Gergely Madaras signe une splendide réalisation des Béatitudes de Franck
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César Franck (1822-1890) : Les Béatitudes, oratorio. Anne-Catherine Gillet, soprano ; Héloïse Mas, mezzo-soprano ; Eve-Maud Hubeaux, contralto ; John Irvin, ténor ; Artavazd Sargsyan, ténor ; David Bižić, baryton ; Patrick Bolleire, basse ; Yorck Felix Speer, basse ; Chœur national hongrois, Orchestre philharmonique royal de Liège, Gergely Madaras, direction. 2 CD Fuga Libera. Enregistrés les 10 et 12 décembre 2022 à la salle philharmonique de Liège. Notice de présentation en français et anglais. Durée : 119:16
Fuga LiberaEnregistrées à Liège en décembre 2022, année du 200ᵉ anniversaire de la naissance du compositeur, Les Béatitudes de César Franck sont l'œuvre dans laquelle il a certainement mis le meilleur de lui-même. Que le résultat paraisse avec le recul du temps un peu inégal ne doit pas nous détourner des grandes beautés de cette partition magistrale.
Les Béatitudes sont sans doute l'œuvre de Franck à laquelle le compositeur, catholique fervent et organiste de Sainte Clotilde a apporté le plus de son temps et de son ambition créatrice. Pourtant ce vaste oratorio qu'il n'entendit jamais sauf dans sa réduction avec piano n'a jamais connu la célébrité de la sonate pour violon, du quintette, de la symphonie ou des trois chorals. C'est que, par delà un livret assez médiocre de Mᵐᵉ J.Colomb, la structure de la partition qui, pour chaque béatitude oppose la peinture du vice à celle de la vertu réussit inégalement à un musicien plus à l'aise pour dépeindre le ciel que l'enfer. Vincent d'Indy l'avait excellemment décrit : chaque Béatitude est à elle seule « un petit poème présentant antithétiquement un double tableau : d'abord un exposé, douloureux ou violent, des vices et des maux qui règnent sur la terre, ensuite, l'affirmation céleste de l'expiation de ces vices, du remède à ces maux, enfin, soit entre les deux, soit en guise de conclusion, la voix du Christ …» . Mais l'œuvre dans son ensemble comporte suffisamment de grandes beautés pour avoir recueilli l'assentiment d'un critique aussi sévère que Debussy. Sa discographie est néanmoins restée plutôt maigre, et dominée jusqu'à présent par la gravure d'Armin Joran (Erato) ou celle, plus éloignée du style franckiste traditionnel mais servie par une distribution de haut vol de Rafael Kubelik.
En décembre 2022 à Liège, Gergely Madaras avait enthousiasmé notre confrère par la finesse de sa vision orchestrale, qui ne pouvait surprendre tant on avait déjà été séduit par Hulda ou certains poèmes symphoniques parus auparavant (chez Fuga Libera également). Pour cet album, l'éditeur a pris dans les deux soirées successives de décembre 2022 pour tirer le meilleur et l'on reste admiratif devant la richesse de l'orchestre, la variété de ses nuances et la pure beauté de cette orchestration. En revanche, le chœur national hongrois souffre souvent d'une prononciation peu intelligible (à noter que le livret ne figure pas dans l'album mais peut être lu par le biais d'un QR code à la fin de l'excellent texte de présentation de Joël-Marie Fauquet) et ce même défaut touche certains solistes. On s'incline devant les interprètes féminines, en particulier Anne-Catherine Gillet, magnifique ange du pardon, Héloïse Mas et Ebva-Maud Hubeaux sont par ailleurs tout à fait convaincantes. De même la basse Patrick Bolleire campe un Satan redoutablement maléfique mais sans grandiloquence. Dommage alors que le Christ de David Bižić n'atteigne pas les mêmes cimes, non plus que le ténor John Irvin à qui revient la sublime quatrième béatitude, tous deux souffrant parfois d'une prononciation française imparfaite. Si l'effectif et le nombre des solistes autant que le style parfois composite d'une partition dont l'écriture s'étendit sur dix ans, de 1869 à 1879, rendent toute exécution inévitablement un peu inégale, on se réjouit au final de trouver ici une nouvelle gravure de ce chef d'œuvre, qui enrichit une discographie toujours dominée par celle d'Armin Jordan.
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