Nouvelles voix en DVD pour le Platée de Rameau par Laurent Pelly

Que l'on croasse ou non de plaisir en regardant le Platée de Laurent Pelly, cette mise en scène d'opéra – ici sous la direction de Marc Minkowski à la tête de ses Musiciens du Louvre – est désormais incontournable. Nouvelles voix pour cette reprise à Garnier en 2022: bingo pour ceux qui n'ont pas encore conservé de version scénique de ce ballet bouffon de Rameau !

Le Platée de Paul Agnew n'avait pas autant flamboyé dans le premier DVD de cette production (sur une reprise en 2002 d'un spectacle créé à Paris en 1999), que son prédécesseur Jean-Paul Fouchécourt dont le pataud affirmé était particulièrement attendrissant en comparaison d'une subtilité un brin trop humaine du co-directeur des Arts Florissants. Dans cette prise de rôle pour l'Américain Lawrence Brownlee, on appréhendait surtout que les mots de Molière se noient dans Les Everglades plutôt que dans une des mares de nos campagnes françaises. Heureuse surprise lorsque l'on constate que le ténor porte une attention constante au mot et à la prosodie avec une sincérité touchante, s'emparant avec une clarté de diction, une aisance dans l'émission et un naturel scénique, des « oi » batraciens ponctuant au fur et à mesure ses interventions.

Julie Fuchs (La Folie) et Mathias Vidal (Thespis) se distinguent tous deux par leur maîtrise dans la virtuosité vocale : l'une par des vocalises limpides et aériennes d'une expressivité plus contenue (mais pas moins belle !) que la folie furieuse de Mireille Delunsch ; l'autre par une vaillance conquérante bien éloignée de la nonchalance de Yann Beuron. Cette compatibilité entre une personnage et son interprète est aussi évidente sous les traits de Nahuel Di Pierro, tout à fait à l'aise vocalement comme scéniquement en Cithéron.

Le spectateur s'amusera follement de l'espièglerie de Marc Mauillon en Momus dont le sens comique vaut tout autant que l'élégance charismatique de Reinoud van Mechelen en Mercure. La flexibilité du mezzo d'Adriana Bignagni Lesca qui dépeint une Junon « bleu électrique », et le timbre cristallin de L'Amour de Tamara Bounazou complètent une distribution vocale cinq étoiles pour un pilier de la scène lyrique actuelle.