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Festival d’Anères, cinéma muet d’hier et d’aujourd’hui

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Anères. Salle des fêtes. 18-V-2024. 21h30 : Madame l’ambassadeur de Fritz Wendhausen. Film de 1928, 1h38. Avec : Ginté Preisaité, piano, objets, machines ; Adrian Bartas Andresen, trompettes, objets : Antoine Ferris, basse électrique, machines, Rémy Gouffault, percussions, machines.
0h00 : Requiem pour un piano abandonné d’Alexis Thépot. Film de 2024, 0h50. Avec : Melissa Weikart, piano, voix ; Laure Fischer, saxophone baryton ; Alexis Thépot, violoncelle.

Le cinéma muet est, au Festival d’Anères, la genèse de toute création musicale, les musiciens invités improvisant tout au long du festival, ou préparant depuis des mois un ciné-concert qui se veut toujours singulier. La 24ème édition du « cinéma muet et du piano parlant » ne fait pas exception à la règle dans ce petit village (184 habitants !) des Hautes-Pyrénées.

Devant une salle comble, la séance du soir est riche en propositions : une rencontre entre deux musiciens, « sur le pouce », pour interpréter une chanson des années 20 ; la projection d’un court-métrage d’une étudiante de l’ENSAV pour un film muet amusant qui fait intervenir les habitants d’Anères dans tout le processus de création, ceux-ci incarnant également l’ensemble des personnages à l’écran ; un ciné-concert d’1h40 où la musique contemporaine côtoie un film des années 20 sorti tout droit des cartons de la Cinémathèque de Toulouse ; et enfin la séance de minuit où le festival s’autorise la projection d’un film, toujours muet et mis en musique live, mais cette fois-ci réalisé il y a quelques mois.

Opérette viennoise et musique électronique

Madame l’ambassadeur (Eine Frau von Format) est l’adaptation cinématographique d’une opérette viennoise où font face deux potentiels acquéreurs de l’île de Petrasia : le roi d’Illyrie, représenté par le comte Geza, et le sultan de Turquisie dont Madame Dschilly est l’ambassadrice. Cette dernière, grâce à ses nombreuses facéties, arrive à atteindre son objectif, alors que le comte Geza, lui, tout aussi joueur, obtiendra le cœur de sa jolie rivale. Les musiciens Ginté Presaité (piano, objets, machines), Adrian Bartas Andresen (trompettes, objets), Antoine Ferris (basse électrique, machines) et Rémy Gouffault (percussions, machines) auront la chance de reprendre cette création produite par le Festival d’Anères, lors de la 2ème édition du festival toulousain « Synchro », porté par la Cinémathèque de Toulouse. Pour cette musique qui ne prend jamais le dessus sur l’image, ils ont choisi d’utiliser principalement une musique répétitive modale, avec des petites cellules, parfois rythmiques, parfois mélodiques, facilement accessibles pour chaque oreille. La trompette est utilisée non pas pour ses sons musicaux mais pour des sons proches du bruitage, le souffle « pur » dans l’instrument y étant privilégié. La première soirée mondaine où participent les deux principaux protagonistes de l’histoire, nous entraîne vers l’EDM (Electronic Dance Music), influencée par la musique new age, toujours autour de petites séquences répétitives et de percussions typiques de cette musique de club, alors que la réception officielle dans la seconde partie du film, s’inscrit dans les codes de la musique rave (samples, percussions, etc.), complétés par une trompette en mode free jazz. La déclaration d’amour sera accompagnée d’une musique de jazz, tonale et avec une battue régulière, alors que le scandale entraînera, quant à lui, le chaos musical.

Le décalage de tous ces univers avec les images projetées peut faire tout d’abord sourire, mais lorsque le spectateur se laisse porter par les artistes, cette musique se révèle parfaitement complémentaire à l’intrigue de cette opérette, et caractérise avec beaucoup de justesse la trame et les affects des personnages évoluant sur la toile.

Cimetière de pianos abandonnés

La deuxième proposition cinématographique, un film muet contemporain, place la musique au cœur de son sujet. Nous découvrons un rite italien appelé « Les empiacciamentos », dont le principal instigateur cherche à passer le flambeau à une jeune femme pour que cette tradition ancestrale perdure. A l’inverse des pianos désaccordés qui rejoignent leur cimetière, dans les bois, selon une procession bien codifiée, la musique de Melissa Weikart (piano, voix), Laure Fischer (saxophone baryton), et le réalisateur du film Alexis Thépot (violoncelle) se déploie selon un univers tonal, avec des lignes musicales facilement accessibles (mélodies comme accompagnement), mais qui restent décousues pour marquer les éléments incongrus qui ponctuent régulièrement ce film intéressant à plus d’un titre.

In fine, cette proposition artistique interroge sur la place que chacun donne à la musique, sur son importance aussi dans son quotidien, à l’instar des chaudes larmes que coule l’une des propriétaires en deuil, pour qui son piano tenait une place de choix dans sa vie. Un pied de nez pour les institutions publiques qui, aujourd’hui, doutent de la place de l’art dans notre société.

Crédits photographiques : © Philippe Destouesse

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Anères. Salle des fêtes. 18-V-2024. 21h30 : Madame l’ambassadeur de Fritz Wendhausen. Film de 1928, 1h38. Avec : Ginté Preisaité, piano, objets, machines ; Adrian Bartas Andresen, trompettes, objets : Antoine Ferris, basse électrique, machines, Rémy Gouffault, percussions, machines.
0h00 : Requiem pour un piano abandonné d’Alexis Thépot. Film de 2024, 0h50. Avec : Melissa Weikart, piano, voix ; Laure Fischer, saxophone baryton ; Alexis Thépot, violoncelle.

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