Sémiramis et Don Juan au Capitole, un puissant hommage à Christoph Willibald Gluck
Plus de détails
Toulouse. Théâtre du Capitole. 26-X-2024. Sémiramis & Don Juan. Dansé par le Ballet de l’Opéra national du Capitole, accompagné de l’Orchestre Le Concert des Nations. Direction de la danse : Beate Vollack. Direction musicale : Jordi Savall.
Sémiramis (2024). Chorégraphie : Ángel Rodríguez. Musique : Christoph Willibald Gluck. Scénographie : Curt Allen Wilmer, Leticia Gañán. Costumes : Rosa Ana Chanza Hernández. Lumières : Nicolás Fischtel.
Don Juan (2024). Chorégraphie : Edward Clug. Musique : Christoph Willibald Gluck. Scénographie : Marko Japelj. Costumes : Leo Kulaš. Lumières : Tomaž Premzl.
Comme évoqué lors d'un précédent entretien pour ResMusica, Beate Vollack, directrice de la danse de l'Opéra national du Capitole de Toulouse, commence sa toute première saison en invitant Ángel Rodríguez et Edward Clug pour une création originale autour de la musique de ballet de Christophe Willibald Gluck.
Après avoir porté une précédente saison conçue avant son arrivée à la direction du Ballet du Capitole, Beate Vollack propose cette année sa toute première programmation personnelle, dans une volonté de mettre en œuvre sa propre vision pour la compagnie toulousaine. Née d'une idée de Jordi Savall, Sémiramis et Don Juan réunit de façon inédite deux ballets composés par Christoph Willibald Gluck, respectivement chorégraphiés par Ángel Rodríguez et Edward Clug.
Le spectacle ne se contente toutefois pas de proposer deux, mais bien trois partitions exceptionnelles de Gluck, en commençant par une suite d'orchestre extraite de la tragédie-opéra Iphigénie en Aulide, jouée par l'ensemble Le Concert des Nations, fondé et dirigé par Jordi Savall. De par cet accueil uniquement musical, le public est immédiatement plongé dans l'univers du compositeur à l'honneur, véritable point de départ de l'ensemble du projet.
En effet, les chorégraphes Ángel Rodríguez et Edward Clug se sont vu confier l'exercice particulier de créer une relecture originale de deux tragédies mythiques à partir d'une composition musicale existante, les obligeant ainsi à trouver des solutions en faisant dialoguer recherche historique et artistique. Le spectacle se poursuit donc sur deux œuvres chorégraphiques fortement inspirées des œuvres originales, sans néanmoins reprendre la narration exacte des ballets d'action et des tragédies sur lesquels elles se basent.
Étonnamment, les deux chorégraphes, qui ne se connaissaient pas avant de travailler sur ce projet et qui ont mené leur création chacun de son côté, sont arrivés à deux œuvres aux nombreux points communs, parvenant ainsi à un ensemble cohérent et complémentaire. Le rideau s'ouvre sur Sémiramis avec une image très forte. Sept femmes semblent sortir de terre sous une lumière blanche mystique, émergeant au travers d'une tenture étendue sur la scène, imitant un sol naturel. Toutes semblent ne faire qu'une, comme une créature à plusieurs têtes et tentacules, grâce à une superbe séquence de bras minimaliste, en écho et en symétrie. Sept hommes les rejoignent pour un enchaînement de séquences en groupe au nombre de danseurs variable, l'enjeu étant de rendre hommage aux femmes d'aujourd'hui et de demain, en les faisant résonner avec la légendaire figure de la reine Sémiramis, femme de pouvoir aux multiples responsabilités et défiant les codes du genre.
En plus de couleurs de costumes similaires, deux variantes de bordeaux évoquant le rouge de l'amour et de la tragédie, les deux pièces ont recours à peu d'éléments de décors (tenture en fond de scène pour l'une, panneau en bois ajouré et statue de cheval massive pour l'autre). L'écriture chorégraphique est également proche, avec un style contemporain très imprégné de danse classique. Pourtant, si dans Sémiramis Ángel Rodríguez opte pour une danse puissante et contrôlée, avec beaucoup de développés hauts, de grands ronds de bras, de grands jetés ou de portés en tournant, dans Don Juan, Edward Clug se distingue par une écriture plus saccadée et anguleuse, en plus de l'ajout d'une touche humoristique, voire ironique, très certainement inspirée de la tragi-comédie du même nom de Molière. Ce ballet reprend également une narration très synthétisée de l'histoire de Don Juan, contrairement à celui totalement abstrait de Rodríguez.
Avec pour fil rouge la musique de Gluck, Sémiramis et Don Juan est une œuvre chorégraphique qui parvient à allier de façon maîtrisée l'ancien et le nouveau. Ángel Rodríguez et Edward Clug sont parvenus à faire ressortir ce qu'il y a d'universel dans les tragédies anciennes, grâce à un diptyque abouti s'articulant autour de la féminité et de la masculinité.
Crédits photographiques : © David Herrero
Plus de détails
Toulouse. Théâtre du Capitole. 26-X-2024. Sémiramis & Don Juan. Dansé par le Ballet de l’Opéra national du Capitole, accompagné de l’Orchestre Le Concert des Nations. Direction de la danse : Beate Vollack. Direction musicale : Jordi Savall.
Sémiramis (2024). Chorégraphie : Ángel Rodríguez. Musique : Christoph Willibald Gluck. Scénographie : Curt Allen Wilmer, Leticia Gañán. Costumes : Rosa Ana Chanza Hernández. Lumières : Nicolás Fischtel.
Don Juan (2024). Chorégraphie : Edward Clug. Musique : Christoph Willibald Gluck. Scénographie : Marko Japelj. Costumes : Leo Kulaš. Lumières : Tomaž Premzl.