l'on peut parfois y entendre, le tableau s'assagit même dans la deuxième partie du développement, où la pédale très soutenue ne décuple jamais le jeu, appuyé sans pour autant être tendu. Certes, cela permet de reprendre avec calme et dans la continuité la Promenade IV, mais au risque de rendre l'excursion de moins en moins passionnante, sans faire ressortir les poussins de leur coques, ni confronter les deux juifs polonais, juste habillés de beaux habits bariolés. Le Marché de Limoges rappelle la fluidité avec laquelle le pianiste peut aussi jouer, mais les Catacombes manquent de froideur et la Grande Porte de Kiev de majesté pour véritablement passionner.

En bis, choisit Bach et son Prélude BWV 855, joué d'une manière si romantique qu'il fait d'abord penser à une pièce écrite un siècle après la partition originale pour clavecin. Puis il revient une dernière fois dans la lumière pour un ultime tableau : Jeux d'eau de Ravel, d'où s'écoulent de beaux reflets, et d'où ressortent assez peu d'éclats.

Crédits photographiques : © ResMusica

(Visited 403 times, 1 visits today)

Plus de détails

Paris. Théâtre des Champs-Élysées. 9-II-2025. Maurice Ravel (1875-1937) : Gaspard de la Nuit. Modeste Moussorgski (1839-1881) : Tableaux d’une exposition. Benjamin Grosvenor, piano

Mots-clefs de cet article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Reproduire cet article : Vous avez aimé cet article ? N’hésitez pas à le faire savoir sur votre site, votre blog, etc. ! Le site de ResMusica est protégé par la propriété intellectuelle, mais vous pouvez reproduire de courtes citations de cet article, à condition de faire un lien vers cette page. Pour toute demande de reproduction du texte, écrivez-nous en citant la source que vous voulez reproduire ainsi que le site sur lequel il sera éventuellement autorisé à être reproduit.