Le vif argent de Saint-Saëns et l’or de Ravel avec Les Siècles à Tourcoing
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Tourcoing. Théâtre municipal Raymond Devos. 07-11-2024. Camille Saint-Saëns (1835-1921) : Danse macabre op.40, Concerto pour violoncelle n°1 en la mineur op.33. Maurice Ravel (1875-1937): Daphnis et Chloé, ballet. Sol Gabetta, violoncelle et direction du Concerto pour violoncelle de Saint-Saëns. Les Siècles, direction : Ustina Dubitsky
Un Saint-Saëns vif argent et un Ravel solaire (Daphnis et Chloé dans sa version intégrale) étaient au programme du concert donné à Tourcoing par l'orchestre Les Siècles dirigé par Ustina Dubitsky, en compagnie de la violoncelliste Sol Gabetta.
François-Xavier Roth n'est plus actuellement à la tête de l'orchestre Les Siècles qu'il a fondé, pour les tristes raisons que l'on connaît. Mais c'est l'une de ses plus brillantes assistantes qui a pris la baguette ce jeudi soir à Tourcoing, pour diriger un programme exclusivement français de grande qualité. Lauréate du concours La Maestra 2022 (Prix de l'orchestre), Ustina Dubitsky est également cheffe-assistante au Güzernich de Cologne. Elle connaît donc parfaitement Les Siècles et les qualités spécifiques de cet orchestre symphonique jouant sur instruments d'époque.
Ce sont ces couleurs particulières, la chaleur des cordes, la matité des vents et des bois, l'éclat sec des percussions, excellant dans le répertoire français, que l'on retrouve ce jeudi soir à Tourcoing dans le concert consacré à Camille Saint-Saëns et Maurice Ravel.
Saint-Saëns, c'est le « bon chic » français dans la meilleure acception du terme. Un maître de la grande forme classique, de la flamboyance orchestrale et de la mélodie éternelle.
La célébrissime Danse macabre op. 40, qui ouvre le concert, fait partie des « tubes » du compositeur. Une irrésistible ronde sépulcrale dont s'emparent Ustina Dubitsky et Les Siècles avec gourmandise.
Une introduction idéale au Concerto pour violoncelle n°1 en la mineur op.33 qui lui succède. La non moins flamboyante violoncelliste Sol Gabetta est la soliste de cette splendide partition qu'elle dirige depuis son pupitre. Joué d'un seul souffle, ce concerto est tout d'abord une ode au timbre du violoncelle. Tour à tour rageur, espiègle, tendre, volontaire, l'instrument est ici traité comme un chanteur d'opéra. Sol Gabetta, à la sonorité chaleureuse, au vibrato discret, se coule avec aisance dans ce rôle de « diva », toutefois sans ostentation.
Rien d'étonnant qu'elle propose en bis une adaptation pour violoncelle et orchestre du célèbre air « Mon coeur s'ouvre à ta voix » de l'opéra Samson et Dalila du même Saint-Saëns.
En seconde partie du concert, Ustina Dubitsky reprend la baguette pour le ballet Daphnis et Chloé de Maurice Ravel, dans sa version intégrale de près d'une heure. Composé entre 1909 et 1912 pour les Ballets Russes de Diaghilev, Daphnis et Chloé est en effet plus souvent joué dans sa version abrégée en deux suites d'orchestre. « Mon intention en l'écrivant était de composer une vaste fresque musicale, moins soucieuse d'archaïsme que de fidélité à la Grèce de mes rêves » , écrivait Maurice Ravel. Et c'est en effet une partition enivrante que nous réserve ce maître de l'orchestration. Derrière l'argument du mythe de Daphnis et Chloé, et son symbolisme, il faut le reconnaître un peu désuet, Maurice Ravel nous emmène dans une succession de danses éblouissantes. Sans la vision matérielle de danseurs sur scène, la musique pure du ballet n'évite pas quelques longueurs, mais en grand représentant de la musique descriptive, Ravel a aussi réussi une partition cinématographique avant l'heure. On y ressent quasi physiquement la lumière du prodigieux Lever du jour (malheureusement sans les choeurs), on est éclaboussé par les embruns marins lors du rapt de Chloé par les pirates (un passage où l'on perçoit l'admiration de Ravel pour la Shéhérazade de Rimski-Korsakov), on est terrassé par la force de la bacchanale finale.
Geste discret mais précis, Ustina Dubitsky mène ses troupes avec fermeté. Dans l'acoustique un peu sèche du théâtre municipal de Tourcoing, cette Daphnis et Chloé sur instrument d'époque nous ramène à la création de l'oeuvre au Théâtre du Chatelet de Paris en 1912. Un beau voyage dans le temps.
Crédits photographiques : Usitna Dubitsky © S-PH.Holger ; concert © Jean-Marc Petit/ResMusica : Sol Gabetta © Julia Wesely
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Tourcoing. Théâtre municipal Raymond Devos. 07-11-2024. Camille Saint-Saëns (1835-1921) : Danse macabre op.40, Concerto pour violoncelle n°1 en la mineur op.33. Maurice Ravel (1875-1937): Daphnis et Chloé, ballet. Sol Gabetta, violoncelle et direction du Concerto pour violoncelle de Saint-Saëns. Les Siècles, direction : Ustina Dubitsky