Yannick Nézet-Séguin poursuit un cycle Sibelius peu convaincant

Après avoir signé avec son orchestre de Montréal une intégrale des symphonies de Bruckner assez réussie malgré les limites de la phalange canadienne, le chef s'attaque aux symphonies de Sibelius.

Par un curieux paradoxe de l'éditeur, le premier volume de l'intégrale des symphonies de Sibelius entreprise par Yannick Nézet-Séguin ne comprenait que la Symphonie n° 1 tandis que le troisième que voici regroupe en un minutage exceptionnellement généreux les deux symphonies les plus majestueuses du cycle.

La Symphonie n° 2 relève d'un post-romantisme orageux où l'ombre de Tchaïkovski plane, en particulier dans l'élan grandiose du finale tout en annonçant le Sibelius futur dans son premier mouvement. La version de Nézet-Séguin peine à se faire une place dans une discographie considérable, tant en raison des limites désormais reconnues de l'orchestre de Montréal, à la dynamique étroite et aux timbres souvent ingrats que par une direction à l'emporte-pièce. Le chef compense les insuffisances de son ensemble par des ruptures de ton qui mettent en péril la structure de l'ouvrage. Ainsi le retour du scherzo après le si lyrique trio s'avère-t-il d'une brutalité exagérée qui nuit à l'enchaînement des mouvements avec le vaste finale qui suit. Nous sommes loin des réussites historiques de Karajan ou Kamu à Berlin, Bernstein à Vienne, tout récemment Mäkkelä à Oslo.

La puissante Symphonie n° 5, avec la constructions génialement élaborée du premier mouvement qui superpose allegro et scherzo dans une structure complexe mais toujours lisible, la nostalgie de l'andante à variations  jumeau de celui de la Troisième et l'extraordinaire finale aux dimensions grandioses ne trouvent pas non plus leur immensité dans cette lecture plutôt étriquée malgré un équilibre plus satisfaisant que la symphonie précédente. Là encore, les lectures géniales de Karajan, Bernstein, Berglund, Maazel ou Salonen restent inégalées.

Cet avant-dernier volume ne convainc pas davantage que les précédents. Sans doute aurait-il mieux valu pour le chef enregistrer cette musique exigeante avec son orchestre de Philadelphie, plus aguerri que l'orchestre québécois. Un cycle intéressant donc, mais globalement inabouti ; on espère que Nézet-Séguin y reviendra avec plus de maturité et un orchestre supérieur.

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