Plus de détails
Wien. Theater an der Wien ; Kammeroper. 14-XII-2024. Gottfried von Einem (1918-1996) : Der Prozess, oper in zwei Teilen op.14 sur un livret de Boris Blacher et Heinz von Cramer, d’après le roman éponyme de Franz Kafka. Arrangement pour petit orchestre de Tobias Leppert. Mise en scène : Stefan Herheim. Décors : Silke Bauer. Costumes : Nina Paireder. Lumières : Franz Tscheck. Dramaturgie : Kai Weßler. Avec : Robert Murray, Josef K. ; Anne-Fleur Werner, Die Frau ; Alexander Grassauer, Franz/Der Fabrikant/Der Geistliche ; Timothy Connor, Willem/Advokat ; Leo Mignonneau, Der Aufseher/Der Kanzleidirektor ; Valentino Blasina, Der Student/Titorelli/1. Junger Mann ; Lukas Karzel, Gerichtsdiener/Der Passant/2. Junger Mann ; Philipp Schöllhorn, Der Untersuchungsrichter/Onkel Albert/3. Junger Mann ; Fabian Tobias Huster, Kafka (rôle muet). Klangforum Wien PPCM Academy, direction musicale : Walter Kobéra
Au Kammeroper de Vienne, Der Prozess de Gottfried von Einem est repris dans une orchestration réduite, qui permet de rentrer frontalement dans l'absurdité du monde de Kafka, ramené sur scène aux lubies de Stefan Herheim.
Crée en 1953 par Karl Böhm (enregistrement publié par Orfeo), Der Prozess (Le Procès) est le seul opéra d'après le roman de Kafka encore parfois joué aujourd'hui. Et à la vue du taux de remplissage du Kammeroper (Opéra de Chambre) de Vienne, complet tous les soirs, nous pouvons regretter que la production ne soit pas coproduite avec une salle comme le Théâtre de l'Athénée à Paris, ou surtout que le Theater an der Wien n'ait pas osé remonter l'ouvrage dans la salle principale et dans la version originale pour grand orchestre.
Six ans après une nouvelle production de Dantons Tod au Wiener Staatsoper, Der Prozess entre donc au répertoire du deuxième opéra de Vienne par la petite porte, où la proximité du public avec la scène donne cependant de la force à la représentation. Dans un style plus berlinois que viennois, l'arrangement pour petit ensemble de Tobias Leppert pour une vingtaine de membres du Klangforum Wien PPCM Academy, placés derrière la scène, prend parfois les allures expressionnistes d'un ouvrage de Kurt Weill. Dirigée de manière précise par Walter Kobéra, cette orchestration permet de belles focalisations sur les instruments par un (hautbois, basson, violoncelle, contrebasse), mais fait parfois perdre de l'intensité aux scènes les plus tendues, qui seraient mieux soutenues par la densité d'un grand orchestre.
À son habitude, Stefan Herheim met l'histoire en abyme en intégrant sur une scène où se trouve toujours le lit de Joseph K. (décors de Silke Bauer) le rôle muet de Franz Kafka, tenu par le suspicieux Fabian Tobias Huster. Dans la même optique, les autres protagonistes tiennent régulièrement dans leurs mains le roman Le Procès, afin de découvrir par avance la suite du drame. Au tout début de l'œuvre, Joseph K est réveillé par deux hommes, sans savoir pourquoi, mais sa longue chevelure blanche (costumes de Nina Paireder) se retrouve sous forme de perruques grossières sur tous les autres acteurs du drame, ainsi que sur les musiciens. En cela, on comprend que l'arrestation aléatoire aurait pu toucher n'importe qui plutôt que lui, incapable de comprendre pourquoi ni de quoi il est inculpé.
En projetant un peu le propos, nous pouvons alors percevoir que nous sommes tous inéluctablement condamnés par une force supérieure, non seulement à obéir à des situations absurdes (la situation politique française actuelle par exemple), mais aussi à mourir à la fin, quoi que l'on fasse pour s'en sortir. Dans la continuité de ce propos, la proposition de Herheim est particulièrement soutenue pendant près de deux heures par la dramaturgie pleine d'énergie de Kai Weßler, bien appuyée par les lumières de Franz Tscheck, ainsi que par l'engagement des chanteurs.
Sans avoir jamais froid aux yeux tant elle est souvent dénudée (ce n'est pas la seule !), la Frau d'Anne-Fleur Werner tient un chant dynamique, malgré le fait d'être un peu trop souvent ramenée à un rôle très sexualisé. La mise en scène trouve en cela trop de facilité pour caractériser ce personnage perturbateur du roman. Le Joseph K de Robert Murray est évidemment le chanteur le plus présent, toujours très clair sur son texte pour tenter de démêler sa situation. Il est balloté entre tous les autres protagonistes, du baryton Timothy Connor dans les rôles de Willem puis de l'Avocat, au Franz puis Fabricant intègre du baryton-basse Alexander Grassauer, ensuite ridiculement grimé en cardinal religieux à bas-résilles rouges pour jouer l'Ecclésiaste. De ses trois rôles, Valentino Blasina ressort soit presque nu, soit par son style italien pour Titorelli, tandis que Lukas Karzel et Philipp Schöllhorn se complètent par leur vivacité récurrente.
Après cette reprise réussie, il reste maintenant à espérer qu'une grande salle osera remonter l'œuvre en grand dans un avenir proche.
Crédits photographiques : © Herwig Prammer
Lire aussi :
Plus de détails
Wien. Theater an der Wien ; Kammeroper. 14-XII-2024. Gottfried von Einem (1918-1996) : Der Prozess, oper in zwei Teilen op.14 sur un livret de Boris Blacher et Heinz von Cramer, d’après le roman éponyme de Franz Kafka. Arrangement pour petit orchestre de Tobias Leppert. Mise en scène : Stefan Herheim. Décors : Silke Bauer. Costumes : Nina Paireder. Lumières : Franz Tscheck. Dramaturgie : Kai Weßler. Avec : Robert Murray, Josef K. ; Anne-Fleur Werner, Die Frau ; Alexander Grassauer, Franz/Der Fabrikant/Der Geistliche ; Timothy Connor, Willem/Advokat ; Leo Mignonneau, Der Aufseher/Der Kanzleidirektor ; Valentino Blasina, Der Student/Titorelli/1. Junger Mann ; Lukas Karzel, Gerichtsdiener/Der Passant/2. Junger Mann ; Philipp Schöllhorn, Der Untersuchungsrichter/Onkel Albert/3. Junger Mann ; Fabian Tobias Huster, Kafka (rôle muet). Klangforum Wien PPCM Academy, direction musicale : Walter Kobéra