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Salomé en version française à Metz

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Metz. Opéra-Théâtre de l’Eurométropole de Metz. 9-IV-2024. Richard Strauss (1864-1849) : Salomé, opéra en un acte (version française) d’après la pièce d’Oscar Wilde. Mise en scène : Joël Lauwers. Décors : Helmut Stürmer. Costumes : Corina Grămoşteanu. Lumière : Patrice Willaume. Avec Hedvig Haugerud, soprano (Salomé) ; Pierre-Yves Pruvot, baryton (Jokanaan) ; Julie Robard-Gendre, mezzo-soprano (Hérodias) ; Milen Bozhkov, ténor (Hérode) ; Sébastien Droy, ténor (Narraboth) ; Marie-Juliette Ghazarian, mezzo-soprano (Le Page d’Hérodias) ; Paul Gaugler, Éric Huchet, Frédéric Diquero, François Almuzara et Louis Morvan, Les Cinq Juifs ; Jean-Vincent Blot, Premier Nazaréen / Premier soldat ; Tadeusz Szczeblewski, Deuxième Nazaréen ; Nathanaël Tavernier, Deuxième soldat ; Olivier Lagarde, Un Cappadocien ; Lucile Lou Gaier, Une esclave. Orchestre national de Metz Grand Est, direction : Lena-Lisa Wüstendörfer

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Nouvelle production de l'opéra de sous la direction de , dans une mise en scène de . Distribution de choix menée par la soprano norvégienne .


Depuis 1990 à l'Opéra de Lyon, sous la baguette de Kent Nagano, puis en 2011 à l'Opéra Royal de Wallonie avec June Anderson dans le rôle-titre, on n'avait pas entendu la version française de la Salomé de . Même si l'on ne retrouve pas entièrement le texte tel qu'il fut initialement conçu par Oscar Wilde, ce livret déploie des sortilèges de clarté et de transparence que la version allemande a un peu tendance à écraser, surtout lorsqu'elle est interprétée par des chanteurs au gabarit wagnérien habitués à des emplois plus lourds. Il est tout à fait regrettable que nos sopranos nationales qui se sont récemment essayé au rôle – Elsa Dreisig, Patricia Petibon… – n'aient pas eu la chance de se frotter à une version dont elles auraient su révéler mieux que toute autre l'ensemble des trésors poétiques.

La production proposée à Metz par le metteur en scène n'est pas non plus de la plus grande clarté. Non pas que l'on puisse contester, en soi, le principe de la transposition de l'action dans les années 1930. Le décor unique élaboré par Helmut Stürmer, à mi-chemin entre une brasserie Art Déco et un élégant salon bourgeois, est installé sur un plateau tournant qui permet de temps à autres de révéler ce qu'on interprète comme l'envers du décor que constitue l'apparente bienséance de la famille Hérode. Les sombres costumes de Corina Grămoşteanu créent une atmosphère lourde et pesante, rehaussée par les éclairages de Patrice Willaume. Ces derniers, à deux reprises virent au noir complet quand Salomé, dans un moment de crise, s'autorise à couper le courant. Dans cet univers aux reflets glauques, les personnages évoluent sans que soit explicitée la nature de leurs liens et de leurs questionnements. À l'époque du développement de la psychanalyse, chacun garde au plus profond de soi ses aspirations secrètes et profondes. Selon un procédé désormais fréquent sur nos scènes lyriques, Salomé et Jokanaan sont dotés d'un double dont on croit comprendre que les déplacements révèlent les pulsions inconscientes cachées. Lieu emblématique de divers ébats et agissements intimes, un lit apparaît de temps à temps côté cour pour suggérer les fantasmes des uns ou des autres. Fil conducteur de cette quête morbide, le désir obsessionnel de Salomé pour le corps et la bouche de Jokanann, personnage vu à la fois comme un ange bienveillant et un être maléfique, soucieux du bien-être d'Hérodias à qui il apporte soutien et réconfort et en même temps prédateur sexuel en puissance, notamment lorsque son double s'approche du lit du Salomé. Dans ce milieu à l'opacité onirique, les personnages meurent et ressuscitent à l'envi, tel Jokanaan au tableau final ou Narraboth au moment de la Danse des sept voiles. Sans doute ce morceau, qui n'aura jamais paru aussi décalé musicalement, constitue-t-il un des moments les plus réussis de la mise en scène. Réunissant autour d'un gâteau d'anniversaire l'ensemble des protagonistes, tous embarqués dans une sorte de valse folle, il révèle derrière le lissé des apparences la noirceur et la violence des désirs et des attentes.


