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À Lausanne, La liberazione di Ruggiero dall’isola d’Alcina de Francesca Caccini

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Lausanne. Opéra de Lausanne. 20-X-2024. Francesca Caccini (1587-env.1641) : La liberazione di Ruggiero dall’Isola d’Alcina, opéra comique quatre scènes et un prologue sur un livret de Ferdinando Saracinelli. Mise en espace : Mathilde Etienne. Avec Alix Le Saux, Alcina ; Emiliano Gonzalez Toro, Ruggiero ; Lorrie Garcia, Melissa ; Juan Sancho, Nettuno/Astolfo ; Nathalie Perez, Nunzia/Damigella 1 ; Nicolas Brooymans, Uno de i mostri ; Jordan Mouaissia, Pastore/Vistola ; Mathilde Etienne, Sirena/Damigella 2 ; Cristina Fanelli, Sirena/Damigella 3 ; Pauline Sabatier, Sirena/Damigella 4. Ensemble I Gemelli. Direction musicale : Emiliano Gonzalez Toro et Violaine Cochard.

Soirée concertante réussie à l'Opéra de Lausanne avec une Liberazione di Ruggiero dall'isola d'Alcina de Francesca Caccini admirablement concoctée par un et son ensemble habités d'une rare élégance musicale et scénique.


Maintes fois, le chaland hésite à assister à une version concertante d'un opéra baroque. Les longs récitatifs, les airs monocordes, l'imbroglio des intrigues font de ces représentations des lectures parfois fastidieuses. Fréquemment aussi, le souci de l'authenticité contraint les metteurs en scène à des interprétations incongrues ou, au contraire, à des reconstitutions hasardeuses. Ainsi, on assiste à certaines de ces mises en scène qui se réduisent à des mises en espace, les déclamations des chanteurs étant régies par des conventions, qu'on tente de combler avec des décors et des costumes débordant de toutes parts. A Lausanne, rien de semblable avec cette Liberazione di Ruggiero dall'isola d'Alcina. Un spectacle qui, mis en espace, sans costumes sophistiqués, avec quelques rares accessoires, s'érige en une véritable mise en scène, toute vêtue du talent et de l'intelligence de sa conceptrice, (également cofondatrice d'). La complicité scénique est évidente, animée d'un même entrain dans l'expression musicale. Chacun est à sa place, chacun est parfaitement dans son rôle.

De chaque côté de la scène, les musiciens d' se font face, laissant entre eux un espace dans lequel se déroule l'action. Sur l'uni d'un fond de scène aux couleurs changeantes selon les moments de l'opéra, une petite estrade est aménagée pour les différentes entrées. On agite un tissu léger pour signifier le bord de mer, on reproduit le bruit du flux des vagues avec un tambourin rempli de petites billes que l'on penche d'un côté ou de l'autre. Tout est fait avec élégance, mesure et bonheur. Une foule de petits détails admirablement dosés illustrent le propos. L'illusion est parfaite.

Le même bonheur se retrouve dans la musique de cet opéra baroque, le premier connu pour avoir été composé par une femme. Et, l'impression qu'en laisse l'ensemble I Gemelli est que la musique de Francesca Caccini n'a rien à envier avec celles plus connues de ses contemporains.

Les chanteurs sont très bien dirigés théâtralement – chose d'autant plus difficile à réaliser que l'intrigue est bien pauvre puisqu'il s'agit en l'espace de 90 minutes de convaincre Ruggiero, prisonnier «volontaire» d'Alcina de délaisser sa prison dorée pour reprendre le combat glorieux qui a fait sa réputation. Chacun se régale et nous régale. Certes, on aurait aimé une Alcina () avec une projection vocale plus présente. On aime la théâtralité de la voix de Lorie Garcia lorsqu'elle imite un vieillard tentant de convaincre Ruggiero, bien que la mezzo soit elle aussi en manque de projection. On goûte la bonne idée de distribuer le rôle de Neptune au ténor barytonnant de (Neptune/Astolfo). Chargée d'harmoniques, puissante, éclatante, sa voix accroche le public. On apprécie de même l'excellente intervention de la basse (Une dei Mostri), étonnant d'agilité vocale, ainsi que le timbre très intéressant de la soprano (Sirena/Damigella 4). Le ténor Emiliano Gonzales Toro (Ruggiero), très sonnant avec sa projection vocale parfaitement maîtrisée et sa diction impeccable, domine le plateau. Quelques gestes, quelques mimiques lui suffisent pour imposer sans excès ni démonstration théâtrale ce Ruggiero admirablement pensé, très travaillé.

Une première représentation à Ambronay en septembre, une deuxième au Capitole de Toulouse, celle de l'Opéra de Lausanne, toutes très bien reçues par la critique et le public : nous ne saurions que recommander à nos lecteurs parisiens d'assister à l'unique représentation de cette pépite baroque à l'Opéra Royal de Versailles, le 3 mars prochain !

Crédit photographique : © Bertrand Pichene/Capitole de Toulouse (2024)

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Lausanne. Opéra de Lausanne. 20-X-2024. Francesca Caccini (1587-env.1641) : La liberazione di Ruggiero dall’Isola d’Alcina, opéra comique quatre scènes et un prologue sur un livret de Ferdinando Saracinelli. Mise en espace : Mathilde Etienne. Avec Alix Le Saux, Alcina ; Emiliano Gonzalez Toro, Ruggiero ; Lorrie Garcia, Melissa ; Juan Sancho, Nettuno/Astolfo ; Nathalie Perez, Nunzia/Damigella 1 ; Nicolas Brooymans, Uno de i mostri ; Jordan Mouaissia, Pastore/Vistola ; Mathilde Etienne, Sirena/Damigella 2 ; Cristina Fanelli, Sirena/Damigella 3 ; Pauline Sabatier, Sirena/Damigella 4. Ensemble I Gemelli. Direction musicale : Emiliano Gonzalez Toro et Violaine Cochard.

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