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Concours de promotion du Ballet de l’Opéra national de Paris : compte-rendu

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Paris. Opéra Garnier. 9 et 10-XI-2023. Ballet de l’Opéra national de Paris : Concours annuel du Corps de Ballet de l’Opéra national de Paris

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Le concours de promotion 2023 du Ballet de l'Opéra national de Paris, qui inaugure de nouvelles règles, s'est avéré richement doté en postes tant du côté des artistes hommes que des artistes femmes. Les résultats sont assez logiques avec des niveaux de classes très différents, même si toutes de très haute tenue.

À nouveau directeur du Ballet, nouvelles modalités du Concours annuel de promotion du Corps de ballet de l'Opéra de Paris. Cette année, et à titre expérimental, les postes de Premier.e danseur.se ne font pas l'objet d'un concours mais de nominations à venir par , le directeur de la Danse.

Ambiance détonante donc, ces 9 et 10 novembre à l'Opéra Garnier, où avait lieu le Concours annuel du Corps de Ballet avec cette révolution de palais expérimentée cette année. La revendication de la fin du Concours de promotion pour la classe des Sujets voulant devenir Premiers danseurs vient des danseurs eux-mêmes, qui estiment (à juste titre) qu'un poste de soliste s'acquiert par l'expérience scénique et non par un jeu subtil de votes et de promotions parfois surprise, résultats d'une simple performance de concours. On sait combien, par le passé, de nombreux heureux élus n'auront pas fait de futurs Étoiles. Reste que cette volonté des danseurs tranche avec ce qui fait, depuis 1860 (!), l'ADN si original et unique au monde de l'Opéra de Paris : les danseurs y montent en grade par un concours interne, où les dix jurés à parité entre danseurs du Ballet tirés au sort et postes de directions du Ballet et directeur de l'Opéra, permettent justement, de mettre en avant une démocratie interne plutôt que le fait du prince. Les mois à venir permettront de voir si le choix expérimental des danseurs s'avèrera pertinent. Reste aussi que cela met une forte pression sur , le directeur du Ballet, qui en a déjà beaucoup. Le but final serait-il de mettre fin, en douceur, au Concours interne ?

Le concours 2023 amputé de la compétition des Sujets a donc semblé un peu léger, comme s'il y avait entrée-plat mais pas de dessert… Alors que dans le même temps, la carte était fort riche, avec un nombre de postes à pourvoir qu'on a rarement vu aussi abondant : cinq places de Choryphées femmes et six places de Choryphées hommes, cinq places de Sujets femmes et quatre places de Sujets hommes. Autant dire Byzance ! D'où une ambiance à la fois rassérénée par des chances décuplées, et tendue parce qu'il ne fallait pas laisser passer cette bonne occasion.

Saki Kuwabara

Du coup, il y avait foule chez les Quadrilles Femmes : vingt candidates pour cinq postes. Vingt filles à l'énorme potentiel, qui ont su apprivoiser les difficultés (relatives) de la variation imposée du Corsaire, qui exigeait surtout musicalité, goût du ralenti et sens de l'équilibre. Artistes elles sont, et cela a permis d'enchaîner vingt fois la même variation sans l'ombre d'un ennui. C'est donc la variation libre qui pouvait départager plus facilement les candidates. Une seule danseuse a choisi une variation contemporaine (Adèle Belem), les autres préférant éprouver (et prouver) leur technique avec du Noureev, Robbins ou Balanchine. Les résultats – avec toute notre subjectivité – sont partiellement justes : la Japonaise a logiquement remporté la première place avec sa si belle maitrise de la variation de l'Automne de Robbins. Les autres lauréates (, un peu surprenante à cette seconde place), mais surtout la lyrique Coréenne Seohoo Yun, la très technique et la très cool , très jazzy dans Who Cares ? de Balanchine méritent leur promotion, même si on ne comprend pas le non classement de Lisa Gaillard-Bortolotti (déjà appréciée l'an dernier) tellement brillante dans la même variation de l'Automne. Et l'absence également de , si raffinée dans la difficile variation de la sixième fée dans La Belle au bois dormant de Noureev. De même que celle de Diane Adellach, qui ouvrait le bal et qui était si juste et mature dans Gamzatti de La Bayadère.

