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Les délires de dédales de l’ensemble Court-Circuit

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Paris. Auditorium Marcel Landowski du CRR. 27-II-2024. Skylar Lim (né en ?) : Il volo degli angeli, pour 9 instruments (CM). Matias Fernandez Rosales (né en 1988) : Vertiges suspendus, pour six instruments (CM) ; Marc Monnet (né en 1947) : Jeux étranges, pour 7 instruments (CM ). Bruno Mantovani (né en 1974) : Concerto de chambre n°4 SG1602, pour 9 instruments (CM). Ensemble Court-Circuit ; direction Jean Deroyer.

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C'est un en grande forme, dirigé par son chef , que l'on retrouve sur le plateau de l'Auditorium Marcel Landowski pour quatre créations mondiales et autant d'aventures nouvelles dans le champ du sonore.

L'affiche est exclusivement masculine dont vient s'expliquer (s'excuser) le directeur de l'ensemble , arguant les difficultés financières (coupes drastiques de budget qui touchent aujourd'hui la plupart des structures vouées à la création) qui l'ont obligé à modifier le programme prévu à l'origine dans la stricte parité.

est un tout jeune compositeur singapourien prometteur, encore étudiant au CRR de Paris dans la classe de José Manuel López López. Sa courte pièce Il volo degli angeli nous ravit. Éloge de la légèreté, la musique est vibratile, pleine d'élan et de finesse, où trémolos très doux et bisbigliandi, ceux de la flûte de Jérémie Fèvre, entretiennent la fluctuation des hauteurs au sein d'une écriture facétieuse, traversée de petits motifs plaintifs à la Sciarrino.

L'horizon s'obscurcit et la virtuosité instrumentale s'accroît avec Vertiges suspendus pour flûte, clarinette, trio à cordes et piano, commande de Court-Circuit passée au jeune compositeur chilien . La manière, pour le moins musclée, explore le champ spectral des fréquences que libèrent les basses résonnantes du piano (Jean-Marie Cottet) avec une intensité énergétique qui ne laisse d'impressionner. Cette musique de trajectoires réamorce sans cesse le mouvement, ménageant des instants d'une belle incandescence à la faveur des multiphoniques somptueux de la clarinette basse (Pierre Dutrieu). Les timbres fusionnent en un méta-instrument puissant qui porte le son jusqu'à saturation.

Dans la note d'intention de Jeux étranges, la nouvelle pièce de , le compositeur prévient : « il faut prendre ici le mot ‛jeu' au sens de ‛se divertir'. » La percussion est à la fête (Ève Payeur très affairée) ainsi qu'un certain nombre d'instruments exogènes (sinon exotiques) comme la flûte à coulisse de Jérémie Fèvre, le kazou et le didgeredoo (joués par le corniste Hugues Viallon), le waterphone, le sifflet, etc. : autant d'accessoires qui colorent l'espace de jeu, mettent l'oreille en alerte et convoquent l'étrangeté. « Le plaisir est la règle », aurait dit Debussy. Ainsi va la musique de Monnet, libre et inattendue, capricieuse et colérique, survoltée parfois (les cadences du piano) ou quasi immobile lorsque Jean-Marie Cottet répète à l'envi une note (un si médium) rassurante autant qu'obsédante, comme dans le Gibet de Ravel… car les citations sont pléthores avec lesquelles jongle le compositeur, acrobate et virtuose.

 

Les instrumentistes marquent une courte pause avant la création du Concerto de chambre n°4 SG1602 de qui consacre la soirée : le sous-titre un rien énigmatique est emprunté à l'une des toiles du peintre Yves Millecamps, confrère du compositeur à l'Académie des Beaux-arts et « maître de l'abstraction géométrique », écrit Mantovani dans sa note d'intention. Comme chacun des opus de cette série, le Concerto de chambre n°4 met en vedette un instrument, ici le hautbois d'Hélène Villeneuve. Il est le fil rouge formel (avec ses retours balisant la trajectoire) autant qu'il nous fait apprécier l'art de la ligne microtonale qui s'exerce sous la plume experte du compositeur et qu'enchante la sonorité racée de l'interprète. C'est le hautbois qui lance la pièce, boosté par les impacts irradiants de l'ensemble. Reviennent à plusieurs reprises ces séquences très mantovaniennes où le même son circule dans l'espace, pris en relais par l'ensemble des instruments avec une tension énergétique galvanisante. De courts processus sont également à l'œuvre, «extrêmement directionnels et virtuoses », véritables coups d'accélérateur. Comme le hautbois, le piano est souvent en dehors, insolemment virtuose ou en dialogue avec l'alto (Laurent Camatte). Les « sons à l'envers » des deux violons en joute (Alexandra Greffin-Klein et Aya Kono) sidèrent juste avant la cadence du piano dans l'espace lumineux de ses aigus (Messiaen demeure) qu'altèrent les quelques notes préparées du clavier. Ce sont autant de trouvailles ingénieuses pour renouveler la texture et construire la dramaturgie. Entre énergie du geste et projection du son, art de la résonance, complexité rythmique et microtonalité, s'affirme une fois encore comme un compositeur de la synthèse, maître du mouvement, du timbre et de la forme dans cette partition de la maturité qui s'inscrit, sans conteste, au nombre de ses chefs d'œuvre.

Il faut évidemment louer le talent et l'engagement des interprètes de Court-Circuit tout comme l'oreille affûtée de leur chef dont l'exigence du détail autant que l'intelligence du texte font merveille.

Crédits photographiques : ©

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Paris. Auditorium Marcel Landowski du CRR. 27-II-2024. Skylar Lim (né en ?) : Il volo degli angeli, pour 9 instruments (CM). Matias Fernandez Rosales (né en 1988) : Vertiges suspendus, pour six instruments (CM) ; Marc Monnet (né en 1947) : Jeux étranges, pour 7 instruments (CM ). Bruno Mantovani (né en 1974) : Concerto de chambre n°4 SG1602, pour 9 instruments (CM). Ensemble Court-Circuit ; direction Jean Deroyer.

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