Da Pacem. Tel est le titre de cet enregistrement que l'ensemble de Philippe Pierlot consacre aux motets de Heinrich Schütz qui appellent à la paix universelle.
Le douloureux contexte de la Guerre de Trente Ans a suscité des chefs-d'œuvre de dévotion musicale de la part des compositeurs allemands, dont le chef de file est Heinrich Schütz. Au cœur de la tourmente, Schütz implore la paix à travers des motets qui mettent en musique les textes bibliques propres à réconforter les croyants. Ces musiques d'une très grande élégance rayonnent d'une lumière qui nous vient de l'Italie où s'est formé Schütz ; elles expriment l'espérance que donne la foi. On y entend une grande sérénité, qui est la marque de fabrique de cet immense musicien.
Voilà plus de 25 ans que le violiste belge Philippe Pierlot dirige le Ricercar Consort, avec lequel il nous a offert de magnifiques productions de musiques sacrées. L'effectif d'un chanteur par partie mêle les voix aux instruments dans un équilibre parfait et met en valeur le texte grâce à une articulation ciselée. Les voix sont admirablement timbrées et donnent l'illusion d'un grand chœur dans les passages tutti, comme dans le motet profane Teutorium dudum belli qui appelle à la joie de la paix pour l'Allemagne, avec d'admirables effets d'écho sur « Que tout Breslau résonne! ». L'antienne Da pacem Domine adresse des « Vivats » aux Grands Électeurs de la Diète en un saisissant effet de polychoralité. Le motet plus recueilli Herr, nun lässet du deiner Diener, d'après le Cantique de Siméon, fait dialoguer la belle voix de basse de Matthias Vieweg avec les cordes, en une imploration très habitée. La supplication exprimée par le motet Erbam dich mein, O Herre Gott est un autre sommet d'intériorité. Il faudrait tout citer, tant les qualités des interprètes s'accordent au génie du compositeur. Au milieu du programme, une symphonie instrumentale de Johann Hermann Schein, avec qui Schütz entretenait des liens étroits, fait écho aux pièces vocales auxquelles elle emprunte la même structure contrapuntique à deux chœurs. On reste subjugué par tant de beauté qui exprime la foi profonde de toute une génération de croyants.