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Berlin. Staatsoper. 24-XI-2023. Luigi Cherubini : Médée, opéra sur un livret de François-Henri Hoffmann. Mise en scène : Andrea Breth ; décor : Martin Zehetgruber ; costumes : Carla Teti. Avec Marina Rebeka (Médée), Stanislas de Barbeyrac (Jason), Peter Schöne (Créon), Maria Kokareva (Dircé), Alisa Kolosova (Néris)… Staatsopernchor ; Akademie für Alte Musik Berlin ; direction : Christophe Rousset.
Le Staatsoper propose une œuvre qui n'est guère plus qu'une curiosité dans une mise en scène efficace qui prend vie grâce à un orchestre et un chef proprement admirables.
Pour accompagner sa nouvelle production de la Médée de Charpentier, il paraît naturel que l'Opéra de Berlin ait choisi de reprendre sa production de la Médée de Cherubini, créée en 2018, même si le cadre des Semaines baroques ne convient guère à une œuvre créée six ans après la mort de Mozart – pour un peu, pourquoi pas plutôt la Medea d'Aribert Reimann, créée à peine un siècle plus tard, et qui est elle un vrai chef-d'œuvre ? Outre le mélodrame de Georg Benda programmé en concert dans ces Semaines baroques, on aurait surtout pu donner enfin une place à un opéra autrement plus stimulant que celui de Cherubini, le Giasone de Cavalli, qui aborde le mythe sous de tout autres perspectives.
Ennoblie par l'interprétation de Callas dans l'adaptation romantique italienne postérieure, l'oeuvre de Cherubini n'est quant à elle qu'une curiosité, qui mérite bien mieux que celle de Charpentier de rester en marge des programmations lyriques : tant d'efforts pour tenter de nous émouvoir, et si peu d'émotion sincère. La belle ouverture, l'introduction de l'acte III, quelques airs méritent vraiment d'être écoutés, mais le drame reste factice, les émotions de carton-pâte, la progression dramatique maladroite : pour suivre la piste de Gluck, il ne suffit pas de s'en faire l'épigone.
Si le spectacle proposé par le Staatsoper mérite malgré tout le détour, c'est d'abord grâce à Christophe Rousset, qui dirige pour l'occasion l'Akademie für Alte Musik Berlin – des baroqueux donc, mais pas de musique baroque. Rousset avait déjà dirigé l'œuvre, on s'en souvient, avec la mise en scène crue, violente et passionnante, de Krzysztof Warlikowski : il connaît bien l'œuvre, en fait un festival de couleurs et souligne efficacement les inflexions du drame sans jamais tomber dans l'excès ; avec lui, l'œuvre date bien de 1797, et non de l'époque d'un plein romantisme. Il y aurait là matière à un enregistrement de référence de l'œuvre, qui dominerait immédiatement une discographie franchement déficiente, surtout pour la version française.
La mise en scène d'Andrea Breth est loin du choc Warlikowski, et on ne comprend pas très bien le choix des lieux, une sorte de local professionnel entre stockage et transit. Le choix a été fait de garder des dialogues en vers, certes drastiquement réduits, et d'ailleurs pour l'essentiel incompréhensibles : cela n'aide pas les chanteurs et fait retomber à zéro toute la tension dramatique à chaque interruption du discours musical. Reste une direction d'acteurs efficace et sensible, et au moins une atmosphère générale moins obscure que dans d'autres travaux de Breth pour la même maison : le spectateur peut se concentrer sans mauvaise conscience sur ce qu'il entend en se contentant de suivre à distance ce qui se passe sur scène.
Marina Rebeka assure l'écrasant rôle-titre avec vaillance, succédant dans cette production à Sonya Yoncheva ; elle nous permet de reconnaître le texte plus que de le comprendre directement, mais a un vrai sens stylistique qui lui évite de tomber dans la surcharge expressionniste – à l'exception de la deuxième partie de son dernier air (O Tisiphone…) où la musicalité lui fait défaut sans vrai profit émotionnel. Son Jason, Stanislas de Barbeyrac, est naturellement beaucoup plus à l'aise avec la diction, mais le personnage est un peu trop en retrait, faute d'investissement et faute d'un peu plus de lumière dans la voix. Peter Schöne, en peine avec le français, ne donne guère de consistance au personnage de Créon, tandis que la Néris d'Alisa Kolosova, au moins, parvient à donner un peu d'émotion dans son bel air.
Crédit photographique : © Bernd Uhlig (distribution de 2018)
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Berlin. Staatsoper. 24-XI-2023. Luigi Cherubini : Médée, opéra sur un livret de François-Henri Hoffmann. Mise en scène : Andrea Breth ; décor : Martin Zehetgruber ; costumes : Carla Teti. Avec Marina Rebeka (Médée), Stanislas de Barbeyrac (Jason), Peter Schöne (Créon), Maria Kokareva (Dircé), Alisa Kolosova (Néris)… Staatsopernchor ; Akademie für Alte Musik Berlin ; direction : Christophe Rousset.