Théo Fouchenneret signe une lecture pudique mais intense des treize nocturnes de Fauré

L'année du centième anniversaire de la disparition de Gabriel Fauré s'achève. Théo Fouchenneret signe à cette occasion une lecture réfléchie grande profondeur des treize nocturnes, véritable journal intime musical s'étalant, de 1875 à 1921, sur toute la carrière du compositeur.

Du premier, opus 33/1 écrit en 1875 au treizième, ultime pièce pour piano du vieux maître composé en 1921, les Nocturnes permettent de suivre l'évolution musicale de l'auteur. Théo Fouchenneret construit son parcours centré sur le cinquième, la page préférée du compositeur. Musique ambivalente dont la simplicité apparente cache bien des clairs-obscurs. Fouchenneret éloigne les premiers, en particulier les trois réunis sous l'opus 33 publié en 1882, l'année du mariage du compositeur, de cette facilité un peu salonnarde qu'on a, injustement à notre sens, reprochée, aux premières œuvres de Fauré, comme si leur brio, leur éclatante profusion mélodique et le bonheur qu'elles dégagent étaient répréhensibles. Il centre l'essentiel du cycle sur les cinquième et sixième, œuvres-pivots dont les arrière-plans schumanniens éclairent subtilement le lyrisme secret du compositeur. Après le huitième (1902), les difficultés d'audition croissantes du maître vont encore épurer son style, refermer sa personnalité, jusqu'au lyrisme intérieur des derniers nocturnes, comme les dernières pages de ce journal secret.

Avec cet album longuement mûri comme en témoigne le beau texte de présentation signé du pianiste, Théo Fouchenneret signe un  des hommages les plus marquants de cette année Fauré qui s'achève. Loin des excès romantiques de Lucas Debargue (Sony), il rejoint les quelques réussites mémorables de Jean-Philippe Collard (Erato) ou Eric Le Sage (Alpha, récemment réédité avec la musique de chambre). Un portrait pudique et intense du maître de Pamiers. Superbe !