L'après-midi, entrée en piste de sept candidates Coryphées (soit 50 % des effectifs de cette classe) qui ont eu beaucoup de chance avec trois places offertes. Le niveau d'ensemble ne fut pas aussi bon que celui des Quadrilles, ce qui est courant : les jeunes pousses veulent grandir au plus vite, et les âges ne sont plus les mêmes. La variation imposée de Raymonda de Noureev n'est évidemment pas faite pour tomber dans la facilité. (remarquée l'an dernier) a littéralement dominé ce concours avec sa joie de danser qui transcende une technique déjà affermie. Ce petit gabarit a tout d'une grande et bon sang ne saurait mentir, elle est aussi la fille d'Elisabeth Maurin, danseuse étoile maison, ce qui ne présageait en rien de son talent, cela dit. Elle a un côté farfadet plus assumé qui lui ouvrira tous les personnages comiques ou légers comme Kitri dans Don Quichotte ou Lise dans La fille mal gardée. On comprend mal, du coup, que la première place soit allée à , avec un Who cares ? assez ordinaire. Quant à Celia Drouy, arrivée troisième, son Bakhti III était loin d'être oriental ni béjartien. On aurait aimé voir récompensé le choix ambitieux et personnel de la plus ancienne qui s'est fait (et nous a fait) très joliment plaisir avec une Mort du cygne personnelle et très touchante. D'autant que rares ont été les moments de vraie grâce dans ces concours avant tout techniques et sous contrôle.

Cela dit, le contrôle est ce qui a cruellement manqué, le lendemain, aux dix-sept garçons Quadrilles, dans la terrible variation imposée de Tchaïkovski pas de deux de Balanchine (sur une partition du Lac des cygnes). À peine une minute de variation mais si riche en grands sauts et batterie, et ce fut un massacre généralisé, avec des pertes d'équilibres à répétition, une course après la musique, un travail de pieds et de tours rarement propre, et le stress final des cinq double tours en l'air cinquième à réaliser d'affilée. et , le très en vue Enzo Saugar (salué l'an dernier) et auront quand même été les rescapés de cette variation maudite, et ont d'autant plus décroché leur place qu'ils ont proposé de vraies œuvres d'art dans leur variation libre. Enzo Saugar, décidément très béjartien après avoir assuré le Chant du compagnon errant au printemps à Bastille a proposé un somptueux Oiseau de feu, avec des bras travaillés, des sauts enlevés, et tout l'esprit de son créateur. , a voulu montrer sa technique parfaite avec le redoutable Donizetti de Manuel Legris. a su retrouver l'effluve lifarienne dans sa mazurka de Suite en blanc et cela n'est plus si fréquent. Quant à , il s'est emparé avec précision du Rothbart du Lac des cygnes de Noureev. On regrettera l'absence de Milo Aveque (très beau Solor dans La Bayadère) et de (touchant Roméo) au palmarès…

Nicola Di Vico

Contrairement aux Quadrilles, les Choryphées hommes ont su faire fi des difficultés techniques de la variation imposée du Marco Spada signée Pierre Lacotte. Les neuf candidats pour quatre postes avaient belle allure. Les quatre élus étaient à leur place néanmoins. On aurait volontiers placé Chun Wing Lam (qui nous avait déjà beaucoup plu) en tête, si précis, engagé, technique et espiègle dans son choix malin de la variation de Zaël dans La Source de Jean-Guillaume Bart. Il est second, derrière Nicola Di Vico impeccable dans ses deux variations, mais moins charismatique dans ce concours que le jeune danseur prometteur de Hong Kong. La quatrième place de avec le choix d'une variation de Crystal Pite très inspirée, récompense aussi sans doute une vraie persévérance après de lourdes blessures suite à un accident de la route. Dommage pour Mathieu Contat (déjà remarqué) qui avait ses chances cette année, et repart classé (sixième) mais pas promu.

L'ensemble final faisait plutôt bonne impression, avec la sensation que les nombreux danseurs étrangers désormais dans la troupe (venus surtout d'Asie et d'Italie) et qui ont peut-être davantage l'esprit de concours, fouettent le sang d'une compagnie en quête de renouveau, et appelée à se renouveler profondément ces prochaines années, au vu des nombreux départ en retraite à venir, tant chez les Étoiles que dans le Corps de Ballet.

Crédits photographiques : photo Une « Le Lac des cygnes » 2016/2017 © Svetlana Loboff / ONP ; portraits © Julien Benhamou / ONP

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