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Anniversaire Schoenberg à Salzbourg : l’art de la transcription

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Salzbourg. Mozarteum. 3-VIII-2024. Gustav Mahler (1860-1911) : Der Abschied (L’Adieu), dernier mouvement du Chant de la Terre, version pour ensemble de Rainer Riehn sur des indications d’Arnold Schönberg ; Johann Strauss II (1825-1899) : Kaiser-Walzer, version pour quatuor, flûte, clarinette et piano d’Arnold Schönberg ; Maurice Ravel (1875-1937) : La valse, version pour deux pianos. Tamara Stefanovich, Nenad Lečić, pianos ; musiciens de l’Orchestre philharmonique de Vienne ; direction : Maxime Pascal

Un concert frustrant par sa brièveté met en scène Schoenberg l'organisateur de concerts, avec Ravel en hôte de marque.

Le Festival de Salzbourg rend cette année un hommage développé à , pour le 150e anniversaire de sa naissance. La soirée du 3 août est consacrée à la « Société d'exécutions musicales privées » créée à Vienne en novembre 1918 par Schoenberg pour ranimer la vie musicale à la fin de la Première Guerre mondiale. Le premier concert de la soirée, beaucoup trop court (même pas une heure de musique inutilement rallongé d'un entracte), commence de façon peu satisfaisante par le dernier Lied du Chant de la Terre de Mahler : certes, Mahler est un des principaux héros du panthéon musical de Schoenberg et de ses disciples, mais la version pour ensemble (quatorze musiciens) dite « Schoenberg/Riehn » est l'œuvre presque exclusive du dernier nommé, le musicologue Rainer Riehn, à partir de la première moitié du premier Lied, de la distribution instrumentale prévue et de quelques indications éparses de Schoenberg pour le reste : pourquoi ne pas avoir choisi les Chants du compagnon errant, bel et bien adaptés par Schoenberg du début à la fin ? Les musiciens du Philharmonique de Vienne, notamment la flûte de Luc Mangholz, y déploient tous leurs sortilèges, et tente de donner une unité et un parcours que la version de Riehn ne possède pas vraiment, mais sans parvenir à nous convaincre de la pertinence de ce choix de programme. Qui plus est, Marianne Crebassa est remplacée pour la partie vocale par Tanja Ariane Baumgartner, avec un temps de préparation qui ne lui permet pas de maîtriser tous les paramètres de la partition.

Authentique chef-d'œuvre qu'on devrait entendre plus souvent, la version de la Valse de l'Empereur de pour quatuor, flûte, clarinette et piano est elle aussi confiée aux musiciens du Philharmonique de Vienne. Cela paraît une évidence, mais la tradition vénérable de l'orchestre a un effet émollient, dont on se rend compte annuellement lors des concerts du Nouvel An où la succession des chefs n'est qu'un ornement sur un fond trop monotone. On ne trouve rien ici, dans cette adaptation pourtant si incisive, de la verve légèrement ironique que savait y mettre, avec le Philharmonique de Vienne en grande formation, un Herbert Blomstedt que l'orchestre n'a jamais osé inviter pour le Nouvel An.

L'élément le plus intéressant du programme est donc la rare version pour deux pianos de La Valse de Ravel qui clôt le concert : non seulement Ravel est venu lui-même l'interpréter à Vienne (avec Alfredo Casella) pour la Société de Schoenberg, mais encore cette exécution du 23 octobre 1920 précède de quelques semaines la création parisienne de la version orchestrale. Plus d'un siècle plus tard, c'est et son partenaire récurrent qui nous guident dans l'exploration de cette Valse inhabituelle, qui perturbe décidément nos habitudes d'écoute, de façon bienvenue : là où la version orchestrale nous emmène sur le chemin d'une ivresse croissante aboutissant à la catastrophe finale, la version pour deux pianos donne une impression beaucoup plus immobile, menaçante dès les mouvements encore indistincts dévolus dans la version orchestrale aux contrebasses, et la suite de la pièce ne s'éclaire guère ensuite que par moments : l'abandon sensuel de la valse viennoise n'est jamais vraiment à l'ordre du jour ici.

On comprend difficilement que le programme s'arrête là, alors qu'un autre concert, 90 minutes plus tard, poursuit l'hommage à Schoenberg, mais devant un public beaucoup plus clairsemé : un billet unique et une pause plus raisonnable auraient permis à des spectateurs beaucoup plus nombreux de retrouver le duo pianistique pour une réduction de la Kammersymphonie n° 2 de Schoenberg, et surtout de découvrir avec le Quatuor Leonkoro ce que peut la musique de chambre, avec le Mouvement lent de Webern et la Suite lyrique de Berg, ce qu'elle peut et que les musiciens viennois de ce premier concert ne parviennent pas vraiment à en tirer.

Crédits photographiques : © SF/Marco Borrelli

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