Edgar Moreau joue Weinberg et Dutilleux, dans les traces de Rostropovitch…
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Mieczysław Weinberg (1919-1996) : Concerto pour violoncelle et orchestre en do mineur op. 43. Henri Dutilleux (1916-2013) : Concerto pour violoncelle et orchestre « Tout un monde lointain… ». Edgar Moreau, violoncelle ; WDR Sinfonieorchester Köln, direction : Andris Poga. 1 CD Erato. Enregistré du 21 au 23 septembre 2022 (Weinberg) et du 8 au 10 novembre 2022 (Dutilleux) à la Philharmonie de Cologne. Notice de présentation en anglais, français et allemand. Durée : 61:40
EratoDeux compositeurs quasiment contemporains, Weinberg et Dutilleux, deux esthétiques différentes pour deux concertos pour violoncelle fortement redevables à Mstislav Rostropovitch qui les créa tous les deux, (respectivement en 1957 et 1970) dont Edgar Moreau donne une mise en miroir magistrale et passionnante.
Magistrale assurément car l'interprétation donnée ici par Edgar Moreau, bien que différente (plus lyrique dans Weinberg ) n'a rien à envier à celle du maitre polono-russe. Passionnante aussi, car mettant en avant deux conceptions esthétiques diamétralement opposées : tonale pour l'une, atonale pour l'autre et deux sources d'inspiration différentes : regardant vers le passé, vers Chostakovitch, profondément ancrée dans l'histoire soviétique pour Weinberg ; visionnaire et poétique ne pouvant se rattacher à aucun prédécesseur pour Dutilleux.
Cet enregistrement présente, en outre, le grand intérêt de participer, de belle manière, de la reconnaissance tardive, mais méritée, de Mieczysław Weinberg (1919-1996) avec ce Concerto pour violoncelle et orchestre élaboré à partir d'un concertino datant de 1948, transformé secondairement en grand concerto en 1956 en en contextualisant la composante lyrico poétique. Si le Concertino répondait aux exigences de Jdanov qui exigeait une musique faite pour le peuple, immédiatement séduisante et mélodieuse capable de s'opposer au « formalisme » des complexités élitistes occidentales, le Concerto profita quant à lui du dégel qui succéda à la mort de Staline, Weinberg lui donnant alors un nouveau souffle, en en accentuant les couleurs et en amplifiant la structure et l'accompagnement orchestral capables de dialoguer avec son mentor, Dimitri Chostakovitch.
Poignant, obsessionnel et tendu l'Adagio initial exacerbe le caractère lyrique du violoncelle, tandis que le Moderato suivant plus animé et obsédant développe des accents de musique juive et espagnole sur un fond de dramatisme résigné. L'Allegro scherzando met en avant toute la virtuosité et le cantabile du soliste, encadré par un orchestre véhément avant une cadence très intériorisée, d'une digitalité époustouflante. Le Finale très « chostakovitchien », sans en être toutefois un pale épigone, conclut sur une joute serrée, récapitulative et d'une belle ampleur dans un dialogue avec le WDR Sinfonieorchester conduit de façon équilibrée par Andris Poga.
Avec le Concerto pour violoncelle et orchestre d'Henri Dutilleux, c'est effectivement « Tout un monde lointain » qui s'oppose à celui de Weinberg. Inspiré librement de Chevelure, poème extrait des Fleurs du mal de Baudelaire, il se décline en cinq mouvements : Enigme tout entier habité d'un sentiment d'étrangeté et de solitude (du violoncelle) au sein d'un monde mystérieux ; Regard qui exploite le registre suraigu du violoncelle dans une suite de trois tableaux remarquables par leur fluidité, leur caractère obsessionnel envoutant et la symétrie des motifs, sous tendus par une orchestration lumineuse et diaphane ; Houles constitué d'âpres turbulences mouvantes et virtuoses dans un climat orchestral presque vénéneux, sensuel et aquatique ; Miroirs qui se déploie dans une succession mystérieuse et extatique de fragments mélodiques brisés (du violoncelle), baignant dans une instrumentation ciselée ; Hymne conclut dans la lumière virtuose du violoncelle avant de disparaitre dans le silence se fondant un monde lointain…
Un magnifique disque où soliste et orchestre rivalisent de lyrisme, de virtuosité et de poésie.
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Mieczysław Weinberg (1919-1996) : Concerto pour violoncelle et orchestre en do mineur op. 43. Henri Dutilleux (1916-2013) : Concerto pour violoncelle et orchestre « Tout un monde lointain… ». Edgar Moreau, violoncelle ; WDR Sinfonieorchester Köln, direction : Andris Poga. 1 CD Erato. Enregistré du 21 au 23 septembre 2022 (Weinberg) et du 8 au 10 novembre 2022 (Dutilleux) à la Philharmonie de Cologne. Notice de présentation en anglais, français et allemand. Durée : 61:40
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