Steve Reich and Co au festival Présences de Radio France : répétitions et percussions

Pour sa 34^e édition, le festival Présences met à l'honneur le compositeur Steve Reich. Au programme ce soir, Crimen amoriis de Michèle Reverdy en création mondiale, Aheym pour quatuor à cordes de Bryce Dessner associés à deux œuvres emblématiques de Steve Reich, Clapping Music et The Desert music.

Répétitive et minimaliste dans tous les sens du terme puisque ne nécessitant aucun instrument autre que les deux mains, Clapping Music est une œuvre iconique de Steve Reich, composée en 1972. Son principe simple, inspiré du flamenco, consiste, dans sa forme initiale à deux intervenants, en des battements de mains synchrones à l'unisson suivant une cellule rythmique de 12 croches, puis au bout de 12 fois un des intervenant déphase d'une croche ; ce déphasage répété 12 fois retourne à l'unisson, marquant alors la fin de la pièce. C'est, ce soir, une version un peu plus complexe et étoffée qui est interprétée, faisant appel à huit percussionnistes pour un résultat parfaitement fascinant !

Œuvre magnifique pour quatuor à cordes, Aheym (Retour à la maison en yiddish) de Bryce Dessner (né en 1976), composée en 2009, s'inscrit dans la continuité de la pièce précédente par sa rythmique envoutante et sa dynamique oppressante. Le Quatuor Tana en donne une interprétation constamment tendue, impeccablement mise en place, très engagée avec des coups d'archet profonds et furieux, la musique circulant de pupitre en pupitre (Antoine Maisonhaute, violon solo ; Ivan Lebrun, second violon ; Takumi Nozawa, alto et Jeanne Maisonhaute, violoncelle) au sein d'une polyphonie complexe d'une limpide clarté, alternant épure et bribes mélodiques, quelque peu altérées toutefois par la sonorisation.

La compositrice d'une œuvre d'ampleur et passionnée par la voix, Michèle Reverdy propose, ensuite, en création mondiale Crimen Amoris pour chœur et orchestre sur un poème adressé à Rimbaud par Paul Verlaine, dont la beauté confondante est un rien compromise par la diction ce soir bien approximative du Chœur de Radio France. On le regrettera d'autant plus que la pièce laisse une place prédominante à la voix, évoluant entre chant et déclamation, soutenue le plus souvent par les timbres isolés de l'orchestre dans une orchestration très décantée et raffinée (percussions) complétée par quelques saillies de bois et glissandos de cuivres (trombones). Complexe dans sa mise en place et malgré une direction précise de Brad Lubmann, Crimen amoris peine à convaincre totalement, paraissant in fine assez plate et ne dégageant que peu d'émotion.

Après une longue mise en place du plateau rendue nécessaire par la monumentalité de l'œuvre The Desert Music pour orchestre et chœur  occupe à elle seule la seconde partie. Composée en 1984 sur une série de poèmes de William Carlos Williams, trois évocations de désert y sont rassemblées (Désert du Sinaï, Désert de Judée et Désert de White Sands au Nouveau Mexique) dans une œuvre grandiose, répétitive et envoutante regroupant nombre de percussions, un effectif instrumental colossal et un chœur mixte.

Véritable musique de transe, à la fois semblable et autre, évoluant dans un statisme dynamique, on y admire la clarté dans l'organisation des plans sonores, les effets de masse, la subtilité des transitions, les nombreuses pédales de vents au sein desquelles se détachent quelques bribes mélodiques (flutes) mais surtout des percussions virtuoses (timbales, marimbas, vibraphones, xylophones, clochettes, grosse caisse, tam-tams et maracas… ) et un chœur au chant incantatoire. Là encore, on regrettera peut-être une sonorisation mal maitrisée (ou une direction discutable) menaçant les équilibres et effaçant quelque peu les contrastes et les nuances.

Crédit photographique : © Radio France – Christophe Abramowitz

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