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Bryn Terfel : un formidable Boris Godounov repentant à Londres

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Modest Moussorgski (1839-1881) : Boris Godounov, opéra en 7 scènes (version originale de 1869) sur un livret du compositeur d’après Pouchkine. Mise en scène : Richard Jones. Scénographie : Miriam Buether. Costumes : Nicky Gillibrand. Lumières : Mimi Jordan Sherin. Avec : Bryn Terfel, baryton-basse (Boris) ; John Graham-Hall, ténor (Chouïski) ; David Butt-Philip, ténor (Grigori / Dimitri) ; John Tomlinson, basse (Varlaam) ; Ain Anger, basse (Pimen) ; Kostas Smoriginas, baryton-basse (Chtchlelkalov) ; Sarah Pring, mezzo-soprano (la Nounou) ; Vlada Borovko, soprano (Xenia) ; Andrew Tortise, ténor (l’Innocent) ; Rebecca de Pont Davies, mezzo-soprano (l’Aubergiste) ; Ben Knight (Fiodor, fils de Boris) ; Royal Opera Chorus ; Orchestre du ROH, direction : Sir Antonio Pappano. 1 Blu-Ray Opus Arte. Enregistré live au Royal Opera House de Covent Garden à Londres le 21 mars 2016. Notice anglaise. Durée : 136′

 

Le double intérêt de cet enregistrement londonien de Boris Godounov, mis en scène par et dirigé par est d'acter les débuts bouleversants, en 2016, de dans le rôle-titre, en même temps que de remettre au jour la rare, concise et efficace version originale de 1869.

Parmi les nombreuses versions et révisions successives de Boris Godounov de (1872, 1874, révision Rimski de 1896 et de Chostakovitch en 1939-1940) le principal mérite de cette version initiale de 1869 est de savoir exactement de quoi l'on parle… Bien que refusée par la direction des Théâtres Nationaux au motif de l'absence de rôle féminin d'envergure, il ne s'agit nullement d'une simple esquisse, mais d'un projet achevé, concis, centré sur le personnage de Boris, d'une grande puissance dramatique, d'une unité stylistique sans faille et d'une audace remarquable, décliné en 7 scènes où les scènes polonaises sont absentes, de même que celle de la forêt de Kromy, tandis que les scènes dans les appartements du Tsar sont réduites à leur plus simple expression et que le peuple russe n'y occupe qu'un rôle de figurant, tout comme le faux tsarévitch Grigori/Dimitri. On comprend dès lors que tout le poids de la dramaturgie repose sur les puissantes épaules de Boris, magnifiquement incarné par , rongé jusqu'à la mort par la culpabilité et le remords.

La mise en scène de est d'une grande lisibilité ; l'assassinat du Tsarévitch est représenté sur scène dès l'Ouverture et ne cessera d'être rappelée tout au long du drame par l'image d' une toupie symbolique omniprésente et oppressante ; la scénographie simple de Miriam Bluether utilise principalement un tableau à deux étages qui simule les appartements du Tsar dans la partie supérieure et le peuple au niveau inférieur ; un comptoir évoquant l'auberge de la frontière lituanienne, la sombre cellule où le moine Pimen dessine l'histoire de la Russie et les gradins de la Douma complètent le dispositif scénique ; les lumières (Mimi Jordan-Sherin) sont utilisées de façon optimale avec de beaux effets de clair-obscur ; les costumes (Nicky Gillibrand) hésitent entre tenues traditionnelles d'apparat somptueuses, vêtements contemporains et loques déchirées pour le peuple. La direction d'acteur, efficace et discrète, ne détourne jamais l'attention du drame tristement humain qui se joue.

On a depuis longtemps vanté les talents d'acteur de  : ils atteignent ici, avec ce personnage historique, une intensité dramatique rarement atteinte, exaltée par une maitrise vocale superlative, à l'instar des grandes basses russes titulaires du rôle comme Chaliapine, Ghiaurov, Christoff ou encore Nesterenko. La diction longuement travaillée, la puissance, le timbre, l'ambitus, l'engagement scénique poignant, impitoyablement scrutée par des gros plans saisissants, tout concourt ici à une composition d'exception, complexe et envoutante, depuis la jubilation et le doute initiaux jusqu'à l‘agonie finale, habitée de terreur, d'hallucinations et de remords mortifères. Dans cette version première, Pimen, lui aussi superbement figuré par , retrouve sa place essentielle dans l'incarnation de Némésis, ressort du drame intérieur de Boris, à l'instar du Dimitri / Grigori sournois et bien chantant de ou de l'Innocent accusateur d'. Le reste de la distribution n'appelle aucun reproche, qu'il s'agisse du vipérin et ambivalent Chouïski de , de l'autoritaire et puissant secrétaire de la Douma de  , de l'inénarrable Varlaam de dans la « Chanson de Kazan », sans oublier les non moins méritants en aubergiste conspiratrice, la Xenia de ou le Fiodor (fils de Boris) du jeune .

Dans la fosse, conduit l'excellent Chœur d'adultes et d'enfants, l'orchestre du Royal Orhestra House et les chanteurs dans un équilibre souverain, toujours au plus près de la dramaturgie. Au plan éditorial, on notera quelques insuffisances de la notice se réduisant à un court synopsis, et limitée à la seule langue anglaise, avec heureusement des surtitrages en français, anglais, allemand, coréen ou encore japonais. Un Blu-Ray indispensable qui trouvera aisément sa place au coté d'autres versions plus connues comme celle de 1874 ou celle révisée par Rimski-Korsakov.

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Modest Moussorgski (1839-1881) : Boris Godounov, opéra en 7 scènes (version originale de 1869) sur un livret du compositeur d’après Pouchkine. Mise en scène : Richard Jones. Scénographie : Miriam Buether. Costumes : Nicky Gillibrand. Lumières : Mimi Jordan Sherin. Avec : Bryn Terfel, baryton-basse (Boris) ; John Graham-Hall, ténor (Chouïski) ; David Butt-Philip, ténor (Grigori / Dimitri) ; John Tomlinson, basse (Varlaam) ; Ain Anger, basse (Pimen) ; Kostas Smoriginas, baryton-basse (Chtchlelkalov) ; Sarah Pring, mezzo-soprano (la Nounou) ; Vlada Borovko, soprano (Xenia) ; Andrew Tortise, ténor (l’Innocent) ; Rebecca de Pont Davies, mezzo-soprano (l’Aubergiste) ; Ben Knight (Fiodor, fils de Boris) ; Royal Opera Chorus ; Orchestre du ROH, direction : Sir Antonio Pappano. 1 Blu-Ray Opus Arte. Enregistré live au Royal Opera House de Covent Garden à Londres le 21 mars 2016. Notice anglaise. Durée : 136′

 
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