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Rythme et lyrisme au Festival Messiaen au pays de la Meije

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Département des Hautes-Alpes.
Salle des fêtes de la Grave. 23-VII-2024, 21h. « Rythm Labyrinth ». Manjunath B. C. (né en 1976) : Nava Naveena, Solo, Laya Chiitara ; Jean-Pierre Drouet (né en 1935) : Carrefour délicat (2021) ; François-Bernard Mâche (né en 1935) : Kemit (1970) ; Thierry de Mey (né en 1956) : Rythmical Labyrinth (2016) ; Franck Zappa (1940-1993) : The Black Page (1976). Florent Jodelet, Manjunath B. C., percussions.

Église de la Grave. 24-VII-2024, 21h. « Mythes et Histoires ». André Jolivet (1905-1974) : Épithalame (1953), Cinq Danses rituelles (1940) ; Philippe Schoeller (né en 1957) : Hercule, l’hydre de Lerne (2024). Musicatreize ; Roalnd Hayrabedian, direction. Marie-Josèphe Jude, piano.

Rendez-vous pour deux soirées consécutives à la 26e édition du Festival Messiaen au pays de la Meije. Deux concerts, deux ambiances très différentes : la première 100 % percussive avec et Manjunath B. C. dans un croisement des traditions occidentale et carnatique ; la seconde, autour d' et de par et .

Mardi 23 juillet. Le spectacle aurait pu s'intituler « Crazy Rythm », car le rythme, présenté en introduction par , le directeur du festival, comme ce qui constitue la base de toute musique, y occupe toute la place et toujours dans des configurations virtuoses. Ici, c'est tout le corps qui parle, dans la confidence d'une frappe légère à quatre mains ou bien par l'intermédiaire des instruments, le plus souvent dans une amplification progressive de l'intensité et de la complexité. Ici, même la voix est percussive, employée selon la technique konnakol de la tradition carnatique de l'Inde du Sud. Assiste-t-on à une compétition de rivaux cherchant à éblouir, à une tentative d'hybridation ou à la bonne intelligence de deux héritiers fort éloignés se côtoyant ? Question rhétorique bien sûr, puisque chacun occupe sa place tout en apportant à l'autre. Avant même qu'ils aient commencé à jouer, on comprend que Manjunath B. C. et sont autant des amis que des musiciens complices, ce qu'ils montrent tout au long d'un spectacle d'où la jubilation et l'humour ne sont jamais absents. Sur les sept morceaux interprétés, trois sont du joueur de mridang, assis en tailleur et pieds nus. Interprétés en solo ou en duo, Nava Naveena, Solo et Laya Chiithara enchantent nos oreilles incrédules par la maîtrise totale et la liberté d'improvisation dont font montre les exécutants. Quant à , il multiplie les timbres, passant du vibraphone dans Nava Naveena au cajón dans le spectaculaire Kemit (1970, écrit à l'origine pour darbouka) de (né en 1935), aux timbales frappées ou frottées à même les mains (avec Manjunath B. C.) dans le très beau Rythmical Labyrinth (2016) de (né en 1956) ou encore au steelpan, aux gongs et aux cloches tubulaires dans The Black Page (1976), pièce très inventive et jubilatoire de (1940-1993). L'électroacoustique élargit et dramatise toute cette sorcellerie mathématique.

Mercredi 24 juillet, église de la Grave. Le charismatique Roland Hayrabedian introduit ce concert « Mythes et Histoires » en présentant , qu'il a créé en 1987, non comme un chœur fondu, mais un bouquet de 12 voix solistes, ce qui s'entendra au gré des pièces programmées, à commencer par Épithalame (1953) d' (1905-1974), œuvre centrale dans le répertoire de l'ensemble. Dans ce poème lyrique (épithalame), le compositeur célèbre en même temps l'amour entre un homme et une femme (le début n'est d'ailleurs pas sans rappeler Les Noces de Stravinsky) ainsi que le rythme. Afin de libérer ce dernier, le musicien et auteur du livret, s'inspirant de « textes sacrés d'origine égyptienne, hindoue, chinoise, hébraïque et grecque » n'a pas hésité à inventer des « sonorités d'un effet avant tout dynamique » pour pallier « le manque d'accentuation musicale de la langue française ». Le chant est tout à tour collectif et soliste : un morceau très vivant et coloré. Du même Jolivet sont les Cinq Danses rituelles (1940), interprétées ce soir par . Dans ces Danses successivement « initiatique », « du héros », « nuptiale », « du rapt » et « funéraire », se rencontre le lecteur d'Émile Durkheim curieux des systèmes totémiques à la base des religions, et un ancien élève d'Edgar Varèse convaincu qu'il faut intégrer les données de l'acoustique si l'on veut réunir un auditoire dans une écoute collective. Ce sont donc autant de passages cruciaux dans l'évolution d'un individu à l'intérieur d'une communauté ancestrale, qui sont pulsés toujours en avant et reliées par un ostinato. La pianiste impressionne par son impavidité et la clarté de son jeu, seules garantes de la lisibilité de cette musique « primitive » étrangère à tout épanchement romantique. Invité sur scène par Roland Hayrabedian, (né en 1957) cherche à initier le public à son art en général et à Hercule, l'hydre de Lerne (2024) en particulier. Lui qui place la lumière et le silence au centre de la musique, il retient ici l'actualité d'un mythe qui place la violence et la pulsion de mort au cœur de nos vies. Un mythe nous parle de notre présent, lequel ne fait que reproduire sous d'autres formes des universaux tel, comme ici, que le combat, contre les autres ou soi-même. D'où la présence du piano, symbole pour le compositeur de puissance, d'énergie indomptable, parmi les 12 voix d'un ensemble narrant les différentes péripéties du combat d'Hercule contre l'hydre. Le texte est tour à tour en latin, en langue inventée et chuchoté. Malheureusement, la faiblesse des paroles françaises nuit beaucoup à la théâtralité de cette musique expressive, par ailleurs bien rendue par des chanteurs, une pianiste et un chef très investis.

Crédits photographiques : © Bruno Moussier

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Salle des fêtes de la Grave. 23-VII-2024, 21h. « Rythm Labyrinth ». Manjunath B. C. (né en 1976) : Nava Naveena, Solo, Laya Chiitara ; Jean-Pierre Drouet (né en 1935) : Carrefour délicat (2021) ; François-Bernard Mâche (né en 1935) : Kemit (1970) ; Thierry de Mey (né en 1956) : Rythmical Labyrinth (2016) ; Franck Zappa (1940-1993) : The Black Page (1976). Florent Jodelet, Manjunath B. C., percussions.

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1 commentaire sur “Rythme et lyrisme au Festival Messiaen au pays de la Meije”

  • Christine JOLIVET ERLIH dit :

    De très grands mercis à Res Musica pour cette publication qui relate ces magnifiques moments partagés à La Grave

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