« 20° dans le noir » au Pavillon de la Sirène

Musiciennes de « 20° dans le noir », un collectif tourné vers la musique d'aujourd'hui, Shao-Wei Chou (flûte), Lola Malique (violoncelle) et Fanny Vicens (accordéon) sont en résidence au Pavillon de la Sirène, à Paris, où elles donnent le premier concert d'un cycle intitulé « Des pieds et des mains ».

Ouvert aujourd'hui à des résidences d'artistes, le Pavillon de la Sirène, dans le 14e arrondissement, entièrement rénové se donne comme mission d'accueillir des ensembles musicaux amateurs et professionnels, toutes esthétiques confondues. C'est dans un auditorium encore en travaux (il ne sera officiellement inauguré qu'en septembre prochain) que le public est convié pour cette rencontre avec les trois interprètes qui ont mis à leur programme six pièces dont certaines sont en création.

De Bernard Cavanna, Pour Geneviève et Henri (GH) donné à l'accordéon et au violoncelle est un hommage au couple Dutilleux/Joy, un acte d'amour du compositeur envers ses illustres aînés. En trio cette fois, Pezzo fantasioso du compositeur Isang Yun regarde vers Bach et l'art de la polyphonie qu'exercent les lignes instrumentales en synergie. La voix de Colin Roche entendue à travers les haut-parleurs est déjà musique, émise à bas voltage et dans l'effleurement des mots. Dans La maison paysanne (création de la version flûte et violoncelle), Colin Roche raconte, campe le décor et anticipe le paysage sonore : sons épars ou répétitifs, respiration, glissades, tapping… avec pieds et mains.

Shao-Wei Chou est à jardin, circulant pieds nus sur les quatre tatamis et demi préparés (comme on le dirait d'un piano) par la compositrice, metteure en scène et interprète luxembourgeoise Catherine Kontz qui vient sur la scène pour nous présenter son installation.

Notes et mots, images, couleurs et accessoires constituent la « partition » au sol que l'interprète va restituer selon son ressenti, célébrant avec ses flûtes (du piccolo à la basse) cette cérémonie étrange à laquelle participe une bande-son.

Keiko Harada est connue en Europe pour ses partitions pour accordéon. Third Ear deaf IIb' pour flûte basse et accordéon est une page superbe qui se nourrit de contrastes et fait interagir les deux sources sonores avec beaucoup de finesse et de savoir-faire. Le concert se termine en beauté avec Quelques danses du massif central de Jérôme Combier, un compositeur qui aime conjuguer poésie et nostalgie. L'art réside ici dans la transcription délicate de mélodies traditionnelles qu'il fait passer d'un instrument à l'autre et d'une tessiture à l'autre, donnant une saveur particulière à ce ballet instrumental où l'on tape des mains autant que des pieds. Debout devant les éléments de décor du scénographe Olivier Defrocourt, les trois interprètes se prêtent au jeu avec un plaisir non dissimulé. La dernière danse est ressassée et le son filtré jusqu'à son dernier souffle…

Rendez-vous est pris, même lieu et même heure, pour les deux autres concerts du cycle, en octobre et décembre prochains.

Crédit photographique : © Le Pavillon de la sirène