Miet Warlop inaugure le Festival d’Automne dans la sueur et la joie

Sur scène, à jardin, une poutre de gymnastique, parallèle aux coulisses, sur laquelle une performeuse athlète-violoniste répète inlassablement la même boucle musicale, faisant varier le rythme, emmené par un métronome capricieux. À côté de la poutre et devant un petit public factice tantôt abattu, tantôt hystérique, un tapis de course qui fait courir un chanteur, lui aussi athlète, lui aussi répétant inlassablement une boucle, celle des paroles de ce One Song entêtant.

Devant le coureur, un musicien claque les cordes de sa contrebasse au rythme de ses abdominaux, incarnant dans ses muscles les soubassements de la mélodie. Un percussionniste, dont la batterie s'étale sur la scène, marque la partition effrénée de cette chanson qui unit cette équipe hors du commun à laquelle se joint, enfin, un pianiste voltigeur. Une speakerine commente dans un grommelot délicieux ce qui s'apparente à une démonstration sportive, pendant qu'une pom pom girl déplace et assemble des tablettes fragiles sur lesquelles sont inscrites des lettres mystérieuses.

Artiste belge née en 1978, vue au Palais de Tokyo ou au Festival d'Avignon, performeuse, plasticienne et chorégraphe, Miet Warlop revisite avec ce One Song le concert rituel de De Sportband/Afgetrainde de 2005 et la pièce chorale Fruits of labor de 2016. Tout est millimétré dans ce marathon musical. Le chœur sportif vibre au rythme du métronome, dont la fréquence est modifiée à plusieurs reprises par les membres du groupe. 

Le temps est maîtrisé et l'énergie gargantuesque déployée sur scène rend sa matière palpable, électrisante et joyeuse. Emporté par une heure effrénée, colorée d'une gymnastique délirante, le public assiste avec allégresse à ce qui fut, originellement, dans la démarche de l'artiste, un requiem. Aujourd'hui, le souvenir apaisé de la mort du frère de Miet Warlop colore même One Song d'une sorte de joie : la condition presque nécessaire pour cette performance au tutoiement des étoiles.

Crédit photographiques : © Michiel Devijver