Charmant récital de Jean-Luc Ho autour de Purcell

Dans un joli récital pour clavecin, Jean-Luc Ho met en résonnance différentes pièces pour clavier d'Henry Purcell avec ses prédécesseurs ou ses contemporains.

On connait aujourd'hui Purcell principalement pour son chef-d'œuvre, l'opéra Dido & Aenas, ses semi-opéras et sa musique religieuse ou festive. On sait qu'il a écrit pour le clavecin et l'orgue, mais si ses huit Suites « for the Harpsichord or Spinnet » ont bien été publiées post-mortem, on a fort peu de choses pour l'orgue, alors même qu'il a été titulaire des orgues des chapelles les plus prestigieuses de son temps, et que donc il a forcément beaucoup joué de cet instrument. Même le corpus pour clavecin n'est pas très bien limité : on a, outre les Suites, des pièces éparses, des adaptations, des transcriptions, de sorte qu'on ne sait plus très bien ce qui est à qui. Plutôt que de nous proposer une intégrale Purcell pour le clavecin (qui viendrait bien, pourtant, car on en a peu…), Jean-Luc Ho construit son programme autour de deux Suites de Purcell (la VII et la II), et y adjoint divers Prélude, Dance, Pavane, Sonate, Chaconne, avec encore un « Volontary » pour orgue, transcrit ici pour le clavecin. Il y rajoute également des morceaux de ses maîtres ou amis Gibbons et Blow. Les raisons pour lesquelles il nous propose encore Maurice Greene (né après la mort de Purcell), ou le très français d'Anglebert (sur l'Armide de Lully) nous échappent un peu, malgré une notice de présentation de qualité, mais cela est sans importance et le récital s'écoute de bout en bout avec un plaisir sans faille.

Sur un magnifique clavecin Jobin imitation de Tibaut 1691, Jean-Luc Ho sait varier les couleurs et les intentions avec un goût parfait. A la solennité de la Fugue dixième de Roberday qui tire vers l'orgue originel, répond un Anonyme de la BnF carillonnant et tout-à-fait ravissant. La Dance for Chinese Man and Woman de Purcell est habitée par un groove irrésistible. La Suite VII étale ses scintillements et ses réflexions jusqu'au brillant Hornpipe. Les Volontary de Green et Purcell développent une virtuosité étonnante pour des pièces destinées à l'orgue, et qui trouvent ici au clavecin un épanouissement magnifique. Le programme, fort bien composé, se poursuit avec la Suite II, peut-être la plus poétique de toutes les Suites de Purcell, et s'achève dans un festival grisant de Sarabande, Passacaille et Chaconne, chacune plus brillante que les autres. La pulsation que Jean-Luc Ho imprime est particulièrement bien venue. Ce n'est ni une course de vélocité, ni un alanguissement méditatif. C'est le tempo juste et le respect de la nature intrinsèque des pièces qui sont le plus souvent des danses. L'esprit de Purcell est bien là, joyeux et profond en même temps, délicieusement vif-argent et séduisant.