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Stuttgart. Opernhaus. 27-XII-2024. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Idomeneo re di Creta, opéra en trois actes sur un livret de Giambattista Varesco d’après Danchet. Mise en scène : Bastian Kraft ; décors : Peter Baur ; costumes : Jelena Miletić. Avec Jeremy Ovenden (Idomeneo), Anett Fritsch (Idamante), Lavinia Bini (Ilia), Diana Haller (Elettra), Charles Sy (Arbace), Eleazar Rodríguez (Grand prêtre), Aleksander Myrling (Neptune). Staatsopernchor Stuttgart ; Staatsorchester Stuttgart ; direction : Cornelius Meister.
Bastian Kraft revient à Stuttgart avec Idomeneo, mais sans la réussite de sa Rusalka. Dans la fosse, Cornelius Meister se perd en afféteries et laisse ses chanteurs en plan.
Après sa stupéfiante Rusalka sur la même scène, on attendait beaucoup de cette nouvelle production d'Idomeneo par Bastian Kraft ; la déception n'en est que plus grande face à un spectacle qui ne propose même pas l'esquisse d'une interprétation. La soirée ne commence pourtant pas mal, avec ces ombres chinoises où l'ombre des chanteurs sur scène se mêle à des projections, comme l'esquisse des rêves des personnages, mais on s'en désintéresse vite, et aucune des images successives proposées par la mise en scène ne réveille l'attention. Il ne suffit pas de quelques coiffures extravagantes pour construire une interprétation : certes, Idomeneo n'est pas facile à mettre en scène, comme le montrent les échecs cuisants de Peter Sellars à Salzbourg (2019) ou d'Antú Romero Nunes à Munich (2021), mais David Bösch avait réussi admirablement à en faire une histoire actuelle et bouleversante, à Bâle (2013) puis dans différentes villes européennes. Comment se contenter d'un spectacle où l'essentiel de ce sommet mozartien qu'est le quatuor Andrò ramingo e solo est chanté en bord de scène, face au public, comme dans une vieille mise en scène du Met ? Faire patauger les chanteurs dans un centimètre d'eau pendant toute la deuxième partie, montrer un modèle du toit de cuivre de l'Opéra, qu'une tempête avait mis en boule il y a quelques années, comme image du monstre, faire de Neptune une créature des marais, tout ceci ne fait pas une interprétation, et moins encore une direction d'acteurs cohérente et vivante. On aura donc vu sur la scène de Stuttgart ce que Kraft sait faire quand l'œuvre le stimule (Rusalka) et quand elle l'ennuie (cet Idomeneo) : espérons qu'il saura à l'avenir mieux choisir ses entreprises.
L'oreille n'est hélas pas beaucoup plus à la fête, d'abord à cause de ce qui se passe en fosse : Cornelius Meister n'a décidément pas beaucoup de sensibilité mozartienne, et sa direction tombe souvent dans la fadeur à force de délicatesse mal venue, comme si Mozart n'était qu'une galanterie XVIIIe désuète. Surtout, il ne soutient pas les chanteurs, qu'on sent systématiquement en-deçà de leurs possibilités. Le choix d'Anett Fritsch en Idamante est incompréhensible : la tessiture est trop grave pour sa voix de soprano qui chantait encore Freia il y a quelques mois, et la phrase initiale du quatuor déjà cité est d'une dureté qui en brise tout l'effet. À l'inverse, c'est la mezzo Diana Haller qui, pour son premier rôle de soprano, affronte Elettra : elle est la seule à tirer son épingle du jeu, peut-être parce que, faisant partie de la troupe de Stuttgart, elle n'est pas déstabilisée par le manque de soutien de la fosse : ni la mise en scène ni la direction ne l'aident à approfondir le personnage, mais du moins la musique est parfaitement en place. Les choses sont plus compliquées pour Lavinia Bini en Ilia : elle aussi parvient à sauver les notes, mais elle se laisse gagner par la fadeur expressive de l'orchestre et ne parvient jamais à émouvoir. Le principal problème de la soirée, cependant, est le rôle-titre : Jeremy Ovenden, abandonné par la mise en scène, joue mal, et les vocalises périlleuses de Fuor del mar sont seulement ébauchées – la comparaison a ses limites, mais Charles Sy qui chante Arbate est au moins à l'aise avec les siennes dans son air du début du deuxième acte, et la voix apparaît beaucoup plus souple.
Crédits photographiques : © Matthias Baus
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Stuttgart. Opernhaus. 27-XII-2024. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Idomeneo re di Creta, opéra en trois actes sur un livret de Giambattista Varesco d’après Danchet. Mise en scène : Bastian Kraft ; décors : Peter Baur ; costumes : Jelena Miletić. Avec Jeremy Ovenden (Idomeneo), Anett Fritsch (Idamante), Lavinia Bini (Ilia), Diana Haller (Elettra), Charles Sy (Arbace), Eleazar Rodríguez (Grand prêtre), Aleksander Myrling (Neptune). Staatsopernchor Stuttgart ; Staatsorchester Stuttgart ; direction : Cornelius Meister.