Sous les fleurs, la délicatesse selon Thomas Lebrun à Chaillot

Créé en 2023, Sous les fleurs de Thomas Lebrun, accueilli à Chaillot – Théâtre de la danse, dessine le portrait délicat des Muxes, communauté intersexuée du Mexique.

« Je ne suis ni un homme, ni une femme, je suis Muxe. » C'est avec ces mots enregistrés de Felina Santiago Valdivieso, l'une des Muxes les plus emblématiques, que Thomas Lebrun ouvre le spectacle Sous les fleurs. Le chorégraphe, directeur du CCN de Tours, consacre en effet sa dernière création à un troisième genre reconnu dans une culture ancestrale qui remonte aux Zapotèques, l'ancienne civilisation mexicaine d'avant les conquistadors espagnols. La plupart des Muxes vivent dans la ville de Juchitán de Zaragoza, au sud du Mexique, où Thomas Lebrun s'est rendu en résidence de travail en juin 2022.

Pour leur rendre hommage, il dessine un délicat portrait de groupe avec fleurs, interprété par cinq interprètes hommes, qui se glissent d'abord dans des jupes brodées de fleurs multicolores, puis dans des jupons de soie colorée, avant de dévoiler alternativement d'autres facettes de leur féminité ou de leur masculinité.

Les personnages esquissent des gestes de tendresse, de confidence ou d'éclats de rire, recréant une forme de vie communautaire inédite. À ces tableaux vivants très émouvants, entre une canzone en espagnol et un show travesti, Thomas Lebrun ajoute un message fort et puissant de tolérance et de diversité sexuelle.

La mise en scène est extraordinairement maîtrisée, dans les entrées et les sorties d'un décor ressemblant à une maison magnifiquement éclairé par Françoise Michel, dans la manipulation des accessoires, chaises, fleurs et de mystérieux pots en céramique.

La douceur et la lenteur de chaque déplacement, chaque inflexion de bras, d'épaule ou de tête, donne à l'ensemble des mouvements une qualité remarquable, comme suspendue. À travers ces interprètes, Sous les fleurs confère une impressionnante dignité à ces Muxes du fin fond du Mexique.

Crédits photographiques : © Frédéric Iovino