De la ferme à la scène avec Travol’time d’Adeline Fontaine et Alexis Ballesteros

Le Parvis, scène nationale de Tarbes, offre une série de dates en région à la compagnie émergente La Panthère Blanche. Un duo d'artistes revient dans Travol'time sur son parcours d'enfants fantasmant une vie de star à l'américaine, depuis l'exploitation agricole de leurs parents.

L'herbe serait-elle vraiment toujours plus verte ailleurs ? C'est la question que se posent Adeline Fontaine et Alexis Ballesteros dans Travol'time, from the farm to the fame, la deuxième création de la compagnie La Panthère Blanche, fondée en 2019. Après une formation au RIDC à Paris et un passage par le CDCN Toulouse, Adeline Fontaine travaille notamment avec Marta Izquierdo Muñoz sur les créations IMAGO-GO en (2018) et Guérillères (2021), toutes deux également programmées au Parvis l'année passée. Au fil de son parcours, elle fait la rencontre d'Alexis Ballesteros, un comédien et musicien issu du milieu agricole tout comme elle. Ensemble, ils tentent de comprendre comment le rêve d'une vie autre permet de se réapproprier, voire de transcender sa condition sociale et son identité.

Les idées reçues sur les agriculteurs et le monde rural sont encore vivaces. Et c'est peut-être de là qu'est né le rêve d'enfant du duo de se construire en opposition à leur milieu d'origine, en intégrant celui de l'art. Aujourd'hui, les adultes devenus metteurs en scène et interprètes (théâtre et danse) abordent ce constat selon une tout autre approche : accepter leur identité en donnant à voir la réalité et la richesse de la vie à la campagne. Cette volonté est d'ailleurs clairement exprimée dès le début du spectacle, alors que la danseuse et le musicien s'adressent directement au public et exposent leur procédé depuis les gradins, peu de temps après leur entrée en scène. Le projet est simple, il s'agit de rendre l'agriculture cool en l'américanisant, grâce à la figure inspirante de John Travolta, et notamment du personnage qu'il incarne dans La Fièvre du samedi soir (1977) de John Badham.

Les chaps de cow-boy sont désormais à pattes d'éléphant et les costumes disco des années 70 affichent un motif peau de vache. Le ton est assurément décalé. Durant une heure, plusieurs tableaux se succèdent, faisant se croiser diverses références musicales où visuelles à la John Travolta et des souvenirs très personnels du monde agricole, narrés tour à tour avec beaucoup de tendresse et de fierté par les deux personnages, sur fond de musique des Bee Gees ou de Chuck Berry. On notera particulièrement un concours de beauté de taureau présenté de façon très réaliste par Alexis Ballesteros, faisant l'éloge de la bête gagnante loufoquement mimée par Adeline Fontaine.

Les mouvements de bassin du disco croisent ceux de la traite des vaches, et le mime sert à de nombreuses reprises de point de départ à la mise en scène corporelle du travail au champ. Les costumes permettent de planter le décor, car seuls deux tables et un portant (servant tantôt de paravent, tantôt d'écran de projection) habillent le plateau. Les textes parlés ou chantés constituent quant à eux un fil rouge permettant aux interprètes de cheminer entre évocations du passé et constat sur l'évolution subie par le monde agricole.

Le champ de recherche de la compagnie La Panthère Blanche est d'autant plus intéressant qu'il est rarement traité. Cependant, cette deuxième création souffre tout de même d'un problème de rythme, notamment en raison de transitions quelque peu maladroites et d'une tendance à s'éparpiller, tant dans son propos central que dans ses propositions de mise en scène. Le public semble toutefois réceptif et au rendez-vous, ce qui pourrait être annonciateur d'une progression fructueuse et d'un avenir florissant pour la jeune compagnie d'Adeline Fontaine.

Crédit photographique : © Alexis Ballesteros