Mozart à Salzbourg par Hervé Niquet : la musique sacrée d’un jeune génie
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Metz. Arsenal. 25-I-2025. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Messes brèves KV 192 et 194 ; sonates d’église KV 328 et 225 ; motet Ave verum corpus KV 618 ; œuvres de Michael Haydn (1737-1806) et Joseph Haydn (1732-1809). Le Concert spirituel, direction : Hervé Niquet
Parent pauvre d'une vaste production, le versant sacré de l'œuvre mozartien est présenté, en concert à l'Arsenal de Metz, comme un laboratoire passionnant en dialogue avec la musique des frères Haydn.
Bien sûr, on peut éprouver un grand plaisir mélomane à réentendre une fois de plus les piliers du répertoire, mais quelle tristesse ce serait de s'en contenter ! En plaçant au cœur de son programme mozartien les deux Missae breves KV 192 et 194, composées toutes deux en 1774, Hervé Niquet fait œuvre fort utile, et ce d'autant plus que l'étape messine de ce programme prend place après une bonne dizaine d'autres : c'est donc un grand public qui aura pu en profiter, et on imagine bien qu'un disque finira par être enregistré.
Le terme Missa brevis ne renvoie pas à une indication de durée ou à un genre musical constitué, mais à une fonction liturgique : c'est parce qu'elles étaient destinées à des offices du dimanche sans solennité particulière, hors grandes fêtes, hors messes célébrées personnellement par l'archevêque, qu'elles bénéficient d'un moindre faste musical que les missae solemnes, dans l'orchestration, dans la place dévolue aux solistes vocaux notamment. Les deux messes au programme du concert, toutes deux écrites à l'été 1774, montrent bien que ces limitations structurelles ne signifient pas nécessairement une moindre ambition compositionnelle de la part de Mozart : on est bien loin ici de ses premiers essais, qui durent parfois moins d'un quart d'heure, répétition de mots et préludes orchestraux proscrits. Hervé Niquet, prenant la parole en ouverture du concert, parle de façon pour le moins ambiguë des effectifs très réduits à la disposition de Mozart, quatre chanteurs, deux violons, un orgue, une basse, ce qui est contraire au matériel d'exécution original conservé aujourd'hui encore à Salzbourg : la partition éditée contient d'ailleurs pour les chanteurs des passages solistes alternant avec les tutti, ce dont il ne tient pas compte en les confiant au chœur. On y perd certainement en profondeur sonore, et c'est une intervention bien plus invasive que l'effectif un peu plus large des cordes (4 premiers et 4 seconds violons contre 2 et 2 dans le matériel original), mais ces scrupules musicologiques n'entament guère le plaisir immédiat du mélomane devant le concert.
Pour les deux messes, Niquet commence par un Kyrie très tenu, un peu sage, mais sa direction prend ensuite de l'ampleur et de l'énergie, sans sacrifier au grand spectacle comme il le fait souvent. Le plus grand intérêt du concert, cependant, ce sont les morceaux insérés dans les messes pour reconstituer l'ensemble du déroulement liturgique de la messe, telle qu'on pouvait le pratiquer à Salzbourg à l'époque de Mozart : on y gagne une occasion rare d'entendre deux des nombreuses sonates d'église composées par Mozart, après le Gloria, diverses courtes œuvres sacrées de Mozart lui-même, et surtout des frères Haydn. Les deux œuvres du Salzbourgeois d'adoption Michael Haydn ne laissent pas une grande impression, mais l'offertoire Non nobis domine de Joseph est saisissant, et on est heureux de pouvoir entendre en concert son premier Te deum, moins exubérant que le second plus connu (et beaucoup plus tardif), mais qui donne au chœur du Concert spirituel l'occasion de montrer toute sa virtuosité.
Crédit photographique : © Guy Vivien
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Metz. Arsenal. 25-I-2025. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Messes brèves KV 192 et 194 ; sonates d’église KV 328 et 225 ; motet Ave verum corpus KV 618 ; œuvres de Michael Haydn (1737-1806) et Joseph Haydn (1732-1809). Le Concert spirituel, direction : Hervé Niquet