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Genève. Victoria Hall. 31-I-2025. Jules Massenet (1842-1912) : Werther, drame lyrique en quatre actes sur un livret de Paul Milliet, Edouard Blau et Georges Hartmann d’après Les Souffrances du jeune Werther de Goethe. (Version de concert). Mise en espace : Loïc Richard. Avec Pene Pati, Werther ; Florian Sempey, Albert ; Adèle Charvet, Charlotte ; Magali Simard-Galdès, Sophie ; Pierre-Yves Pruvot, Le bailli ; Alexis Varenne, Schmidt ; Sebastia Peris, Johann ; Hugo Fabrion, Brühlmann ; Elise Lefebvre, Kätchen. Maîtrise du Conservatoire Populaire (Cheffe de choeur : Magali Dami). Orchestre de Chambre de Genève. Direction musicale : Marc Leroy-Calatayud.
Remarquable Werther de Jules Massenet avec un Pene Pati solaire et bouleversant dans sa prise de rôle, et un Orchestre de Chambre de Genève éclatant de vigueur sous la baguette d'un inspiré Marc Leroy-Calatayud.
Dans cette version mise en espace par Loïc Richard, celui-ci confirme la très bonne impression qu'il avait laissé de son travail scénique de Roméo et Juliette de Gounod avec Benjamin Bernheim à Genève en janvier 2023. Avec quelques sièges, une table, une petite estrade, un jeu d'acteur intelligent, il réussit à raconter le drame de Werther malgré cette grande économie de moyens. Ici encore, nous aimons son respect inconditionnel des chanteurs leur laissant l'espace dont ils ont besoin pour exprimer leur chant.
La réussite du Roméo et Juliette de Gounod mentionné plus haut était en partie due à l'excellence de la direction d'orchestre de Marc Leroy-Calatayud. A l'aise avec l'ensemble genevois renforcé par quelques éléments de la Haute Ecole de Musique, le jeune chef vaudois affirme son autorité bienfaisante en offrant des couleurs orchestrales d'une grande beauté tout au long de la soirée. Après une ouverture au tragique soutenu, on apprécie les belles couleurs que les bois et les cuivres délivrent sous sa baguette. Peut-être aurait-on aimé des cordes, particulièrement les violons, plus présentes. Comme lors de sa précédente prestation, le chef se distingue par son extrême attention aux chanteurs calmant l'ardeur de son orchestre pour ne pas couvrir les voix et se retournant à maintes occasions pour suivre le soliste dans son expression vocale ou pour s'assurer de la précision d'un départ.
Le plateau vocal est d'une tenue correcte marquée par la présence lumineuse de Pene Pati. Non pas que le ténor cherche à s'imposer d'une quelconque manière mais, la lumière de son être, la présence, le charisme débordant, la justesse de l'interprétation, la bonté qui en émane, fait qu'il capte l'attention à chaque instant. Les couleurs de son chant donnent à son personnage un relief stupéfiant de vérité. Son Werther est loin de l'être torturé par un amour impossible. Il est profondément désolé et son suicide final apparait comme l'aboutissement d'une vie exemplaire et non pas comme le résultat d'un échec amoureux inexorable. Point d'excès vocal : il est simplement un homme atteint douloureusement par la déception amoureuse et on reste bouleversé par l'extrême sensibilité qu'il donne à son personnage. On relèvera qu'il domine son instrument vocal avec une facilité apparente lui laissant la possibilité de pianissimo d'une grande beauté comme d'aigus jaillissants et solaires rappelant ceux d'un Luciano Pavarotti. L'opéra est commencé depuis à peine une dizaine de minutes lorsqu'il apparait et, ses premiers mots Alors, c'est bien ici la maison du bailli ? que déjà on tombe sous le charme. L'envolée de son Ô nature, pleine de grâce, reine du temps et de l'espace fini de nous faire chavirer. Tantôt à pleine voix, tantôt dans l'intimité d'un pianissimo, il conquiert. Point n'est besoin d'arriver au fameux Pourquoi me réveiller ? chanté d'admirable façon.
A ses côtés, le reste de la distribution s'emploie à s'élever à la hauteur du rôle-titre. Ainsi, la vaillante prise de rôle de la mezzo-soprano Adèle Charvet (Charlotte) met du temps à s'affirmer. Ce n'est guère qu'après le début du troisième acte après un très beau Va ! Laisse couler mes larmes que la mezzo française ose se lâcher pour investir son rôle d'une pâte vocale intense dans l'esprit du personnage. La voix, jusqu'ici retenue, s'exprime heureusement laissant entrevoir sa dramatisation des derniers instants de l'opéra qui verra Adèle Charvet au meilleur de la soirée. La soprano Magali Simard-Galdès (Sophie) distille sa jolie voix dans une sautillante et insouciante Sophie. Autre prise de rôle, le baryton Florian Sempey (Albert) compose un personnage quelque peu frustre avec une belle voix au phrasé cassant. De son côté, le baryton Pierre-Yves Pruvot (Le Bailli) reprend avec bonheur et bonhommie le personnage qu'il a à son répertoire depuis une bonne dizaine d'années.
Le triomphe fait par les spectateurs jette spontanément Pene Pati dans les bras d'Adèle Charvet pour une longue embrassade les libérant d'une prise de rôle délicate mais admirablement réussie.
Crédit photographique : © Christian Lutz
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Genève. Victoria Hall. 31-I-2025. Jules Massenet (1842-1912) : Werther, drame lyrique en quatre actes sur un livret de Paul Milliet, Edouard Blau et Georges Hartmann d’après Les Souffrances du jeune Werther de Goethe. (Version de concert). Mise en espace : Loïc Richard. Avec Pene Pati, Werther ; Florian Sempey, Albert ; Adèle Charvet, Charlotte ; Magali Simard-Galdès, Sophie ; Pierre-Yves Pruvot, Le bailli ; Alexis Varenne, Schmidt ; Sebastia Peris, Johann ; Hugo Fabrion, Brühlmann ; Elise Lefebvre, Kätchen. Maîtrise du Conservatoire Populaire (Cheffe de choeur : Magali Dami). Orchestre de Chambre de Genève. Direction musicale : Marc Leroy-Calatayud.
Vu à Strasbourg, je serai beaucoup moins enthousiaste… Pene Patti confond Massenet et Bellini, survolant la rôle avec un chant certes superbe mais assez décoratif avec force répliques murmurées et pianissimos qui deviennent fatigants et surtout frustrants, on a envie de lui dire « mais chante ! ». Le Massenet de Werther, ce sont des vagues qui vous emportent, qui vous chavirent, rien de cela ici.
Je suis assez d’accord sur Adèle Charvet qui a mis du temps à être convaincante, ce fut le cas dans la deuxième partie.
Beaucoup moins emballé que vous par l’orchestre, fort modeste, avec des sonorités pas toujours bien agréables et une homogénéité bien fragile (les phrases des violoncelles au début du III très fausses…). Idem pour Marc Leroy-Calatayud qui cherche à faire du joli et du propre en permanence, pas de folie, pas de vagues qui vous emportent dans une œuvre pourtant si émouvante… De belles choses cependant par moments.
Quant à la mise en espace, je crois que je préfèrerais encore une version vraiment de concert avec chanteurs derrière leurs pupitres…
Déception pour moi que cette performance.