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« On aura tout vu » : le Palazzetto Bru Zane ressuscite les arts du café-concert

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Ferme de Villefavard. 22-X-2023. « On aura tout vu » : Œuvres de René Mercier, Eric Satie, Théodore Botrel, Emile Gitral, Vincent Scotto, Yvette Guilbert, Léon Laroche, Louis Byrec, Raoul Moretti, etc… Conception et mise en scène : Flannan Obé. Collaboration artistique et création décors et costumes : Pierre Lebon. Piano : Delphine Dussaux ; Marie Gautrot : mezzo-soprano ; Flannan Obé : ténor ; Pierre Lebon : baryton. Production sur une idée du Palazzetto Bru Zane en coproduction avec la ferme de Villefavard.

Avant d'être un lieu de concert, la ferme de Villefavard est une résidence où des artistes viennent séjourner pour créer, peaufiner des projets et les présenter au public dans une modalité « work in progress ». C'est dans ce cadre que le ténor a embarqué ses complices sous l'égide du pour ressusciter dans la joie et le décalage l'esprit des cafés concerts.

"On aura tout vu" Ferme de Villefavard

Un répertoire trop peu joué et connu aujourd'hui. Alors, désuet le café-concert ? Comment définir le café-concert qui régna sur la France entre 1850 et 1920 et comment le faire revivre ? Le s'appuie ici sur quatre artistes inspirés pour tenter l'aventure. Il faut dire que ces lieux ont connu plusieurs facettes. Estaminets où l'on poussait la chansonnette, où l'on se délectait de spectacles comiques, de pantomimes, de danses et d'acrobatie, les cafés-concert étaient aussi dans les années 1900 un lieu d'expression politique. Espaces de sociabilité, ces laboratoires d'inventivité ont vu la naissance de vedettes nationales comme Paulus ou Yvette Guilbert ou bien encore le chansonnier Aristide Bruant. Ce répertoire de chansons, d'airs d'opérettes pourrait paraître suranné ou vieillot aujourd'hui mais le quatuor d'artistes qui les interprètent ici avec talent, nous donne au contraire à savourer la poésie (parfois grivoise), la profondeurs des mots, la puissance du décalage et de la distance et enfin et surtout il montre la permanence des préoccupations d'hier et d'aujourd'hui (le besoin d'amour, la guerre, son absurdité et ses ravages, la quette d'argent, la survie, etc) quel que soit le vecteur choisi. Le spectacle, présenté ici pour la première fois est en phase de rodage mais tout est en place pour le succès et peut-être un nouveau disque pour le label Bru Zane.

Quand on rentre donc dans la salle de la ferme de Villefavard on y trouve un grand caisson noir avec un piano accolé et une petite troupe de quatre artistes qui s'affolent autour. Le dispositif scénique n'est pas encore totalement prêt nous prévient-t-on et l'on comprend rapidement que le fignolage se fera durant le spectacle, occasionnant des scènes burlesques d'une naïveté salvatrice en des temps sérieux et moroses. Ce dispositif de « théâtre itinérant » malin et bien pensé (avec scène tournante, escaliers intégrés et spots de lumières) évoque Paris, Montmartre et le cabaret au chat noir où s'égrèneraient avec beaucoup de fluidité les morceaux de ce répertoire si diversifié que ce soit dans son approche stylistique que thématique. Les jeunes interprètes (rappelons que et sont aussi aux manettes du spectacle) s'en donnent à cœur joie avec beaucoup de conviction et de sincérité : les talents de comédien, la voix et la prosodie claires de , sorte de ténor-clown sérieux qui déraille progressivement, sont en parfaite adéquation avec ce répertoire, abordé ici avec élégance et respect. Le superbe mezzo dense, charnu et profond de sacrifie parfois un peu les mots à la beauté du son mais aborde avec un égal succès, que ce soit dans l'émotion ou le rire, tous les rivages de ce répertoire, de l'artiste sérieuse un rien diva et aristocratique (« je te veux » d') à la pochtronne de comptoir hilarante au lendemain d'une nuit d'amour (« je suis pocharde » de Léon Laroche et Louis Byrec) en passant par les merveilleuses « Vierges » de Dalleroy et Yvette Guilbert. Le burlesque et ses acrobaties sont magnifiquement portés par le baryton incarnant avec délectation le naïf de service. Enfin, la pianiste s'amuse beaucoup avec ce répertoire et pousse elle-même et assez brillament la chansonnette avec « la leçon de piano » de Scotto, d'une grivoise élégance, se mettant au passage le public dans la poche.

Le tout se termine par le « on aura tout vu » extrait des « Sœurs Hortensia » d'André Barde et Raoul Moretto, qui donne son nom et sa philosophie au spectacle en nous chantant une drôle d'époque où l'on est un peu loufoque et où plus rien ne nous choque … Ca vous ne vous évoque rien ?

Crédits photographiques : © Ferme de Villefavard

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Ferme de Villefavard. 22-X-2023. « On aura tout vu » : Œuvres de René Mercier, Eric Satie, Théodore Botrel, Emile Gitral, Vincent Scotto, Yvette Guilbert, Léon Laroche, Louis Byrec, Raoul Moretti, etc… Conception et mise en scène : Flannan Obé. Collaboration artistique et création décors et costumes : Pierre Lebon. Piano : Delphine Dussaux ; Marie Gautrot : mezzo-soprano ; Flannan Obé : ténor ; Pierre Lebon : baryton. Production sur une idée du Palazzetto Bru Zane en coproduction avec la ferme de Villefavard.

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