Un solo de Sarah Crépin pour La Bazooka à Avignon

Dans le cadre du Festival off, de nombreux spectacles de danse sont accueillis aux quatre coins d'Avignon. A La Scierie, la compagnie La Bazooka présente son spectacle Attendez-moi !, un seul en scène autour des souvenirs d'enfance.

Si la représentation se veut intimiste, le texte décevant, couplé à un manque de rythme criant, font rater le cœur du sujet. En fait de réflexion partagée sur l'enfance, le processus de remémoration se matérialise sur scène par une mise à nue un peu grossière, dont les regards appuyés en direction des spectateurs trahissent davantage un manque de direction dramaturgique qu'une émotion contenue. L'assistance, au sens propre, devient le témoin de monologues hasardeux ponctués d'épisodes de danse affectés.

Si les élucubrations du texte et de ses stratégies interprétatives manquent à plusieurs reprises de perdre définitivement les spectateurs – les auteurs ont visiblement renoncé à un déroulement chronologique, et l'actrice prend et perd un accent du sud à trois ou quatre reprises en 45 minutes de spectacle, – le tour de force d'Attendez-moi ! tient peut-être à la récupération de l'attention du public autour de séquences d'émotion caricaturales. Difficile en effet de rater l'injonction sentimentale lancée par l'air de musique classique sur lequel la danseuse tend soigneusement les mains vers le ciel.

Le procédé a cependant le mérite de détourner un instant l'attention d'un texte souvent maladroit. Dès le début du spectacle, à cause du costume de singe porté par la protagoniste, l'évocation de l'enfance et le ressassement de ses souvenirs sont associés à un état bestial. Les mouvements presque érotiques qui composent la « danse pour les animaux » , au début de la représentation, les spéculations quant aux schémas mentaux de Zouzou, la petite chienne qui l'accompagnait enfant, et la répétition de la phrase : « Et moi je suis une princesse biche » parachèvent la comparaison. L'idée est assez attendue, et ajoutée aux digressions concernant la famille du personnage central, elle associe une fois de plus la scène à un espace de rêve, voire de délire, sans jamais interroger cette perspective ni en proposer un quelconque renouvellement. Les scènes de danse contemporaine, parfois pourtant prometteuses, peinent à trouver leur place dans cet imbroglio, et, au vu de la proposition, à la question lancée par la brochure : « Est ce que revivre ses souvenirs d'enfance peut créer une danse ? » , il est tentant de répondre non.

La petitesse de la salle et la présence d'une seule comédienne sur scène ne parviennent donc pas à combler la distance creusée par certains lieux communs et une disposition scénique peu innovante. À défaut de parvenir à toucher le public par le spectacle en lui-même, la compagnie peut heureusement compter sur la bienveillance de l'assistance et la fidélité du public d'Avignon pour applaudir chaleureusement, à l'issue de la représentation, et se laisser peut-être tenter par le reste de la programmation. La Scierie, aux portes des enceintes d'Avignon, reste un lieu de théâtre remarquable, auquel Attendez-moi ! rend difficilement justice.

Crédit photographique : © Alban Van Wassenhove

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