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Avec Orliński, l’Orfeo de Gluck dans la version viennoise de 1762

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Christoph Willibald Gluck (1714-1787) : Orfeo ed Euridice, « azione teatrale per musica » en trois actes. Livret de Raniero de’ Calzabigi. Version de Vienne, 1762. Avec : Jakub Józef Orliński, contreténor (Orfeo) ; Elsa Dreisig, soprano (Euridice) ; Fatma Said, soprano (Amore). Il Giardino d’Amore, direction : Stefan Plewniak. 1 CD Erato. Enregistré du 23 au 29 janvier 2023 au studio S2 de la Radio polonaise de Varsovie. Notice de présentation en anglais, français et allemand. Durée : 84:44

 

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Trio de choc et lecture survitaminée de la part de et de son ensemble Il Giardino d'Amore. Une version qui, en dépit d'une redoutable concurrence, n'aura aucun mal à se hisser au sommet d'une pléthorique discographie.

Était-il besoin d'une nouvelle version du chef d'œuvre de Gluck ? Avec les nombreuses versions pour contreténor, mezzosoprano, contralto, ténor ou baryton, avec la version originale viennoise de 1762, la version de Parme de 1769, celles de Naples et celle de Paris toutes deux de 1774 et enfin la version révisée par Berlioz pour Pauline Viardot en 1859, disponible en français ou en italien, l'auditeur avait déjà l'embarras du choix. Et l'on ne comptera pas les versions hybrides ou incomplètes, combinant des traits empruntés à l'une ou l'autre des propositions disponibles. La nouvelle version due à l'un des contre-ténors les plus en vue du moment, , a en tout cas le mérite de la clarté. Il s'agit sans conteste de celle de 1762, composée pour le castrat Gaetano Guadagni, chanteur connu davantage pour son expressivité que pour ses capacités techniques, relativement limitées par rapport aux critères selon lesquels on jugeait les chanteurs contemporains. On n'y entendra donc pas, et pour cause, certains des morceaux ajoutés ultérieurement comme l'air de bravoure du premier acte ou la scène de l'ombre heureuse au début du troisième. Les scènes de ballet, en revanche, sont données dans leur entièreté, pour le plus grand bonheur de tous.

L'extrême rapidité des tempi permet de caser tout l'opéra sur un seul CD, ce qui est également un atout appréciable. Corollaires de ces tempi qui pourraient presque paraître précipités pour les amateurs des versions hiératiques plus anciennes, la fougue et l'énergie de la direction confèrent à cette azione teatrale un dramatisme qui lui est souvent nié à la scène. Menés par la baguette intense de , les trente-quatre musiciens (dont quatorze vents) de l'ensemble polonais Il Giardino d'Amore semblent constituer l'effectif idéal pour cet opéra réformé, où le rôle de l'orchestre et du chœur est à ce point essentiel. Le chœur parvient lui aussi à trouver l'équilibre qui convient. Le trio de solistes qui mènent l'action est également extrêmement convaincant. Peut-être pourra-t-on trouver le soprano de excessivement charnu et pulpeux pour un personnage comme Amore, mais qui se plaindrait que la mariée est si belle ! , quant à elle, compose une Euridice éminemment théâtrale, tendre et lyrique dans ses premiers instants, vindicative dès lors qu'elle s'étonne de l'indifférence de son époux, tragique et bouleversante lorsqu'elle se convainc du désamour de ce dernier. Dommage que quelques ornementations incongrues viennent un peu gâcher son « Che fiero momento ». Dans un rôle qu'il a interprété plusieurs fois à la scène, à Paris, en tournée et également à San Francisco, maîtrise aujourd'hui tous les aspects du personnage d'Orfeo. Vocalement très en forme pour un rôle qui ne requiert aucune virtuosité pyrotechnique – en tout cas dans cette version –, il déploie tout son art vocal pour l'utilisation de la messa di voce et la coloration de son instrument. Contrastant avec les choix de tempi qui marquent cette version, la lenteur de son « Che farò » contribue à l'émotion qui, de la première page à la dernière, se dégage de cette interprétation. En somme, une version qui, autant pour son authenticité que pour la qualité de sa lecture, se hisse au sommet d'une abondante discographie, et sur laquelle il faudra désormais compter.

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Christoph Willibald Gluck (1714-1787) : Orfeo ed Euridice, « azione teatrale per musica » en trois actes. Livret de Raniero de’ Calzabigi. Version de Vienne, 1762. Avec : Jakub Józef Orliński, contreténor (Orfeo) ; Elsa Dreisig, soprano (Euridice) ; Fatma Said, soprano (Amore). Il Giardino d’Amore, direction : Stefan Plewniak. 1 CD Erato. Enregistré du 23 au 29 janvier 2023 au studio S2 de la Radio polonaise de Varsovie. Notice de présentation en anglais, français et allemand. Durée : 84:44

 
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