Square and Ymaginacions pour La Quintina

Fort du succès de son premier disque (Heavenly Songes, Clef ResMusica), l'ensemble La Quintina clôture son cycle dédié aux messes inédites à trois voix de Nicholas Ludford, avec le premier enregistrement mondial de la Missa Feria II.

Même si cet enregistrement finalise plus de dix ans de travail autour du compositeur Nicholas Ludford, l'ensemble La Quintina espère que sa démarche, aujourd'hui inédite, donnera envie à d'autres interprètes de continuer à contribuer à faire résonner de nouveau la totalité des sept Lady Masses du maître, seul cycle complet de messes votives à la Vierge pour tous les jours de la semaine qui nous est parvenu.

Cette fois-ci, la programmation de ce disque n'est pas régie selon un office, mais comme un programme de concert qui mêle autour d'un « square » l'influence des styles de John Dunstable (ca. 1390-1453), l'inventeur du square, Nicholas Ludford (ca. 1485-1557), éminent membre de la Chapel Royal et organiste à St Stephen et à St Margaret, et William Whitbroke (ca. 1500-1569), membre du Cardinal's College d'Oxford et sous-doyen de la cathédrale St Paul. Soit une mélodie utilisée comme cantus firmus pendant plus d'un siècle !

La notice de présentation, rédigée par le directeur-ténor-musicologue Jérémie Couleau, explique avec précision, et beaucoup d'érudition, cet « objet musical composite, constitué de plusieurs mélodies en mode de ré avec des prolations différentes et des mouvements cadentiels conclusifs typiques des parties de ténor. »

Au-delà de la démarche musicologique prenante, savamment exposée dans le livret par le protagoniste principal de ce projet original, on retrouve les forces de La Quintina : une symbiose évidente entre les voix d'Esther Labourdette (cantus), Sylvain Manet (altus) et Jérémie Couleau (ténor) en faveur d'une sobriété élégante, harmonieuse et sereine ; des interprètes qui maîtrisent idéalement les techniques et autres subtilités interprétatives des polyphonies anciennes. Soulignons la qualité de la prise de son de Julien Podolak dans une acoustique parfaite qu'offre l'Abbaye de Loc-Dieu.

Pour ce nouvel opus, nous nous attarderons sur les deux gloses, Afferentur regi virgines et Bryd one brere, surprenantes du point de vue de Christophe Desligne qui improvise à temps réel selon les conditions d'un concert, et qui fait sonner de manière totalement singulière son orgue portatif, l'organetto jouant encore un rôle de premier plan au moment de la composition de ces Lady Masses.

Comme un jeu de miroir qui motive l'auditeur à écouter ce nouveau disque avec son pendant paru en 2020 qui porte le nom de la dernière pièce interprétée, An Hevenly Songe, ce nouvel enregistrement caractérise parfaitement la « touche » de La Quintina dans l'univers de la musique ancienne : une précision musicologique exemplaire et une approche interprétative des plus raffinées.