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Cordes sensibles au Musée de Cluny

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Paris. Musée de Cluny. 28-IX-2024. Gualtiero Dazzi (né en 1960) : Un âge de femme – Tempus Muliebre, spectacle musical pour récitante, voix de femmes, cordes pincées et percussions. Elisabeth Kaess, livret et dramaturgie ; Brigitte Lesne, récitante direction et percussion ; ensemble vocal Discantus : Cécile Banquey (codirection musicale), Christel Boiron, Maud Haering, Catherine Sergent. Trio Polycordes : Florentino Calvo, mandoline ; Sandrine Chatron, harpe et Jean-Marc Zvellenreuther, guitare

Les gigantesques murs de pierre du Musée de Cluny accueillent l'ensemble vocal féminin et sa fondatrice ainsi que le lors d'une soirée poésie-musique conçue en binôme par le compositeur et la librettiste et dramaturge .

« Tempus Muliebre s'inscrit dans la continuité d'ouvrages qui dessinent des portraits de femmes, commencés en 1988 avec mon premier opéra La Rosa de Ariadna », nous dit le compositeur italien dans sa note d'intention. , avec laquelle il collabore depuis plusieurs années, a tissé une trame poétique et sonore qu'elle décline en trente numéros incluant interludes instrumentaux et refrains. La poésie en latin et la correspondance de la poétesse et moniale du XIIᵉ siècle Hildegard von Bingen (1098-1179) y côtoie les lettres plus contemporaines (traduites en français) d'écrivaines iraniennes et afghanes qui font entendre, au prix de leur vie, « la souffrance des femmes encagées » : « Je voulais être le cri de ma propre existence mais hélas je n'étais qu'une femme », lance la poétesse iranienne Forough Farrokhzad (1935-1967) à travers la voix de la récitante . La parole n'est pas moins engagée et audacieuse dans les trois fragments de lettres (au pape Eugène, au roi des Romains Conrad et à l'archevêque de Mayence) de la sainte Hildegard rappelant tout ce beau monde à la foi, à la vigilance et à l'équité de Dieu…

Côté musique, dialoguent et s'entrelacent les pièces du répertoire médiéval (transcrites et arrangées par ) et la création d'aujourd'hui (celle de Dazzi), sans heurt ni véritable rupture d'univers. Car la temporalité des deux musiques reste la même : un temps long que viennent périodiquement strier les rythmes d'un grand tambour joué par la récitante ; commune également aux deux écritures, ce mi bémol, la « note-mère » que fait sonner l'une des dix cloches à main dont se servent les chanteuses (un diapason d'époque !) et qui permet les passages d'un monde à l'autre.

On est séduit par le timbre homogène et rayonnant des quatre voix dans le chant monodique du XIIᵉ siècle (antienne, conduit, Alleluia etc.) auquel s'ajoutent parfois un bourdon ou un bref (voix secondaire). Tout ce qui sonne aux instruments (la mandoline de , la guitare de et la harpe de ) relève de la plume du compositeur. Les instruments ponctuent les passages a cappella et soutiennent l'écriture vocale, trames légères et sans texte sur lesquelles s'inscrit le récit dans un équilibre subtilement recherché. Les poèmes sont parfois chantés par la/les voix solistes qui laissent apprécier les galbes mélodiques  élégants de l'écriture dazzienne ; une avarie technique nous prive malheureusement des surtitres. L'écriture instrumentale est plus aventureuse, qui modèle le timbre des cordes pincées dans les deux intermèdes, trop brefs à notre goût : et par trois fois se fait entendre le refrain, sorte d'estampie des temps modernes scandée par les cloches à main et battue par le tambour et les petits chocs sur la caisse des instruments : « Me voici Je suis moi Je suis femme Je suis monde […] » : superbe chant de ralliement à l'unisson, que l'on aurait aimé entendre avec plus d'engagement dans les voix, qui met en résonance, quelques 900 ans plus tard, les mots d'Hildegard von Bingen : « Cette époque est un âge de femme ».

Crédit photographique : © Ensemble

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Paris. Musée de Cluny. 28-IX-2024. Gualtiero Dazzi (né en 1960) : Un âge de femme – Tempus Muliebre, spectacle musical pour récitante, voix de femmes, cordes pincées et percussions. Elisabeth Kaess, livret et dramaturgie ; Brigitte Lesne, récitante direction et percussion ; ensemble vocal Discantus : Cécile Banquey (codirection musicale), Christel Boiron, Maud Haering, Catherine Sergent. Trio Polycordes : Florentino Calvo, mandoline ; Sandrine Chatron, harpe et Jean-Marc Zvellenreuther, guitare

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