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I Gemelli : Le Retour d’Ulysse dans la patrie des chanteurs

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Claudio Monteverdi (1567-1643) : Il Ritorno d’Ulisse in Patria, dramma in musica en 3 actes sur un livret de Giacomo Badoaro d’après L’Odyssée d’Homère. Emiliano Gonzalez Toro, ténor (Ulysse) ; Rihab Chaieb, mezzo-soprano (Pénélope) ; Laurane Oliva, soprano (Junon / La Fortune) ; Philippe Talbot, ténor (Eumée) ; Emöke Baráth, soprano (Minerve) ; Mathilde Etienne, soprano (Mélantho) ; Philippe Jaroussky, contreténor (la Fragilité humaine) ; Anders J.Dahlin, ténor (Pisandre) ; Nicolas Brooymans, basse (Le Temps / Antinoüs) ; Anthony León, ténor (Amphinome / Jupiter) ; Jérôme Varnier, basse (Neptune) ; Zachary Wilder, ténor (Télémaque) ; Álvaro Zambrano, ténor (Eurymaque) ; Fulvio Bettini, baryton (Irus) ; Alix Le Saux, mezzo-soprano (Euryclée) ; Juan Sancho, ténor (Mercure) ; Christina Fanelli, soprano (Amour) ; Nathalie Pérez, soprano et Lorrie Garcia, mezzo-soprano (Coro) ; I Gemelli : Mathilde Etienne, Emiliano Gonzalez Toro. 3 CD Gemelli Factory. Enregistrés aux Studios Riffx – La Seine Musicale en août et octobre 2021. Livret de 150 pages. Durée totale : 2:57:00

 
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Formidable écrin pour ses interprètes, la nouvelle version du chef-d'oeuvre de Monteverdi imaginée par est celle du retour aux sources.

Après L'Orfeo paru chez Naïve en 2020, Le Retour d'Ulysse dans sa patrie capté dans la foulée des concerts à l'automne 2021, l'ensemble co-fondé en 2019 avec par le ténor chilien, paraît sur Gemelli Factory, entreprise maison qui s'est livrée à un remarquable travail éditorial. En témoigne la passion irriguant le conséquent entretien à deux voix qui ouvre un livre-disque lesté de 150 pages de textes illustrés, consacrés à tout ce qui touche de très près comme de très loin à cet opéra considéré bien à tort comme le moins attrayant des trois qui nous sont parvenus intacts de la production du compositeur.

La spécificité première de I Gemelli est de n'être pas dirigé par la baguette d'un chef (qui aura bien sûr dispensé en amont la myriade d'intentions à même de rendre chacun autonome). Cela tombe bien pour , qui, en plus de pouvoir se targuer d'avoir interprété tous les rôles de « l'opéra aux neuf ténors », assure cette fois le rôle-titre. C'est la première fois que l'on entend un tel Ulysse, un tel interprète allant jusqu'à travestir la voix du héros homérien, qui, comme on le sait, passe une bonne partie de l'œuvre chenu et grenu, avant de révéler sa splendide virilité. La caricature redoutée devient au contraire ici source d'indicible émotion. Une immense incarnation tout en clairs-obscurs, et dont on boit chaque mot.

Le verbe est le maître-mot de cet enregistrement (une tendance que l'on retrouve aujourd'hui aussi chez Stéphane Fuget) pour chacun des membres de la pléthorique distribution (19 au total) réunie au chevet de la partition. (autre artiste en métamorphose), assez déchirant en Fragilita Umana, est le premier nom inscrit sur la formidable carte de visite que représente cet enregistrement pour l'ensemble de ses interprètes. Des plus confirmés (Emöke Baráth, lumineuse et énergique Minerve ; , Télémaque idéalement solaire ; , Neptune terrifiant de noirceur rugueuse, , Ericlea très veloutée, …), à ceux qu'on intronise sur la planète baroque (, Pénélope très convaincante même si d'emblée moins identifiable que certaines devancières, de Frédérica von Stade à Lucille Richardot ; , Eumete d'un lyrisme éperdu), ou à ceux qui saisissent le témoin de la relève (, Anthony León, , ) : tous les noms sont à retenir.

Ce rapport quasi-amoureux à la voix des chanteurs a conduit à une prise de son plaçant tout ce beau monde très près du micro, chacun faisant ainsi jeu égal avec la formation orchestrale, ce qui retire un peu d'ampleur à un paysage monteverdien qu'on a connu moins confiné (Harnoncourt, Jacobs, Garrido). De prime abord alléché par la richesse d'un instrumentarium d'une trentaine d'élus (dont la doulciane, la harpe triple, la guitare, le lirone et même la trompette marine), force est de convenir que que ces derniers sont utilisés avec une parcimonie qui n'est pas sans rappeler celle qui avait présidé au très dépouillé Couronnement de Poppée version Malgoire. Le doute, instillé dès l'Acte I, déjà passablement sous emprise du continuo, se confirme avec un II et un III aux allures d'interminables récitatifs en cinémascope. Même si I Gemelli a décidé, et l'on s'en réjouit, de faire mettre en musique par Josué Meléndez Pelaez deux passages du livret dépourvus de notes (dont un monologue de Mercure au cœur duquel on retrouvera une fragrance monteverdienne familière), on comprend progressivement que ce Retour d'Ulysse, bien que suprêmement chanté (ineffable Dolce Speme), est celui du retour aux origines d'un opéra dont ne subsistent que deux lignes dévolues à basse chiffrée et à la voix, et dont on désespère toujours de ne pas savoir dans quelle instrumentation il a été créé.

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Claudio Monteverdi (1567-1643) : Il Ritorno d’Ulisse in Patria, dramma in musica en 3 actes sur un livret de Giacomo Badoaro d’après L’Odyssée d’Homère. Emiliano Gonzalez Toro, ténor (Ulysse) ; Rihab Chaieb, mezzo-soprano (Pénélope) ; Laurane Oliva, soprano (Junon / La Fortune) ; Philippe Talbot, ténor (Eumée) ; Emöke Baráth, soprano (Minerve) ; Mathilde Etienne, soprano (Mélantho) ; Philippe Jaroussky, contreténor (la Fragilité humaine) ; Anders J.Dahlin, ténor (Pisandre) ; Nicolas Brooymans, basse (Le Temps / Antinoüs) ; Anthony León, ténor (Amphinome / Jupiter) ; Jérôme Varnier, basse (Neptune) ; Zachary Wilder, ténor (Télémaque) ; Álvaro Zambrano, ténor (Eurymaque) ; Fulvio Bettini, baryton (Irus) ; Alix Le Saux, mezzo-soprano (Euryclée) ; Juan Sancho, ténor (Mercure) ; Christina Fanelli, soprano (Amour) ; Nathalie Pérez, soprano et Lorrie Garcia, mezzo-soprano (Coro) ; I Gemelli : Mathilde Etienne, Emiliano Gonzalez Toro. 3 CD Gemelli Factory. Enregistrés aux Studios Riffx – La Seine Musicale en août et octobre 2021. Livret de 150 pages. Durée totale : 2:57:00

 
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