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Le piano très romantique de Nikolaï Luganski à la Roque d’Anthéron

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La Roque d’Anthéron, Parc du château de Florans. 28-VII-2024. Félix Mendelssohn (1809-1847) : six Romances sans paroles, extraites des opus 19, 38, 67 et 85 ; Frédéric Chopin (1810-1849) : Ballades n° 3 et 4, Nocturne n° 2 ; Nikolaï Lugansky (né en 1972) d’après Wagner : Quatre scènes de Götterdämmerung ; Franz Liszt (1811-1886) d’après Wagner : Mort d’Isolde. Nikolaï Lugansky, piano

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Dans un programme entièrement XIXe siècle, le pianiste russe joue d'oppositions et de continuités, entre Mendelssohn et Chopin d'une part, puis entre Liszt… et Luganski !

s'est fait une réputation mondiale comme interprète privilégié de Rachmaninov, mais ce soir, ce sont des compositeurs romantiques plus anciens qu'il honore dans le parc du Château de Florans. La soirée commence plutôt sagement avec quelques Romances sans paroles de Mendelssohn, subtiles, joyeuses, et même dansantes (la mal nommée « Berceuse » ou opus 67 n° 6). On sent que le pianiste se retient, et qu'il s'applique à donner des couleurs un peu mystérieuses, voire impressionnistes, qui vont au-delà du charme immédiat de ces Lieder ohne Worte. Cela fonctionne très bien, il n'y a rien à redire, mais le reproche d'écriture « gourmée » qu'on peut faire à ces pièces demeure. La comparaison avec Chopin, qui est presque l'exact contemporain de Mendelssohn, est intéressante. La Ballade n° 3 présente d'abord une rêverie nostalgique très proche de Mendelssohn, puis développe un dialogue presque violent entre les deux mains avant le déclenchement d'un orage d'envolées lyriques, où Luganski démontre sa virtuosité remarquable. Là, aucun doute, Chopin est vraiment unique, et Luganski le sert à merveille. Le Nocturne n° 2, d'abord diaphane et perlé puis tempétueux est tout aussi réussi, tout comme la Ballade n° 4.

L'originalité de la soirée consistait à donner en deuxième partie des adaptations de Wagner, l'une écrite par lui-même (un CD fort bien accueilli par la critique), et l'autre par . La comparaison est inévitable, et Luganski s'en sort avec les honneurs. L'enjeu dans cet exercice de « réminiscences » est de ne faire ni de la réduction d'orchestre pour piano, ni un pot-pourri, ni des variations, tout en restant fidèle à l'original dans une sorte de mini-poème symphonique, mais pour piano. C'est ce qu'a fait Luganski, avec peut-être un peu moins de liberté que Liszt, qui paraphrase, qui brode un peu plus, bref, qui « écrit » davantage. Dans ses Quatre scènes de Götterdämmerung, Luganski nous entraîne dans une fresque sonore splendide avec une large palette de couleurs et de nuances. Transcrire ce final au piano est une tout autre difficulté que la mort d'Isolde : les personnages sont nombreux, le maelström élémental est intense et la portée universaliste est si forte, qu'il a fallu une vraie finesse d'écriture pour les préserver, et surtout, un brio exceptionnel pour le jouer. Mais tout est bien là : les incendies, la crue du Rhin, le cri de Hagen, la joie des Rheintöchter, le chaos, la rédemption par l'amour, et… le grand frisson épique. Le public accueille avec enthousiasme cette « transcription ». Après cette épopée en Technicolor sonore, la Mort d'Isolde de Wagner/Liszt apparait presque comme un Lied ohne Worte, et Luganski y met toute la lumière et toute la poésie qu'il est possible de donner avec un piano à cet instant magique.

Évidemment, le public fait un grand succès à l'artiste. Celui-ci offre encore trois bis, dont deux Rachmaninov particulièrement vitaminés qui achèvent de ravir les auditeurs.

Crédits photographiques : © Pierre Morales

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La Roque d’Anthéron, Parc du château de Florans. 28-VII-2024. Félix Mendelssohn (1809-1847) : six Romances sans paroles, extraites des opus 19, 38, 67 et 85 ; Frédéric Chopin (1810-1849) : Ballades n° 3 et 4, Nocturne n° 2 ; Nikolaï Lugansky (né en 1972) d’après Wagner : Quatre scènes de Götterdämmerung ; Franz Liszt (1811-1886) d’après Wagner : Mort d’Isolde. Nikolaï Lugansky, piano

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