Les Saisons de Jordi Savall passent à la Philharmonie
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Paris. Philharmonie de Paris, Grande Salle Pierre Boulez. 27-V-2024. Joseph Haydn (1732-1809) : Die Jahreszeiten, oratorio en quatre parties, Hob. XXI.3. Avec : Lina Johnson, soprano (Hanne) ; Tilman Lichdi, ténor (Lukas) ; Matthias Winckhler, baryton (Simon). La Capella Nacional de Catalunya. Le Concert des Nations, direction musicale : Jordi Savall
Avec Le Concert des Nations et La Capella Nacional de Catalunya, Jordi Savall distille à la Philharmonie de Paris des Saisons de Haydn pleines de saveurs, dans lesquelles plus encore que du trio de solistes ressortent les arômes du chœur.
Trois ans après avoir enregistré Die Schöpfung (La Création), en partie à la Cité de la Musique, et quinze ans après s'être re-intéressé à Die Sieben letzen Worte unseres Erlösers am Kreuze (Les sept Paroles du Christ en Croix), Jordi Savall revient cette année à Paris avec l'autre grand oratorio de Haydn, Die Jahreszeiten (Les Saisons). Bien que non religieux à l'origine, l'ouvrage n'en reste pas moins dans la continuité du précédent créé en 1798 et maintient de nombreuses similitudes avec les grandes passions de Bach, à commencer par son groupe de trois solistes, parmi lesquels le ténor Lukas se présente souvent à la manière d'un Évangéliste.
Créé en 1801 dans le palais Schwarzenberg du prince Esterházy, l'oratorio a été repris la même année au Hofburgtheater de Vienne avec un ensemble d'environ deux cents musiciens et choristes, duquel Savall choisit aujourd'hui de garder un effectif de vents presque équivalent. Il triple donc les trompettes et les trombones et quadruple les cors, alors qu'il ne laisse aux groupes de cordes que de six premiers violons à deux contrebasses. Avec cette petite quarantaine de musiciens, le Concert des Nations ne perd cependant jamais en cohésion, sauf pour le pianoforte, quasi inaudible pendant toute la soirée. De cet ensemble qui met une petite minute à trouver un équilibre entre vents et cordes lors d'une Introduction pourtant déjà intéressante par son dramatisme, il faut louer d'abord la première clarinette et les violons. Souvent debout ou spatialisés, les cuivres assurent aussi leurs grands moments d'allégresse, notamment quand les cors placés par deux de chaque côté peuvent s'exalter avec une sonorité plus proche du cor de chasse que du cor viennois, magnifiquement adaptée à la situation.
Savall procure à l'œuvre une belle dynamique, en plus de passionner dans tous les numéros où apparait la fantastique Capella Nacional de Catalunya, émanation rajeunie de la plus que trentenaire Capella Reial, créée en 2021. Au contraire même de ce que l'on pourrait penser, l'énergie emporte plus vers l'avenir qu'elle ne ramène vers le passé, pour faire déjà sentir à plusieurs passages les partitions plus tardives de Weber, la brillance et la ferveur des numéros avec chœur s'approchant des grandes pages opératiques du compositeur romantique. Par groupes de cinq pour les barytons-basses, mezzo-soprano et ténors, et six pour les sopranos, les choristes font de chacune de leurs interventions les plus beaux moments de l'interprétation, l'Orage (n°17) étant sans doute le plus exceptionnel.
Du trio de solistes se retrouvent le ténor et le baryton de La Création de 2021, tous deux aussi habitués aux Passions de Bach. Et si le plus haut registre de Tilman Lichdi n'est pas des plus brillants, tout le reste sert une prestation de grande tenue, ce chanteur au timbre nasal étant idéal pour le rôle de Lukas, qu'il vit en plus scéniquement par ses sourires et son allant. Magnifique par ses graves bien posés et son médium plein, le baryton-basse Matthias Winckhler se présente en revanche plus contraint physiquement pour Simon, auquel il n'offre presque aucune liberté de mouvement, tout particulièrement dans son premier récitatif (n°3), pour lequel il semble encore très anxieux. D'un timbre clair à son entrée, la soprano Lina Johnson manque de souplesse dans les vocalises d'Hanne et déploie un texte moins compréhensible que celui de ses deux compagnons, sans pour autant jamais déséquilibrer l'ensemble. Renouvelées il y a plusieurs décennies par Harnoncourt, Les Saisons continuent aujourd'hui de se déployer grâce à Jordi Savall, dont on attend maintenant l'enregistrement.
Crédits photographiques : © ResMusica
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Paris. Philharmonie de Paris, Grande Salle Pierre Boulez. 27-V-2024. Joseph Haydn (1732-1809) : Die Jahreszeiten, oratorio en quatre parties, Hob. XXI.3. Avec : Lina Johnson, soprano (Hanne) ; Tilman Lichdi, ténor (Lukas) ; Matthias Winckhler, baryton (Simon). La Capella Nacional de Catalunya. Le Concert des Nations, direction musicale : Jordi Savall