Berlioz et Paris, vaste sujet !

La relation de Berlioz et Paris est un sujet vaste et protéiforme, tant la carrière du compositeur est liée à cette capitale politique et artistique. L'ouvrage collectif de 600 pages dirigé par Cécile Reynaud est une somme qui multiplie les perspectives, et n'épuise pas le sujet. 

Hector Berlioz, dont la personnalité s'est forgée dans les paysages agricoles et rocheux du Dauphiné, est indissociablement lié à cette ville et à sa société artistique et politique. Il lui devait sa carrière mais pas son salut, qu'il trouva de son vivant à travers des tournées triomphales à travers l'Europe jusqu'à la Russie, et post mortem pendant l'essentiel du XXᵉ siècle en Angleterre surtout, que ce soit sur le terrain musical (Beecham, Colin Davis, Gardiner…) que musicologique (Hugh Macdonald, David Cairns…).

Si Paris et la France n'ont pas complètement négligé notre héros national, ce sont grâce à quelques champions isolés, Saint-Saëns, Chabrier, Chausson côté compositeurs, des musicologues comme Pierre Citron dans les années 60, Cécile Reynaud depuis une vingtaine d'années, Bruno Messina naturellement qui a fait du Festival Berlioz un rendez-vous majeur de l'été culturel européen.

Volumineux et foisonnant, Berlioz et Paris est un livre collectif issu d'un colloque international organisé à l'occasion du cent-cinquantenaire de la naissance du compositeur. Si c'est un ouvrage de chercheurs et de musicologues, avec ce que cela entraîne de rigueur éditoriale (ce qui est un compliment) et parfois de présentation un peu académique (ce qui peut refroidir un peu le mélomane), toutes les thématiques traitées restent accessibles à un public d'amateurs passionnés.

L'introduction rédigée par Cécile Reynaud est plus qu'une simple ouverture, elle est le texte qui inscrit Berlioz dans la capitale, dans laquelle il va évoluer pendant cinq décennies, la ville elle-même se transformant radicalement pendant cette longue période. Pour bien appréhender et entrer dans cet ouvrage, il faut se concentrer sur cette introduction, et picorer dans les chapitres tels qu'ils sont présentés de manière extrêmement synthétique et sûre par la musicologue.

Que retenir de cet ouvrage ? La multiplicité des angles avec un approfondissement de sujets qui restaient mal connus, Berlioz étudiant en médecine (l'étude des cadavres d'un sordide achevé !), le rôle de la salle Herz qui était une des meilleures salles de Paris et dont pourtant on ne connait pas précisément la date de destruction, la relation de Berlioz avec les Dauphinois établis à Paris, sa participation aux salons mondains, l'importance de l'Institut de France, les programmes des concert auxquels il a pu effectivement assister, l'administration des théâtres, l'organisation des grands concerts et le rôle de personnages singuliers et pas si anecdotiques comme le chef d'orchestre de bals Isaac Strauss, les attaques subies et les soutiens reçus dans la presse, etc.

Un ouvrage pour Berliozien passionné, qui constitue un complément utile à la biographie de référence de David Cairns (Fayard).