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Archipel(s), la fable dystopique de la Maîtrise Populaire de l’Opéra Comique

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Paris. Opéra Comique. 25-IV-2024. Isabelle Aboulker (née en 1938) : Archipel(s), opéra-comique en un prologue et trois actes. Mise en scène : James Bonas. Chorégraphie : Ewan Jones. Décors et costumes : Thibault Vancraenenbroeck. Lumières : Laïs Foulc. Maîtrise Populaire de l’Opéra-Comique. Les Frivolités Parisiennes, direction musicales : Mathieu Romano

Après son Voyage dans la lune créé en 2023, la Maîtrise Populaire de l'Opéra Comique présente sa deuxième production d'opéra avec Archipel(s), composé par la précurseur de l'opéra pour enfants, , sur un livret d'Adrien Borne.

Même si la qualité du travail préparatoire des quatre-vingt-cinq maitrisiens, âgés de 11 à 25 ans, est incontestable, il n'est pas sûr que le résultat final emballe ceux qui ne sont pas liés, de près ou de loin, à ce projet pédagogique. Tout au long de cette heure d'opéra, et au regard de la démarche artistique des deux protagonistes que sont le librettiste et la compositrice, il aurait été intéressant qu'une première partie retrace, en vidéo pourquoi pas, cette démarche de création : les ateliers d'écriture avec les enfants qui joueront sur scène, ayant débouché au livret présenté pour cet Archipel(s), et le parti-pris stylistique de la musique, ne concevant pas la musique atonale pour de jeunes interprètes.

Cette société imaginaire où le libre-arbitre n'existe plus, cette perte d'identité qui interroge peu les concernés au regard du poids et de la force des règles sociales enracinées, ce monde aseptisé où les couleurs ne font plus partie de cette réalité, cette cérémonie de passage où chacun trouve la place qu'on lui donne, ici par l'attribution d'un prénom… Certains y verront l'île imaginaire de Peter Pan lorsque l'enfant rétif est banni par la Trinité, c'est surtout l'ouvrage littéraire pour enfants de Lois Lowry, Le Passeur, avec qui les liens sont les plus nombreux, laissant souvent penser à une adaptation de ce best-seller fréquemment intégré dans les programmes scolaires en France.

La noirceur de cet univers justifie peut-être la sobriété des costumes et des décors de Thibault Vancraenenbroeck. Dans cette démarche initiatique, la magie de ces éléments opératiques aurait pu, semble-t-il, entraîner plus les jeunes interprètes dans cette fable contemporaine, tout comme rehausser la perception du spectateur. Les chorégraphies d'Ewan Jones s'inscrivent elles aussi dans cette dynamique, qui, même sommaires, manquent quelque peu d'inventivité. La direction d'acteurs de James Bonas est, quant à elle, particulièrement aboutie, que ce soit dans l'exploitation complète de la scène par les différents solistes sur ce plateau finalement vide, que dans la gestion fluide de la masse autant pour l'ensemble de cette communauté aseptisée, que pour ces marginaux fantasques qui changent chaque jour de costume au gré de leur humeur avec l'aide du Tricoteur.

Musicalement, la jeunesse et le manque d'expérience de ces jeunes interprètes ne permettent pas de moments vocaux particuliers alors que la Maîtrise Populaire est un outil approprié en faveur de la découverte de jeunes talents, et alors qu' a trouvé sa voie de prédilection depuis quarante ans dans la composition pour voix d'enfants. Les trois voix de Nina (Rachel Masclet), Pinta (Malvina Missio) et Santa-Maria (Airelle Groleau), qui représentent cette Trinité définissant l'ordre établi, sont toutefois agréables et l'investissement scénique de ces trois jeunes filles est louable.


Déjà présents dans la production précédente, déploient une musique tonale d'une grande clarté dans ses intentions avec une belle fluidité et une limpidité rassurante. À la tête de cet effectif réduit d'une quinzaine de musiciens, s'attache à maintenir un soutien inébranlable aux jeunes chanteurs grâce à un bon équilibre entre le plateau et la fosse. La musique d'Isabelle Aboulker, semblant sortir tout droit du monde du music-hall, est dans cet univers contemporain, voire futuriste, quelque peu décalée. Datée et simple, elle n'est pas en accord avec les autres éléments de cette production.

L'univers musical de cet Archipel(s) aurait mérité un langage beaucoup plus énigmatique et symbolique, en s'affranchissant des codes traditionnels ou en faisant appel à des techniques nouvelles pour un renouvellement du langage propre à notre jeunesse d'aujourd'hui.

Crédits photographiques : © Stéphane Brion

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Paris. Opéra Comique. 25-IV-2024. Isabelle Aboulker (née en 1938) : Archipel(s), opéra-comique en un prologue et trois actes. Mise en scène : James Bonas. Chorégraphie : Ewan Jones. Décors et costumes : Thibault Vancraenenbroeck. Lumières : Laïs Foulc. Maîtrise Populaire de l’Opéra-Comique. Les Frivolités Parisiennes, direction musicales : Mathieu Romano

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