Iván Fischer et le Concertgebouw à Luxembourg, plus de contrôle que d’ivresse
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Luxembourg. Philharmonie. 16-XII-2024. Alphons Diepenbrock (1862-1921) : Marsyas, Entr’acte ; Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Concerto pour piano n° 9 KV 271 «Jenamy» ; Antonín Dvořák (1841-1904) : Symphonie n° 8 op. 88. Maria João Pires, piano ; Orchestre royal du Concertgebouw ; Iván Fischer, direction.
Quelques jours après la Philharmonie de Paris, Maria João Pires est la vedette d'une soirée qui permet d'abord d'admirer la beauté sonore de l'orchestre.
C'est par une œuvre du méconnu Alphons Diepenbrock, en guise de quota de musique néerlandaise, que s'ouvre le programme choisi par l'orchestre du Concertgebouw pour une courte tournée passant par Luxembourg. Ces dix minutes orchestrales entre Faune de Debussy et souvenirs de Siegfried-Idyll se laissent après tout écouter ; leur mérite principal est cependant de permettre à l'orchestre de retrouver avec bonheur l'acoustique généreuse de la Philharmonie de Luxembourg : ce murmure des cordes, capables de créer du volume sonore tout en restant d'une légèreté de songe, suffirait pour notre bonheur.
Immédiatement ovationnée par le public, Maria João Pires interprète le Concerto n° 9 de Mozart : il faut attendre le mouvement lent pour que la poésie dont on la sait capable commence à se faire entendre. Le premier mouvement est marqué par la rigueur un peu morne avec laquelle le chef tient l'orchestre, avec un tempo étonnamment étiré sans bénéfice émotionnel ou musical. La direction de Fischer ne favorise ici pas la fantaisie et l'inventivité, ni chez les solistes de l'orchestre, ni chez la pianiste : il reste chez celle-ci une poésie sonore, une délicatesse de toucher qui font des miracles et emportent l'auditeur dans le dernier mouvement, mais le dialogue avec l'orchestre ne peut avoir toute l'intensité qu'on aimerait entendre.
Enfin, la Symphonie n°8 de Dvořák permet de retrouver l'orchestre dans toute sa splendeur, offrant à l'ensemble comme aux solistes des occasions de briller. La rigueur et le sens du contrôle de Fischer sont ici tout sauf des obstacles : dans cette œuvre étonnante où les moments plus expérimentaux voisinent avec d'autres franchissant allègrement les limites du kitsch, Fischer donne une unité à l'ensemble en ne laissant pas les moments les plus exubérants aller jusqu'à leur apogée, par exemple le solo de flûte du quatrième mouvement. La tendance folklorique de certains moments, que Fischer souligne en choisissant une des danses slaves de Dvořák, reste ainsi au second plan, ce qui est plutôt bien venu et replace l'oeuvre dans la continuité des septième et neuvième symphonies.
Crédits photographiques : © Philharmonie de Luxembourg/ Sébastien Grébille
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Luxembourg. Philharmonie. 16-XII-2024. Alphons Diepenbrock (1862-1921) : Marsyas, Entr’acte ; Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Concerto pour piano n° 9 KV 271 «Jenamy» ; Antonín Dvořák (1841-1904) : Symphonie n° 8 op. 88. Maria João Pires, piano ; Orchestre royal du Concertgebouw ; Iván Fischer, direction.