Les Vêpres de Monteverdi par Pygmalion, au sommet du théâtre sacré
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Claudio Monteverdi (1567-1643) : Vespro della Beata Vergine. Céline Scheen, soprano ; Perrine Devillers, soprano ; Lucile Richardot, mezzo-soprano ; Emiliano Gonzalez Toro, ténor ; Zachary Wilder, ténor ; Antonin Rondepierre, ténor ; Etienne Bazola, basse ; Nicolas Brooymans, basse ; Renaud Brès, basse ; Chœur et ensemble Pygmalion, direction : Raphaël Pichon. 2 CD Harmonia Mundi. Enregistrés à Paris en janvier 2022. Livret en français, anglais et allemand. Durée totale : 162’
Harmonia MundiOn se rappelle avec émotion les représentations de 2019, qui ont donné lieu à un superbe DVD enregistré à la Chapelle Royale de Versailles. Raphaël Pichon nous offre aujourd'hui la version CD gravée en 2022.
On ne présente plus les Vêpres de la Vierge de Monteverdi, incontestablement un des sommets de la musique sacrée de l'époque baroque. Oeuvre publiée en 1610, à la fin de la période mantouane du compositeur, son hétérogénéité stylistique pourrait donner à penser que Monteverdi s'est livré à une compilation de psaumes et d'hymnes écrits à différentes périodes de sa vie. Ce qui est certain, c'est que le résultat est d'une parfaite cohérence, renforcée ici par cette signature inimitable au début et à la fin de l'oeuvre : la reprise de la toccata introductive de l'Orfeo, opéra publié trois ans auparavant. Dans un entretien fort intéressant avec Jean-Clément Guez dans le livret d'accompagnement, Raphaël Pichon dit que « trouver la bonne fin était une quête en soi ». Et son choix de reprendre ce leitmotiv en conclusion, juxtaposé au plain-chant prévu par Monteverdi, parait très convaincant. Une belle façon de dire que la boucle est bouclée. Entre chaque psaume et hymne confiés au choeur, le compositeur remplace les antiennes grégoriennes par des motets de solistes en stile rappresentativo, inspiré du répertoire profane. Car Monteverdi est avant tout un homme de théâtre, et sa musique religieuse est pensée comme une scène de théâtre transcendant les émotions humaines. « Assister à une représentation des Vêpres, c'est faire l'expérience de l'extase » nous dit encore Raphaël Pichon.
Dès l'explosion initiale du Domine ad adjuvandum, on est transporté très loin. Cette interprétation, toute en contrastes et en surprises, nous fait presque oublier les versions antérieures ( à l'exception peut-être de celle enregistrée par La Tempête de Simon-Pierre Bestion en 2019). Il faut dire que la liberté d'instrumentation permet à chaque interprète de recréer un monde différent, malgré la précision de la partition. Raphaël Pichon soigne particulièrement la fin des psaumes. Les doxologies sont de grands moments d'expressivité tout en douceur, et la longueur de la note finale de l'Amen du Dixit Dominus et de l'Ave maris Stella témoigne de la très grande maîtrise vocale du choeur. Le pianissimo à la fin du Laudate pueri est un autre beau moment contemplatif. La distribution vocale est d'une qualité exceptionnelle. Le Nigra sum du ténor Emiliano Gonzalez Toro accompagné par les harpes est un sommet, ainsi que le Pulchra es de la soprano Céline Scheen. Et le Duo seraphim d'E.Gonzalez Toro et Zachary Wilder est un véritable moment d'extase. On retrouve les mêmes ténors dans l'Audi coelum et ses effets d'écho, parfaitement servi par un continuo discret et efficace, alors que le Benedicta final est chanté a capella pour un effet encore plus planant. La sonate instrumentale à double choeur, où les cordes dialoguent avec les cornets et les sacqueboutes, ponctuée par l' oraison des femmes à l'unisson, permet d'apprécier la belle virtuosité des instrumentistes. Il faudrait tout citer tant la grâce habite cette interprétation exemplaire, qui porte les Vêpres de Monteverdi à un point d'incandescence inoubliable.
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Claudio Monteverdi (1567-1643) : Vespro della Beata Vergine. Céline Scheen, soprano ; Perrine Devillers, soprano ; Lucile Richardot, mezzo-soprano ; Emiliano Gonzalez Toro, ténor ; Zachary Wilder, ténor ; Antonin Rondepierre, ténor ; Etienne Bazola, basse ; Nicolas Brooymans, basse ; Renaud Brès, basse ; Chœur et ensemble Pygmalion, direction : Raphaël Pichon. 2 CD Harmonia Mundi. Enregistrés à Paris en janvier 2022. Livret en français, anglais et allemand. Durée totale : 162’
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