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Jonathan Tetelman comme un diamant brut au Gstaad New Year Music Festival

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Rougemont. Église. 17-XII-2023. Gstaad New Year Music Festival. Alessandro Stradella (1643-1682) : Pietà, signore. César Franck (1822-1870) : Panis Angelicus. Giuseppe Verdi (1813-1901) : La Donna è mobile (Rigoletto), Dio che nell’alma infondere (Don Carlo). Georges Bizet (1838-1875) : Torréador, en garde, Je suis Escamillo (Carmen). Giacomo Puccini (1858-1924) : Donna non vidi mai (Manon Lescaut), Recondita armonia (Tosca). Franz Lear (1870-1948) : Dein ist mein ganzes Herz. Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Jesus bleibet meine Freude. Franz Schubert (1797-1828) : Trois Klavierstücke, D. 946 – No. 2 in mi majeur, Ungarische Melodie D. 817. Alexandre Ziloti (1863-1945) : Prélude en Si Mineur d’après J.S. Bach. Jonathan Tetelman (ténor), Rafal Pawnuk (basse-baryton), Daniel Heide (piano).

Dans la cadre du 18e Gstaad New Year Music Festival, le concert d'ouverture recevait le ténor dont la récente signature avec le prestigieux label Deutsche Grammophon suscitait toutes les attentes.

Dans le cœur de la mythique église romane de Rougemont, le piano égrène quelques notes quand, du fond des bancs surgit la voix barytonale, superbement timbrée, du ténor . Spectaculaire, un peu m'as-tu-vu, il fait une entrée théâtrale qui laisse augurer d'intenses moments musicaux. L'homme est beau, il porte élégamment son smoking brillant, le plastron immaculé, les manchettes ornées de brillants laissent échapper le clinquant d'une montre. Grand, l'allure conquérante, il est le portrait de sa voix. Brillant, flamboyant, éclatant, son interprétation du très bel air « Pietà, Signore » d' impressionne. Quelle voix, quelles harmoniques, quelle puissance dans son registre grave et quel soleil dans ses aigus ! Le matériel vocal du ténor chilien est saisissant. Le public est immédiatement conquis et applaudit chaleureusement ce premier jet. Ainsi en sera-t-il, dans un tonitruant crescendo saluant chaque prestation du ténor. Sauf qu'à force d'effets de son aisance, il laisse échapper petit à petit l'esprit des pages qu'il chante au détriment d'excès vocaux qui, s'ils ne lui posent aucun problème de justesse font perdre à l'œuvre les nuances que le texte voudrait qu'on lui prête.

De ce manque de mesure pâtit la musicalité, qui va s'amenuisant. Après son spectaculaire début, on aurait pensé que prendrait en compte la dimension des lieux. Au lieu de modérer sa puissance vocale, de soigner l'expressivité musicale, de doser ses effets, il continue de chanter à tout-va, saturant l'air (et nos oreilles) de sons qu'on aurait aimés plus retenus, mieux sentis. Il aurait ainsi pu offrir plus de l'artiste que du chanteur. A sa décharge, on doit cependant noter qu'il est accompagné par un piano pour le moins défaillant. En effet, , pourtant accompagnateur réputé, accuse une méforme et jamais on ne le sent porteur de celui qu'il accompagne. Certes Schubert, dont est un spécialiste (encore que les Trois Klavierstücke D.946 et l'Ungarische Melodie D.817 qu'il joua en solo mettaient sérieusement en doute sa spécialisation) est à des lieues de la musique italienne flamboyante au programme de Jonathan Tetelman. Un décalage manifeste qui oblige le chanteur à prendre seul en main un spectacle qui, par manque de complicité (et de probables répétitions), devient celui du seul ténor, obligé de compenser le manque d'adhésion de son compère. Dès lors, Jonathan Tetelman en rajoute et en fait trop au détriment de la musique qu'il est certainement capable de mieux servir  en d'autres circonstances.

Dans ce récital apparaissant musicalement peu structuré, on opère des changements de dernière minute. Ainsi, Jonathan Tetelman invite sur la scène un baryton de ses amis comme pour agrémenter la soirée. Sauf que le baryton polonais n'est en rien l'élément dynamiteur qui aurait redoré un récital tenu par le seul Jonathan Tetelman. Avec une voix terne, une prononciation italienne comme française désastreuse, ses interventions dans les airs de Carmen ou de Don Carlo ne font que projeter le ténor dans des excès vocaux se voulant spectaculaires.

Il aura fallu les derniers instants de ce concert pour qu'enfin, Jonathan Tetelman se retrouve dans un très subtil et habité « Dein ist mein ganzes Herz » tiré du Pays du sourire de et dans un superbe bis avec un « E lucevan le stelle » tiré de Tosca de Puccini, permettant d'apprécier son extraordinaire puissance vocale du bas médium qui n'a rien à envier avec celui de ses aigus. On retiendra de cette soirée le regret d'entendre un ténor doté d'immenses moyens vocaux n'en user que si peu pour l'expression artistique et tant pour l'apparat. Jonathan Tetelman est un diamant. Un diamant brut qu'on doit encore tailler pour lui donner le brillant qu'il recèle. Celui que d'aucuns qualifient, avec de bonnes raisons, comme le « nouveau Pavarotti » aurait grand intérêt à ménager et à « manager » son instrument s'il veut durer au sommet.

Crédit photographique : © Patricia Dietzi / Gstaad New Year Music Festival

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Rougemont. Église. 17-XII-2023. Gstaad New Year Music Festival. Alessandro Stradella (1643-1682) : Pietà, signore. César Franck (1822-1870) : Panis Angelicus. Giuseppe Verdi (1813-1901) : La Donna è mobile (Rigoletto), Dio che nell’alma infondere (Don Carlo). Georges Bizet (1838-1875) : Torréador, en garde, Je suis Escamillo (Carmen). Giacomo Puccini (1858-1924) : Donna non vidi mai (Manon Lescaut), Recondita armonia (Tosca). Franz Lear (1870-1948) : Dein ist mein ganzes Herz. Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Jesus bleibet meine Freude. Franz Schubert (1797-1828) : Trois Klavierstücke, D. 946 – No. 2 in mi majeur, Ungarische Melodie D. 817. Alexandre Ziloti (1863-1945) : Prélude en Si Mineur d’après J.S. Bach. Jonathan Tetelman (ténor), Rafal Pawnuk (basse-baryton), Daniel Heide (piano).

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