L’intégrale des Liriche de Franco Alfano en première mondiale
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Franco Alfano (1875-1928) : intégrale des Liriche. Alexandra Flood, soprano; Nina Tarandek, mezzo-soprano; Tanja Ariane Baumgartner, mezzo-soprano ; Klaus Simon, piano. 3 CD bastille musique. Enregistrés au Hans-Rosbaud-Studio à Baden-Baden entre 2019 et 2021. Textes de présentation étoffés en anglais, allemand et italien, et poèmes (traduits en allemand et anglais). Durée totale : 3:34:48
Bastille musiqueAprès une intégrale en trois CD et en première mondiale des Lieder d'Erwin Schulhoff (Clef ResMusica), le pianiste Klaus Simon passe les Alpes vers l'Italie pour une nouvelle intégrale en première mondiale des mélodies de Franco Alfano.
Si l'art de la mélodie est d'abord connu par les Lieder germaniques, la mélodie française voire les songs britanniques, l'équivalent italien des liriche est une rareté. Et Franco Alfano se distingue par une production abondante et régulière tout au long de sa vie. Surtout connu pour avoir complété le Turandot de Puccini mais compositeur prolifique d'opéras, de ballets, d'une symphonie et de musique de chambre, il a été réapprécié dans les années 2000 en particulier pour son opéra Cyrano de Bergerac, composé en 1936 et défendu par rien moins que Roberto Alagna (à Montpellier en 2006) ou Placido Domingo (au Châtelet en 2009). Au plan politique, il s'est positionné en faveur de Mussolini, contribuant en 1925 à un Manifeste des intellectuels du fascisme, ce qui lui assura des positions officielles à Turin, Rome et Palerme, et ne l'empêcha pas de continuer ses activités après guerre, notamment à Pesaro au Liceo Musicale Rossini de 1947 à 1950. On est loin de la hauteur de vue et du courage farouche de son compatriote Toscanini…
De ces trois heures de mélodies qui couvrent cinquante ans de créations, on retiendra une grande retenue lyrique, très peu de mélodies adoptant une ligne opératique. A l'instar d'un Cyrano, le respect et la mise en avant du texte priment sur le lyrisme. Il peut y avoir de la tension, et les interprètes seront d'ailleurs régulièrement poussées à leurs limites tout au long des trois disques, mais les amateurs de sentimentalisme ou de débordements véristes feront bien de s'abstenir.
Les mélodies sont proposées dans l'ordre chronologique. Dans la première série de liriche avec la mezzo Nina Tarandek, de Felicità (1914) aux Sei liriche (1919-1922) en passant par les Trois poèmes de Tagore (1918), on apprécie les atmosphères d'attente, d'aspiration, entre attention portée au texte et élans de lyrisme, courts mais intense (Malinconia, Non partire, amor mio). Parmi les auteurs dont se nourrira Alfano pour ses mélodies, Tagore représente une source continue d'inspiration, il partageait avec lui cette aspiration à l'amour, à la beauté, à la présence divine dans la nature, à un mysticisme entre monothéisme chrétien et panthéisme hindou.
Ici et là, la séduction est un peu plus immédiate, Giorno per Giorno, la troisième des Tre liriche de Tagore (1929) en doux balancement, les deux premières mélodies des Nuove liriche tagoriane (1934), marquées par un languissement plus expressif, les Due canti napoletani dont on ne peut imaginer qu'elles ont pu être composées dans la terrible année 1944, ou les douloureuses mélodies Non so et Se Taci au sein de Sette liriche de 1947. Les deux premières mélodies des Tre nuovi poemi (1939) sont un autre exemple de ce temps suspendu, d'attente, dont émergent des élans dramatiques tendus.
Ces mélodies sont défendues par la soprano Alexandra Flood et les mezzo Nina Tarandek et Tanja Ariane Baumgartner. Sans doute sous la conduite de Klaus Simon qui est l'accompagnateur de l'intégrale des pièces, elles abordent les pièces de manière semblable, apportant une homogénéité au fil des œuvres, avec un attachement à la diction et une grande retenue. Si l'interprétation est en adéquation avec les œuvres, et que l'engagement et la justesse dramatique des musiciennes est indiscutable, davantage de chaleur et de velouté aurait aidé à ce que l'ensemble paraisse moins austère en écoute continue. Cette somme éditoriale courageuse de trois heures est à picorer par petits morceaux.
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Franco Alfano (1875-1928) : intégrale des Liriche. Alexandra Flood, soprano; Nina Tarandek, mezzo-soprano; Tanja Ariane Baumgartner, mezzo-soprano ; Klaus Simon, piano. 3 CD bastille musique. Enregistrés au Hans-Rosbaud-Studio à Baden-Baden entre 2019 et 2021. Textes de présentation étoffés en anglais, allemand et italien, et poèmes (traduits en allemand et anglais). Durée totale : 3:34:48
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