Spectaculaires enregistrements de Bruckner et Chostakovitch par Carlos Païta
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Dmitri Chostakovitch (1906-1975) : Symphonie n°8 opus 65. Anton Bruckner (1824-1896) : Symphonie n°8 (édition Haas). Philharmonic Symphony Orchestra, Carlos Païta. 1 coffret de 2 CD Le Palais des Dégustateurs. Enregistrés en 1981 (Chostakovitch) et mai 1982 (Bruckner) au Kingsway Hall, Londres. Notice de présentation en français et en anglais. Durée : 120:11
Le Palais des DégustateursLa direction d'orchestre donne parfois naissance à des personnalités hors normes. Dans les années 1980, le chef argentin Carlos Païta avait réalisé quelques gravures des grandes pages du répertoire romantique (Berlioz, Bruckner, Mahler, Verdi notamment) marquées par un sens du spectaculaire assez ébouriffant. On est heureux de le retrouver dans deux huitièmes symphonies, celle de Bruckner déjà connue, et celle de de Chostakovitch issue d'un concert inédit.
Né en 1932 à Buenos Aires, Carlos Païta fit ses études de direction d'orchestre auprès d'Artur Rodziński et fut selon ses propres déclarations très marqué par des répétitions de Furtwängler venu diriger au théâtre Colon. Dans les années 1980, il réalisa des enregistrements très remarqués pour Decca puis son propre label Lodia, d'abord avec des orchestres londoniens constitués puis avec un ensemble réuni pour lui sous le nom de Philharmonic Symphony Orchestra. Il est mort en 2015. Ses gravures témoignent de la rencontre entre un répertoire centré sur les grandes pages du romantisme le plus flamboyant, des prises de son très spectaculaires comme Decca s'en était fait une spécialité et un style de direction à nul autre pareil.
On retrouve toutes ces caractéristiques dans la Symphonie n° 8 de Bruckner gravée en 1982. Païta, qui choisit l'édition Haas de la version définitive, accentue les contrastes à un point extrême. Les timbales exécutent de fracassantes déflagrations, les cuivres ont des entrées écrasantes, les tempos absorbent un rubato aux limites du raisonnable. Si Païta ne retouche pas le texte lui-même, il modifie tellement les équilibres entre les pupitres qu'on ressort abasourdi de cette lecture ultra théâtrale et cataclysmique. Rien en fait ne rappelle Furtwängler dans cette conception certes impressionnante et néanmoins très émouvante dans l'immense adagio mais qui ne ressemble à aucune autre dans la discographie. L'orchestre ne peut au demeurant pas rivaliser avec les grandes phalanges familières de ce répertoire (Amsterdam, Berlin et Vienne évidemment).
En complément, l'éditeur a exhumé un concert où les mêmes interprètes appliquent un traitement comparable à la Symphonie n° 8 de Chostakovitch (1943). Là encore, Païta s'écarte du reste de la discographie ; ni vision implacablement soviétique de cette sombre page de guerre, comme Mravinsky en demeure le modèle, ni lecture occidentale et décantée comme celle, inaccessible par sa perfection hautaine, de Haitink à Amsterdam (Decca). Reste cependant comme pour Bruckner un voyage sonore très impressionnant et qui laisse l'auditeur sous le choc. Les amateurs de sensations fortes orchestrales seront comblées. Saluons l'hommage à la mémoire d'un maestro singulier en espérant que Le Palais des dégustateurs saura nous rendre les autres gravures d'origine Lodia ou Decca qui firent en leur temps la réputation de Carlos Païta.
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Dmitri Chostakovitch (1906-1975) : Symphonie n°8 opus 65. Anton Bruckner (1824-1896) : Symphonie n°8 (édition Haas). Philharmonic Symphony Orchestra, Carlos Païta. 1 coffret de 2 CD Le Palais des Dégustateurs. Enregistrés en 1981 (Chostakovitch) et mai 1982 (Bruckner) au Kingsway Hall, Londres. Notice de présentation en français et en anglais. Durée : 120:11
Le Palais des Dégustateurs
Comme c’est étrange, les effets de mode! Je me rappelle qu’il y a environ 40 ans, les interprétations de Païta étaient systématiquement dézinguées par les critiques de la revue « Diapason ».
Mais on pourrait en dire autant, dans un autre domaine, des interprétations de Karl Richter à l’orgue chez les critiques de Diapason également, alors qu’il y avait des choses absolument sublimes reconnues comme telles aujourd’hui!
Comme je suis d’accord avec vous. Je suis depuis toujours, un admirateur de Carlos Païta. J’ai correspondu avec son fils Alexandre les dernières années de sa vie à Genève. Ce génial, chef d’orchestre était méprisé par toute la critiquaillerie française qui jugeait ses interprétations grand guignolesques. Et lui faisait les pires caballes et crasses. Il est vrai qu’il n’avait pas un caractère facile. Alors, lire maintenant, y compris dans les revues que vous citez les éloges et les louanges, y compris par des critiques prétentieux de bazar, style Huss. Ca fait rire, mais jaune. Car ces individus lui ont pourri une carrière qui devait être toute autre. J’ai l’intégrale de ses enregistrements et je m’en délecte.
Heureux de lire vos commentaires avec lesquels vous me voyez tout à fait d’accord.
J’ai eu la chance de rencontrer Carlos Païta à diverses reprises dans mon magasin à Genève. Nous passions des heures à écouter, à disséquer et à commenter les enregistrements d’Arturo Toscanini dont il était un admirateur inconditionnel. Il avait une passion particulière pour ses enregistrements de répétitions d’orchestre dont il ne cessait de me demander de les repasser encore et encore.
Karl Richter à l’orgue? Son maître, le grand, l’inoubliable Karl Straube de Leipzig lui avait interdit de jouer Bach à l’orgue! Vous n’y comprenez rien, lui disait-il. Il n’y a rien à ajouter. Je tiens l’histoire de première main, mon oncle qui était lui un organiste de tout premier plan et un spécialiste reconnu de Bach était présent et me l’a rapportée.