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Gardiner revient au Festival RF ; Cafiero dirige le Stabat Mater de Rossini

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Montpellier. Le Corum ; Opéra Berlioz. 16-VII-2024. Carl Maria von Weber (1786-1826) : Oberon, Ouverture. Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Concerto pour piano n° 1 en ut majeur op. 15. Piotr Ilitch Tchaïkovski (1840-1893) : Symphonie n° 2 en ut mineur op.17 « Petite Russie ». Piotr Anderszewski, piano. Orchestre Philharmonique de Radio France, direction : John Eliot Gardiner.

17-VII-2024. Gioachino Rossini (1792–1868) : Stabat mater. Avec : Pretty Yende, soprano ; Gaëlle Arquez, mezzo-soprano ; Magnus Dietrich, ténor ; Michele Pertusi, basse. Chœur de l’Opéra National Montpellier (cheffe de chœur : Noëlle Gény). Chœur de l’Opéra National du Capitole de Toulouse (chefs de chœur : Gabriel Bourgoin et Anne Pagès-Boisset). Orchestre National Montpellier Occitanie, direction musicale : Clelia Cafiero

Un an après avoir fait polémique, retrouve la scène du Corum de Montpellier pour une Symphonie n°2 de Tchaïkovski étonnante, tandis que le lendemain, la jeune cheffe met en lumière les forces montpelliéraines dans le Stabat Mater de Rossini.

Une claque donnée à un chanteur à l'entracte des Troyens au Festival de la Côte Saint-André avait écarté pour quelques temps Sir , de retour un an plus tard sur la scène française à l'invitation du Festival de Radio France Montpellier, pour un concert en compagnie du pianiste .

Si l'on met de côté le caractère de l'homme, il faut inévitablement reconnaître que Gardiner est actuellement l'un des plus grands chefs vivants, et si son Ouverture d'Oberon en début de programme cette année ne peut atteindre la magie de la Symphonie Fantastique l'an passé, elle permet de mêler le style de Weber à celui de Berlioz et rappelle que c'est grâce au chef anglais que nous avions redécouvert la version berliozienne du Freischütz en 2011 à l'Opéra Comique. Également amateur de Weber, dont il a laissé au disque l'une des meilleures versions récentes d'Oberon (avec Jonas Kaufmann), Gardiner sollicite le Philharmonique de Radio France pour faire briller des cuivres exemplaires et insuffler une belle dynamique aux cordes, dont il met particulièrement bien en avant les parties de seconds violons.

En formation plus réduite, l'ensemble interprète ensuite le Concerto pour piano n° 1 de Beethoven avec . Résolument d'une approche « ancienne » et chambriste, sans doute tant du goût du chef que du pianiste, qui l'a enregistré en dirigeant du piano avec la Deutsche Kammerphilharmonie Bremen, l'ouvrage peine ici toutefois à décoller. Presque caricatural dans la manière d'utiliser la pédale avec parcimonie, soit seulement pour accentuer les fins de phrases, soit dans les parties plus vives pour accentuer rigoureusement et souvent trop peu juste les fins de mesures, Anderszewski étonne en plus dans la cadence du I, qu'on croit presque une variation sur celle de Beethoven, tant elle manque de structure. Plus adapté, bien que les timbales anciennes déparent avec le reste de l'orchestre sur diapason moderne, le mouvement lent s'intègre à cette vision sans romantisme, avant un Rondo final en manque permanent de ferveur, très loin de l'explosivité joueuse d'une Marta Argerich par exemple. La Sarabande de la Partita n°1 de Bach en bis permet heureusement de retrouver ce qui fait la maestria du pianiste.

En seconde partie, la Symphonie n° 2 (« Petite Russie ») de Tchaïkovski surprend dans un programme de Gardiner, mais cet hommage à l'Ukraine trouve par sa vigueur et son écriture encore parfois presque naïve un lien musical avec le reste de la soirée. Volontairement tirée vers un jeu là encore plutôt à l'ancienne, en cela qu'il refuse tout pathos et limite les respirations pour toujours exalter le flux musical, l'interprétation de Gardiner convainc d'autant plus qu'il dirige le « Philhar » d'une main de maître, somptueux en tutti comme dans toutes les individualités, à commencer par le sublime cor solo, la première clarinette ou même le piccolo, jamais dépareillé dans le Finale.

Le lendemain, l'ensemble en présence possède à peu près le même effectif que celui de la veille pour la symphonie et il est encore étonnamment agencé avec les contrebasses tout à droite, dans une nomenclature pourtant assez rare aujourd'hui. Cependant, il ne s'agît plus du Philharmonique, mais de l', dirigé par la jeune cheffe (récemment en fosse dans Tosca à Rennes). Le Stabat Mater de Rossini constitue l'unique pièce du programme, ainsi les Chœurs de l'Opéra National de Montpellier associés à ceux du Capitole entrent directement en scène après l'orchestre, rejoints par le quatuor vocal et la cheffe.

L'introduction orchestrale nous rappelle le jeu de Cafiero entendu dans Puccini, d'un son plein mais un peu trop droit, pour une direction cependant très appliquée par la suite vers les chœurs. L'entrée des chanteurs met en évidence le début parfaitement exact de Michele Pertusi, lancé à peine un demi temps avant les trois autres, et rappelle qu'il est un grand connaisseur de cette partition, dont on garde de lui l'enregistrement avec Riccardo Chailly il y a plus de vingt ans. La voix a depuis perdu un peu de sa matière dans le Pro peccatis, mais l'Eia, mater avec le chœur est toujours exemplaire dans la façon de porter le texte. Bien démarqué par sa couleur dans l'introduction, le ténor fait état d'un magnifique médium, plus limité dans le timbre par les tensions de l'aigu au Cujus animam.

apporte au contraire toute sa clarté à ce registre, mais comme beaucoup de sopranos avant elle, elle a tendance à se montrer parfois trop lyrique, bien que cela ne soit pas antinomique avec cette œuvre religieuse de Rossini. cependant la surpasse dans le duo du Quis est homo et livre un Fac, ut portem touchant, seulement quelque peu altéré par un grave moins charnu. Énergique, l'orchestre montpelliérain s'adapte à l'atmosphère de chaque pièce sous la direction de , tandis que le chœur met superbement en valeur ses parties, les ténors magnifiant particulièrement l'introduction et la conclusion. Dommage qu'en bis, la cheffe propose de reprendre le Sancta mater, car si cette pièce est bien adaptée par son style généreux, elle ne remet en avant que l'orchestre et les solistes, sans redonner de place au chœur.

Crédits photographiques : © Marc Ginot

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17-VII-2024. Gioachino Rossini (1792–1868) : Stabat mater. Avec : Pretty Yende, soprano ; Gaëlle Arquez, mezzo-soprano ; Magnus Dietrich, ténor ; Michele Pertusi, basse. Chœur de l’Opéra National Montpellier (cheffe de chœur : Noëlle Gény). Chœur de l’Opéra National du Capitole de Toulouse (chefs de chœur : Gabriel Bourgoin et Anne Pagès-Boisset). Orchestre National Montpellier Occitanie, direction musicale : Clelia Cafiero

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