À la Maison de la Musique de Nanterre, Horace le coucou chanté aux enfants

Conçu à l'adresse du jeune public (de 6 à 8 ans) invité à s'asseoir en bord de plateau, Horace le coucou est une fable initiatique aussi drôle que poétique, une commande de l'ensemble TM+ au librettiste Pierre Senges et au compositeur Alexandros Markeas.

Amoureux des contes, Pierre Senges, qui est aussi le librettiste de L'Opera (forse) de Francesco Filidei, a ce goût pour le milieu animalier et l'univers poétique et décalé qui le traverse. Horace n'est pas un coucou comme les autres car l'oiseau n'émet pas le cri attendu de sa communauté mais le « hi-han » des ânes. Comment va-t-il pouvoir vivre avec cette différence ? Peut-on y remédier ? Comment se faire accepter et trouver son identité dans un monde où l'étrangeté et le bizarre sont suspectés ? Les questions sous-tendent l'histoire mais tout se dit et se chante dans la bonne humeur, avec la verve et le burlesque à la clé, dans une mise en scène au cordeau signée Édouard Signolet.

Une guirlande lumineuse au-dessus des têtes donne une allure de fête à ce petit théâtre. Ils sont trois sur le plateau durant les quarante minutes du spectacle : soprano et comédienne, Élise Chauvin, silhouette ailée, tient la scène avec ses deux complices instrumentistes joliment costumés, l'accordéoniste Julia Sinoimeri et le joueur d'euphonium Vianney Desplantes qui ne la quittent pas d'une semelle : ils sont avec elle, jouant et chantant autour de la cage de l'oiseau, puis, à cour, sur le petit promontoire auquel on accède par un escalier, ou encore au centre du plateau, assis sur leurs blocs cylindriques, selon ce qui s'y raconte. Autour d'Horace le coucou gravitent bon nombre de personnages incarnés par Élise Chauvin. Tour à tour actrice, narratrice et chanteuse, elle jongle en virtuose avec le parlé et le chanté ; très drôle, elle ne ménage ni ses cris ni ses effets de gorge lorsqu'elle endosse le rôle de la pharmacienne hystérique qui veut régler le problème d'Horace à coup de vitamines ou celui de maître corbeau et ses leçons de diction bien inutiles, auxquelles les enfants sont invités à participer. Les deux musiciens jouent de leur instrument, dont les vertus sont multiples ; ils commentent, colorent, abondent les mots du récit mais donnent aussi de la voix, avec une aisance et un naturel confondants. Les chansons d'Alexandros Markeas arrivent dans la foulée. Puisant à différentes sources (musette, tango, fanfares, etc.), elles sont joliment troussées et d'une vitalité galvanisante permettant à la musique de jouer avec les effets de lumière de Christophe Schaeffer.

Plus fin et de bons conseils, comme dans Le Petit Prince, c'est le renard qui saura guider plus sûrement Horace là où la différence n'est plus un problème et où il pourra se construire une identité. « Mais pourquoi le monsieur a-t-il un tutu de danseuse, comme dans le ballet blanc ? » : la question reviendra souvent à la bouche des enfants quand, à l'issue du spectacle, ils pourront librement s'exprimer ; une question à laquelle Vianney Desplantes répond avec un grand sourire : pour le plaisir !

Crédit photographique : © Maison de la Musique de Nanterre / Casilda Desazars