Molière en musique par les Arts Florissants

Dans un disque qui compile trois décennies d'enregistrement de musiques des comédies de Molière, les Arts Florissants réhabilitent l'importance de la musique dans le théâtre du dix-septième siècle.

On le sait désormais, la musique était indissociable du théâtre de Molière. Occultée des représentations théâtrales durant presque trois siècles, son grand retour doit beaucoup à William Christie dès les années 80. En 2022, une exposition à la bibliothèque de l'Opéra de Paris rappelle la naissance de la comédie-ballet et la collaboration de Molière avec Lully puis Charpentier. « Ne faire qu'une chose du ballet et de la comédie » : ainsi Molière caractérisait-il la nouvelle forme de spectacle qu'il inventait en 1661 avec Les Fâcheux. La musicalité de la langue de Molière se marie parfaitement avec la musique et la danse qui signent les divertissements royaux.

L'intermède des Grotesques du Mariage forcé, gravé ici dans une truculente version de 2013, présente une savoureuse satire de la Comédie Italienne (« Oh! Le joli concert et la belle harmonie »), en faisant référence aux personnages de la Commedia dell'arte : « Tout est bon quoi qu'on die, Tout bruit forme mélodie ». Dans cette compilation de différentes époques des Arts Florissants, la plus longue évocation est celle des intermèdes de Marc-Antoine Charpentier pour Le Malade imaginaire, enregistrés en 1990. C'est l'occasion de mesurer l'évolution de l'interprétation de ces musiques en plus de trente ans : si l'orchestre de l'époque présente les mêmes qualités dynamiques que celui d'aujourd'hui, il n'en est pas tout à fait de même pour les chanteurs, qui ne font pas preuve de la même liberté que celle de la génération suivante. La célèbre cérémonie burlesque de la réception du nouveau médecin est pimentée par l'apparition de William Christie lui-même dans le rôle du Président, qui déclame le latin de cuisine avec une impayable éloquence. Les enregistrements (2022) les plus récents concernent George Dandin, la Pastorale comique et Monsieur de Pourceaugnac, dont on se rappelle la version de 2016 par les Arts Florissants à Versailles. Et, bien sûr, la célèbre Marche pour la cérémonie des Turcs du Bourgeois gentilhomme, reprise dans un récent arrangement à deux clavecins, joué par William Christie et Justin Taylor pour conclure ce réjouissant programme.