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Philip Glass (né en 1937) : Music in similar motion, Music in contrary motion, Music in fifths, Two pages. Avec : Gaël Chauvin, bombarde ténor ; Mickaël Cozien et Enora Morice, biniou ; Erwan Hamon, bombarde soprano et baryton ; Gweltaz Hervé, cornemuse ; ; Guénolé Keravec, bombarde ténor et baryton ; Vincent Marin, bombarde baryton ; Erwan Keravec, cornemuse et direction artistique  ; 1 CD Buda Musique. Notice de présentation en français et anglais, 12 pages. Durée : 59:55

 

Nombre d'enregistrements ont démontré le pouvoir caméléonesque de la musique de . Après le piano, l'orgue, le xylophone, la guitare, le saxophone, voici le biniou, la bombarde et la cornemuse !

En 1994, Nonesuch (alors Elektra Nonesuch) avait publié un album consacré aux fondements du style glassien : Two pages, Music in fifths, Music in contrary motion, Music in similar motion. « C'est là que tout a commencé », expliquait alors le critique Tim Page aux auditeurs de ces pièces radicales écrites à une époque (le mitant des années soixante) où se disait frustré d'écrire dans le milieu musical de son temps, alors sous obédience de la musique sérielle : « Pour moi, disait le compositeur américain en parlant de cette dernière, c'était la musique du passé qui essayait de faire passer pour de la musique contemporaine. Après tout Schoenberg avait l'âge de mon grand-père. » Tant au plan de la forme, du contenu mélodique, que de la simplicité harmonique, les premières compositions affranchies de n'en apparurent pas moins d'une agressivité aussi avant-gardiste que celle de la musique dont il voulait se démarquer. Qui pouvait se douter (le savait-il lui-même ?) qu'étaient dorénavant posées les fondements d'un édifice aujourd'hui mondialement décliné, reconnu, connu (plus d'une mélodie de Philip Glass se siffle dans la rue), privilège dont ne jouissent toujours pas les partitions dodécaphoniques…

C'est à ce retour aux sources, à ce qui a été qualifié de « coup de pied dans la fourmilière sérielle », qu' convie à son tour l'auditeur. Sonneur de cornemuse versé dans la musique de son temps (20 sonneurs pour Terry Riley…), il se réapproprie ces quatre plages matricielles en adoptant le déroulé inverse de l'enregistrement Nonesuch, et donc la chronologie inverse de leur composition : partant de la plus « orchestrale » des quatre (Music in similar motion), il remonte jusqu'au plus spartiate, l'unisson de Two pages, qui avait, en son temps, lancé le début des hostilités. « Personne ne me connaissait et ne se souciait vraiment de ce que je pouvais écrire, alors j'ai pu faire toutes les plaisanteries dont j'avais envie», peut s'en amuser aujourd'hui Philip Glass.

Tout sauf une plaisanterie (contrairement à ce que prétend modestement Keravec), Huit sonneurs pour Philip Glass, le disque, emmène ces partitions branchées au fest-noz. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elles n'y cassent pas l'ambiance. Bien au contraire, comme si Glass avait composé pour eux, binious en si bémol et en sol, cornemuses écossaises en do et sol, bombardes soprano, ténor et baryton, tous tiennent la dragée haute au Philip Glass Ensemble (orgue électrique, saxophones, flûte) de l'enregistrement officiel. Comme dans un célèbre film de Xavier Dolan, les sonneurs de Keravec élargissent l'écran, avec notamment un impressionnant Music in contrary motion en rampe de lancement du futur grand succès Koyaanisqatsi. A Rezé comme à New York, l'ivresse glassienne, mâtinée de quelques bourdons, rejoint celle que tout un chacun qui a déjà fréquenté les fêtes bretonnes a pu vivre. Une impression qui se voit confirmée lorsque l'on apprend que Keravec et ses comparses ont enregistré « en mouvement » leur fest-noz discographique.

Plus que de choc des cultures, Huit sonneurs pour Philip Glass clame la connivence des cultures. Une connivence que Philip Glass a déjà plus d'une fois montrée au fil de ses nombreuses collaborations universalistes avec le temps long (et donc répétitif) des musiques hypnotiques : avec Ravi Shankar (Passages), avec Foday Musa Suso (The Screens), avec le groupe Uakti (Aguas de Amazonia, Orion), avec Roberto Carillo Cocio (Concert of the Sixth Sun), la musique tibétaine (Kundun). Dans ce sillage étoilé, Huit sonneurs pour Philip Glass transforme des pages jadis réservées à des initiés en une grande fête populaire.

Lire aussi :

La cornemuse exploratrice d'Erwan Keravec

 

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