Sous la baguette de la cheffe suisse , fondatrice et directrice du Swiss Orchestra, l' parvient à faire chatoyer la subtile instrumentation de Strauss, tout en dominant l'acoustique ingrate du lieu et sans pour autant couvrir les chanteurs. Francophones pour la plupart, ces derniers parviennent à faire ressortir toutes les beautés du texte. Comme souvent à Metz, on pourra commencer par louer l'homogénéité d'un plateau remarquable particulièrement par l'excellence des rôles secondaires. Les interprètes des Cinq Juifs, notamment, excellent dans la scène de la dispute et des prophéties. En page d'Hérodias, fait valoir un joli mezzo-soprano au timbre riche et cuivré. Bien connu du public messin, Sébastien Droy impose un portrait attachant de Narraboth, personnage à qui il confère une individualité et une personnalité inhabituelles. Pour les rôles d'Hérode et Hérodias, l'Opéra-Théâtre de l'Eurométropole de Metz a fait appel à des chanteurs en pleine carrière, et non à des vétérans comme cela est parfois le cas. dispose ainsi d'un ténor sain et vaillant, parfaitement assorti avec le mezzo éclatant de , très convaincante Hérodias. Autre prestation remarquée, celle de en Jokanaan, bien chantant en dépit d'un vibrato un peu envahissant en début de soirée. On attendait beaucoup, évidemment, de la jeune soprano norvégienne , second prix en 2023 du concours Paris Opéra Compétition au Théâtre des Champs-Elysées. Si le français est dans l'ensemble compréhensible, la familiarité de la chanteuse avec notre langue ne lui permet pas encore de se délecter de la pure sonorité des mots comme on aurait pu le souhaiter. Elle dispose cependant d'une voix de soprano ample et percutante, bien assise dans le grave et le médium, avec malheureusement une propension vers une certaine stridence dans l'aigu. Les pianissimi flottés la mettent plus à son avantage que les aigus émis sur la nuance forte. Scéniquement, on pourra reprocher à cette incarnation une certaine mollesse, peut-être imputable aux partis pris de la mise en scène.

Spectacle assez déroutant, en somme, remarquable par sa beauté plastique mais peu convaincant en termes de cohérence dramatique. Le public messin aura cependant réservé un bel accueil au professionnalisme et à la solidité musicale des interprètes, visiblement investis dans un projet qu'ils ont défendu avec vaillance et probité.

Crédit photographique : © Philippe Gisselbrecht – Opéra-Théâtre de l'Eurométropole de Metz)

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Metz. Opéra-Théâtre de l’Eurométropole de Metz. 9-IV-2024. Richard Strauss (1864-1849) : Salomé, opéra en un acte (version française) d’après la pièce d’Oscar Wilde. Mise en scène : Joël Lauwers. Décors : Helmut Stürmer. Costumes : Corina Grămoşteanu. Lumière : Patrice Willaume. Avec Hedvig Haugerud, soprano (Salomé) ; Pierre-Yves Pruvot, baryton (Jokanaan) ; Julie Robard-Gendre, mezzo-soprano (Hérodias) ; Milen Bozhkov, ténor (Hérode) ; Sébastien Droy, ténor (Narraboth) ; Marie-Juliette Ghazarian, mezzo-soprano (Le Page d’Hérodias) ; Paul Gaugler, Éric Huchet, Frédéric Diquero, François Almuzara et Louis Morvan, Les Cinq Juifs ; Jean-Vincent Blot, Premier Nazaréen / Premier soldat ; Tadeusz Szczeblewski, Deuxième Nazaréen ; Nathanaël Tavernier, Deuxième soldat ; Olivier Lagarde, Un Cappadocien ; Lucile Lou Gaier, Une esclave. Orchestre national de Metz Grand Est, direction : Lena-Lisa Wüstendörfer

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