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À Genève, le Novo Quartet remporte la palme

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Genève. Victoria Hall. 29-X-2023. Concours de Genève pour quatuor à cordes. Karol
Szymanowski (1882-1937) : Quatuor pour cordes no. 2, op. 56. Anton Webern (1883-1945) : Lansamer Satz, Six Bagatelles, op. 9. Félix Mendelssohn (1809-1847) : Quatuor pour cordes no. 6 en fa mineur, op. 80, Quatuor pour cordes no. 4 en mi min, op. 44/2, Quatuor pour cordes no. 2 en la mineur, op. 13. Béla Bartók (1881-1945) : Quatuor pour cordes no. 2 en la mineur, Sz. 67, Quatuor pour cordes no. 4 en do majeur, Sz. 91. Joseph Haydn (1732-1809) : Quatuor pour cordes op. 20 no, 2 en do majeur, Hab. III/32. Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Quatuor pour cordes no. 8 en mi mineur, op. 59/2 «Razumovsky». Novo Quartet, Ast Quartet, Quatuor Elmire, Quartetto Eos, Quartett Hana.

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En conquérant discret et indiscutable, le danois s'empare de la première place du Concours de Genève des quatuors à cordes et rafle pratiquement tous les prix spéciaux de ce même concours. Lui est attribué le Prix du public, le Prix jeune public, le Prix des étudiants et le Prix Concert de Jussy.

Fondé à Copenhague en 2018, le s'est illustré d'admirable manière durant toute cette compétition. Actuellement basé à Vienne et à Copenhague, le quatuor est composé de la première violoniste qui joue sur un violon de Josef Guadagnini de 1800, du second violoniste jouant un violon de David Tecchler de 1706, de l'altiste joue un alto de Noémie Viaud de 2021 (prêté par la Fondation Agustinus, fondation danoise très active dans la promotion de la musique classique et dans la restauration d'église) et de la violoncelliste qui joue un violoncelle moderne de Wojchiech Topa de sa propriété.

Pour l'admission aux épreuves finales du Concours de Genève, les candidats devaient présenter une vidéo sur laquelle ils jouent deux mouvements d'un quatuor de et deux mouvements d'un autre quatuor de Mendelssohn, Schubert ou Schumann. Ainsi des vingt-trois concurrents qui se sont présentés à cette épreuve, quatorze d'entre eux ont alors été sélectionnés. De là, une nouvelle présentation vidéo d'un quatuor de Mozart ou de Haydn et d'un quatuor d'un compositeur du XXᵉ siècle, permettrait à six d'entre eux de figurer parmi les ensembles admis physiquement à Genève pour se hisser aux deux demi-finales et finalement faire partie des trois quatuors finalistes. C'est dire si la porte du Concours de Genève est étroite et difficilement franchissable.

Nous avons visionné les vidéos des quatorze sélectionnés avant d'assister à la première des deux demi-finales. Déjà là, certains des ensembles s'illustraient par ce fameux «je-ne-sais-quoi» qui différencie l'artiste de l'exécutant. Et à l'évidence, le danois s'imposait. Mais, ne brûlons pas les étapes. Pour être en finale, il faut gagner toutes les épreuves. Et un faux pas est vite arrivé. Surtout dans une discipline aussi exigeante que celle du quatuor à cordes où l'on juge un ensemble de quatre musiciens noyant leur propre personnalité dans l'exécution unanime d'une œuvre en cherchant à la rendre unique aux oreilles de tous.


Nous avons suivi les cinq concurrents de la première demi-finale (le Atenea Quartet espagnol ayant dû déclarer forfait pour des raisons familiales d'un membre de l'ensemble). Sur la scène de la Salle Franz Liszt du Conservatoire de Musique de Genève, le (Allemagne) a ouvert les feux en offrant une prestation de qualité où nous avons pu apprécier un très beau Moderato dolce e tranquillo du Quatuor à cordes n°2, op. 56 de (1882-1937). Puis le (Italie) nous a impressionné par l'ampleur du son de son ensemble. Sa remarquable interprétation du Langsamer Satz de Anton Webern (1883-1945) nous a permis de s'imprégner de la musicalité des interprètes avec leur capacité de passer la voix de l'un à l'autre sans aucun à-coup, donnant l'impression qu'il s'agit toujours du même instrument. Et l'Allegro assai de leur Quatuor n° 6 en fa mineur, op. 80 de Mendelssohn était pure dentelle. Dans ce même quatuor, si le (Corée) a montré une belle énergie dans l'Allegro vivace assai, il n'a guère convaincu dans la suite de son récital quand bien même la qualité des interprètes reste d'un niveau exceptionnel. Dès les premières notes du (France), on navigue dans une autre dimension musicale. Le Quatuor n° 2 en la mineur, Sz. 67 de Béla Bartók (1881-1945) semble taillé à leur mesure. Quelle vie, quelle respiration, quelles couleurs, quels contrastes ! Fort de leur personnalité musicale, on trouve dans leur interprétation de jolies notes d'humour. Dans une musique réputée si austère, c'est un tour de force que d'y introduire ce sentiment. On retrouve cette joyeuse qualité, cette respiration humaine, dans leur manière de bien raconter les charmantes Six bagatelles, op. 9 d'Anton Webern. En terminant par un brillant Quatuor n° 4 en mi min, op. 44/2 de Félix Mendelssohn (1809-1847), on se dit qu'on tient là un sérieux prétendant à la première place du concours. Cette première demi-finale se termine avec la prestation du Novo Quartet (Danemark). Jouant debout (à l'exception de la violoncelliste !), ils empoignent le Quatuor n° 4 en do majeur, Sz. 91 de Bartók avec une aisance déconcertante sans laisser transparaître une quelconque appréhension face à la difficulté technique de cette œuvre ingrate et périlleuse. Au contraire, ils restent dans la belle musique dans le mouvement Non trop lento et d'une précision diabolique et d'une musicalité étincelante dans l'Allegretto pizzicato. Plus loin, on retrouve leur belle musicalité dans l'Adagio du Quatuor op. 20 no, 2 en do majeur, Hab. III/32 de .


Lorsqu'arrive le jour de la finale, on reste surpris de ne pas y retrouver le italien qui nous avait tant charmé. Peut-être qu'un tragique faux pas lors de la deuxième demi-finale les aura fait trébucher. Le (Allemagne), très concentré, débute cette finale avec le Quatuor ° 3 en mi majeur, op. 44/1 de Félix Mendelssohn. Techniquement irréprochable, cet ensemble nous est apparu comme manquant terriblement de volume sonore. Et si le second mouvement Menuetto : un poco allegretto nous a semblé un peu froid, et le troisième mouvement Andante espressivo joué avec plus de caractère mais encore manquant de son, l'ultime Presto con brio est apparu plus vivant mais malheureusement trop tard pour enthousiasmer la performance. Restaient en lice, nos deux favoris. D'abord le français, qui propose le Quatuor n° 8 en mi mineur, op. 59/2 «Razumovsky» de (1770-1827). Si dans le premier mouvement Allegro, les musiciens nous offrent de beaux contrastes, on apprécie l'intensité qu'ils développent dans le second mouvement Molto adagio. On regrettera peut-être un certain manque d'intention dans le final Presto qu'on aurait aimé plus viril. Reste que le niveau de leur prestation mérite l'enthousiasme du public qui a accueilli chaleureusement leur prestation. A clore la compétition, le Novo Quartet entre en scène. En grande tenue, les deux messieurs vêtus d'un complet veston vert-bouteille, la première violoniste et la violoncelliste en robe blanche. A leur programme, le Quatuor n° 2 en la mineur, op. 13 de Félix Mendelssohn. Dès les trois premières notes du court Adagio introductif, on reste muet d'émotion. Quelle qualité de son, quel engagement ! Dans l'Allegro vivace, le «jouer-ensemble» fait merveille. Véritable symphonie de son, la précision avec laquelle chacun s'engage est un véritable régal. Sans effets de manche, tout est à la musique. On sent véritablement la symbiose, chacun reste en communion totale avec la musique de l'autre. Dans l'Adagio non lento, le temps est suspendu mais sans s'épancher dans le pathos. Chaque note est dosée en fonction de celles que jouent les autres musiciens. Quelle écoute mutuelle ! On reste accrochés à leur interprétation, aimantés par tant de musicalité. Le final Presto est un feu d'artifice couronné par la reprise de l'Adagio initial. Le silence prolonge de quelques secondes cette superbe interprétation avant que le public fasse une belle ovation à cet ensemble.

Il faudra attendre plus d'une heure et demie pour connaître le palmarès de ce concours de quatuors. Pas tant pour l'évidence du premier prix attribué au Novo Quartet mais, pour la surprenante décision de classer ex-aequo le et le Quatuor Elmire au deuxième rang, alors qu'à notre avis le quatuor français avait offert une bien meilleure prestation que ceux du Quartett Hana. Mais peut-être que le jugement de spécialistes de la musique de quatuor comme celui du jury de Genève a-t-il fait des séparations importantes entre l'interprétation sensible de la musique et le strict respect d'une partition. Reste que le niveau de cette compétition est tel qu'il a suggéré à , la présidente du jury, ces mots : «Nous avons assisté plus à de véritables concerts de musique qu'à un concours !»

Crédit photographique : HD © Anne-Laure Lechat

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